Chapitre VII

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Je fus tirée de mon sommeil par un bruit sourd dans le couloir. Rapidement, je me lève et vient placer mon oreille contre la porte dans l'espoir d'entendre quelque chose. L'ennui nous fait parfois faire de bien étranges choses : nous en venons par sa faute à tenter de chaparder tel des vautours quelques bribes d'informations sur n'importe quel sujet.

Je n'arrivais pas à entendre distinctement les voix, seul les cris désespérés d'une femme parvinrent à mes oreilles. Les pas des infirmières retentissent sur le sol. Sa voix s'éloigne, elle se fait de plus en plus lointaine. Une porte claque et je ne l'entendis plus.

Déçue, je partie m'asseoir contre le mur du fond de ma cellule.

Tandis que je rêvassais au corps sans vie de Peter, une infirmière ouvrit brutalement la porte et me hurla de me lever.  Comment avais-je pu l'oublier, c'était l'heure de ma sortie quotidienne. J'allais revoir Katia.

Bien qu'elle m'empoigne fermement, je la suivit sans faire d'histoire, cela devenait une habitude pour moi.

Arrivée dans la pièce vitrée qui nous servait de parloir, j'aperçoit une femme à la longue chevelure blonde assise sur le même fauteuil, tournée vers l'extérieur. Mes pas me portent instinctivement vers elle.

- J'aimerai sortir, j'ai une vengeance à prendre, me dit-elle.

Elle tourne son visage vers moi et poursuit :

- Tu n'as pas de vengeance à assouvir ? Personne dont tu veuilles te débarrasser ?

Après une seconde de réflexion, je répondis :

- Ma mère. Elle m'a marié quand je ne le voulais pas, elle n'a pas bougé le petit doigt quand on lui a appris que j'allais être enfermée ici, elle ne m'a jamais aimé. Si je pouvais sortir d'ici, je me vengerai de tout ce qu'elle m'a fait.

Je serrai les poings sur ma chemise. Katia sourit. Elle se met de nouveau à regarder le paisible jardin auquel nous n'avons pas accès et me réponds :

- Nous pourrions sortir d'ici si nous le voulions.

- Je croyais que personne n'avait jamais réussi à le faire, dis-je. N'est-il pas impossible de sortir de cette île ?

- En théorie, c'est impossible.

- Mais alors...

- Tu ne t'arrêtes donc jamais de poser des questions ? me coupa-t-elle.

Je me renfrognais immédiatement. A ma grande surprise, pas une once de colère ne me gagna. Le plus souvent, quand une personne osait me parler sur ce ton, jamais je ne me laissais faire, invariablement l'ire me montait au nez et j'étais parfois capable du pire. Mon subit silence ne sembla pourtant pas surprendre Katia qui poursuivit calmement :

- Depuis que je suis ici, je sais que je suis condamnée. J'ai entendu les médecins parler, ils pensent bientôt me conduire dans la salle.

Mon intérêt fut alors piqué au vif : parlait-elle de la salle qu'avait une fois mentionné Gigi ? Savait-elle ce qu'on y faisait ? Ce qu'elle contenait ?

- Je dois sortir d'ici si je ne veux pas passer trépasser, continua-t-elle.

- Sais-tu ce qu'on fait dans cette salle? me décidais-je à demander.

Elle haussa les sourcils d'étonnement.

- Tu ne le sais donc pas ? demanda-t-elle. Après tout, tu es nouvelle ici, je ne peux pas t'en blâmer. On t'as sûrement raconté que personne ne revient de cette salle. C'est en partie vrai. Tu as aussi remarqué, si tu possèdes un minimum d'esprit, qu'on se moque éperdument de notre sort ici. Ce qui peux nous arriver n'a donc aucune importance. Avant d'être internée, je travaillais dans un hôpital de ce genre, j'étais infirmière, je préparais des traitements pour les patients. Je sais parfaitement ce qu'on leur fait.

L'île du Silenceحيث تعيش القصص. اكتشف الآن