Fouille

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Elle aperçut immédiatement son visage. Il lui souriait.

Elle pris peur, voulut se retourner et courir. Alors qu'il  se rapprochait comme à leur habitude, elle sentait sa poitrine se serrer et son coeur se débattre. 

"-C'est quoi s'te tête?? fit le jeune homme un peu désemparé.

-Guillaume, je suis tellement désolée...il y a des choses qui ont changé, je peux plus te voir comme ça. Je dois reprendre ma vie en main...

-...j'hallucine. L'autre coup tu voulais disparaître et là tu veux te r-enterrer dans ta vie pourrie? Tu craques complet ou quoi? Est ce que ça a un rapport avec l'autre jour, le truc de santé que tu avais? ajouta t-il inquiet."

Guillaume vit qu'il avait tapé dans le mille.

"-Qu'est ce qu'il y a? Putain tu me fais flipper. T'as genre un cancer ou quoi?

-Non non pas du tout..."

Julianne vit que Guillaume était sincèrement touché, réellement inquiet et cela l'émeut. Au départ, elle avait pensé l'éliminer de sa vie, ne pas lui en parler, ne plus le voir... mais elle pensa soudain qu'elle lui devait bien la vérité, ne serait-ce parce qu'il la verrait bien s'arrondir, au lycée.

"-Je suis enceinte.

-Oh la là mais c'est un truc de ouf, je croyais que tu pouvais pas... purée j'en reviens pas, murmura t-il ému.

Tu dois être tellement contente... c'est génial, je suis tellement content pour toi... "

Il marqua une pause et ajouta: 

-"ça fait bizarre...par rapport à ton mec"

Il s'approcha de Julianne et lui caressa le visage. Elle eut spontanément un mouvement de recul parce qu'ils étaient en pleine rue. Elle n'en revenait pas de sa réaction Il était heureux pour elle, parce qu'il tenait à elle. Il ne pensait pas à lui, ni à eux, il ne pensait qu'à elle, et à son rêve. Elle eut envie de pleurer. 

"-Ecoute Guillaume, il faut que je t'...

-...non mais t'inquiète j'ai compris, j'suis pas un blaireau, tu veux rester avec ton mec... tu veux élever votre gamin ensemble. Ça change tes plans. C'est bon y'a rien à dire. 

Ben, au revoir... tu... 

Bref, bon courage, à plus".

Il tourna les talons et Julianne le regarda partir. 

Elle sentait qu'elle garderait cette image en tête longtemps, qu'elle n'oublierait pas, qu'elle n'oublierait jamais à quel point il fut merveilleux de générosité et d'amour.


Julianne se fit arrêter au bout de 2 mois de grossesse. Elle expliqua à son médecin dans quelles conditions elle travaillait et l'incidence que ça avait sur elle. Elle insista sur les difficultés qu'elle avait eu à tomber enceinte, elle parla même de ses "problèmes de couple" comme elle appelait la violence de son conjoint.

Elle passait ses journées à la maison à se préparer à son futur rôle de mère. Elle se concentrait sur ses sensations, elle aimait se sentir enceinte. Le fait qu'elle devenait la parfait ménagère plaisait beaucoup à Raphaël, il aimait qu'elle reste chez eux. Qu'elle soit sous son contrôle toute la journée.

 Il appelait systématiquement sur leur téléphone fixe et jouissait du fait qu'elle réponde à chaque fois. Il ne se préoccupait pas de la grossesse, c'était son domaine comme il aimait le dire. Il passait beaucoup de temps en revanche à chercher une explication à la grossesse. Il se fichait éperdument de son déroulement, des besoins à venir, de la chambre à peindre, du prénom à choisir...

Ce qu'il voulait comprendre, c'est comment après des mois d'échec, elle avait pu tomber enceinte tout à coup, sans que rien de ce qu'ils faisaient avant n'ait changé. Il écuma beaucoup d'explications plausibles mais une l'obsédait. Une pensée ne parvenait pas à sortir de sa tête, et si l'enfant n'était pas de lui? Et si Julianne l'avait trompé? Et si c'est lui qui était stérile?

Il tentait de se raisonner car il se souvenait de la crise qui avait eu lieu et des conséquences qu'elle avait eu. Il ne voulait pas avoir à recommencer. Il décida donc de tente de se rassurer, méthodiquement. Il profita de chaque instant d'absence de Julianne, lorsqu'elle sortait pour les courses, lorsqu'elle allait sous la douche ou faire une prise de sang pour fouiller chaque centimètre carré de ses affaires. Les tiroirs, les armoires, la table de nuit, les valises, les livres, les cahiers, les cartons, tout, absolument tout.

Guillaume avait décidé de parler à Léa, sans lui dire ce qu'il s'était passé mais il lui parla d'une femme plus âgée, une femme d'une douceur exceptionnelle, d'une beauté discrète qui avait chamboulé sa vie. Léa fit comme à son habitude, la bonne copine, elle écouta, soulagée en un sens que l'autre lui ait brisé le coeur. Guillaume ne lui dit jamais en ces mots, jamais il n'accusa Julianne de quoique ce soit, il dit que la différence d'âge et de projet de vie rendait impossible leur relation. Il ne parvenait plus à se détacher de ce qu'il avait vécu. Il avait envie de se rendre chez elle, de l'observer entrer et sortir mais il la respectait trop pour lui imposer cela. Il lui en voulait de ne pas avoir tenté de sauvegarder au moins leur amitié, non pas qu'il trouvait que la relation quasi platonique qu'ils avaient ait pu être un danger quelconque pour Raphaël, mais il pouvait comprendre qu'elle ait eu peur que cela ne dévie. Il comprenait tout mais il souffrait. Il s'isolait beaucoup et parlait pendant des heures à Léa des moindres émotions qu'il avait pu ressentir à chaque étape de leur relation. Il tût le fait qu'ils n'avaient jamais eu de rapport sexuel car il était persuadé que son amie ne pourrait pas comprendre, surtout le connaissant.


Raphaël était persuadé qu'il avait loupé quelque chose. Ses semaines de fouille l'avaient rassuré dans son idée. Il était certain que Julianne l'avait trompé dans le but d'avoir cet enfant, il lui restait juste à trouver la preuve. 

Il fouillait méthodiquement ses manteaux pendant qu'elle prenait son bain lorsqu'il vit son sac à main par terre. Il l'ouvrit calmement et étala par terre tout ce qu'il contenait. Il prit ensuite chaque objet et le retourna sous toute les coutures. Lorsqu'il tomba sur un paquet de mouchoir élimé, il fut surpris du bruit métallique qu'il fit lorsqu'il le posa sur le sol. Les yeux écarquillés, les mains tremblantes et le coeur prêt à rompre, il vit la clé, cachée à l'intérieur.


Madame.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant