Chapitre neuf

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Le noir embrasse la pièce. Pour la première fois que je suis ici, j'ai éteint cette petite lampe qui donnait vie à cet endroit, pour me laisser engloutir par la pénombre. Je ne veux plus voir Nate, mais je suis bien obligée.

Quatre jours, quatre longs jours qu'il me retient.

J'allume l'éclairage et la douce lumière me rassure instantanément. Je repense à notre dispute d'hier soir. Je ne dois pas regretter.

Surtout pas, il doit comprendre que je ne veux pas rester ici. Aujourd'hui, je vais enfin revoir la lumière du jour. Dieu merci. Mais qu'est-ce qu'il se passera si j'essaye de m'enfuir ? Ou si quelqu'un me reconnaît ? Ils vont me tirer une balle ? Je ne sais pas et j'ai peur. J'appréhende beaucoup le comportement de Nate aujourd'hui. Sera-t-il à fleur de peau à cause d'hier soir ? Ou bien sera-t-il calme, car il sait ce qu'il fait ?

Il est un peu plus de huit heures quand je décide de me lever. Mes pieds traînent lamentablement sur le carrelage beaucoup trop froid pour ma peau. Mais je m'en fiche au point où j'en suis. Je n'ai pas faim donc je file donc sous la douche et j'entends vaguement des voix dans le salon, je n'y prête pas plus d'attention. Ça doit être les autres.

De gros coups sont portés à la porte alors que je me sèche les cheveux déjà habillée. Je sais que c'est Nate, car il ne fait que m'appeler depuis tout à l'heure et j'ai horreur qu'on me demande d'aller plus vite dans ce que je fais, ça me donne encore plus envie d'aller doucement, ce que je fais donc.

Quand j'ai fini, j'ouvre la porte mais le poing de Nate qui était destiné à celle-ci atterrit sur mon visage. Bordel, mais quel connard ! Je ne sais pas ce qui me fait le plus de mal, son coup ou bien le regard qu'il m'a jeté quand j'ai apporté mes mains à mon visage. Son regard est vide et ne porte même pas une once de culpabilité. Il a de grands cernes sous les yeux ce qui me montre qu'il n'a pas dormis d'une seule seconde cette nuit. Nom de dieu que j'ai mal, il ne m'a pas raté. J'ai besoin de glace avant que le bleu ne se forme. Mais lui, il reste là comme ça à me regarder comme si j'étais un monstre. Je me mets à courir vers la cuisine et je sors du congélateur un sachet de petits poids que je mets rapidement sur ma pommette gauche.

-Bouge-toi. On ne va pas t'attendre pendant dix ans. Sa voix se fait entendre de là où je suis, toujours aussi froide.

Je décide de ne pas lui répondre, plus je l'ignorerais, mieux ce sera. Je suis toujours dans la cuisine appuyée au comptoir, j'ai extrêmement mal et en plus de ça, il m'énerve. L'irritable envie de lui en coller une me démange. J'entends des bruits de pas qui se dirigent vers la cuisine. Je reconnais immédiatement le visage d'un des deux, le plus costaud. Qu'est-ce qu'il me veut ? Il rentre rapidement la mâchoire fermement crispée. Je n'ai le temps de réagir qu'il m'attrape les cheveux pour me jeter à terre.
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Et c'est à ce moment que mon calvaire débute.

****

Les larmes coulent silencieusement sur mon visage. Je ne sais pas où est Nate et je ne pense pas qu'il ait été mis au courant de ce qu'un de ses « amis » m'a fait.

Je n'ose plus parler depuis. Je suis traumatisée. Je dois ressembler à une morte-vivante à cause de tous les coups qui ont été portés à mon pauvre visage. Je n'arrête pas de pleurer en me demandant ce que j'ai bien pu faire au bon dieu pour mériter tout ce qui m'arrive. Je suis dans une voiture avec les deux. Je vais les appeler comme ça, car je n'en n'ai rien à foutre de leurs prénoms. Les vitres sont teintées et les portes et fenêtres verrouillées. Aucune issue. Je suis condamnée à rester avec eux. La chemise de Nate que je porte est à moitié déchirée. On dirait une traînée. On roule depuis un bon bout de temps, je dirais même quelques heures avant que la voiture ne s'arrête enfin.

Dans ma tête, je me rassure en me disant que, même si je suis en très mauvais termes avec Nate en ce moment, il sera là pour me réconforter si je ne vais pas bien. Je le sais et il le sait aussi. Il essaye de faire l'homme qui prend tout en main, mais il en est incapable et en temps normal, il serait la dernière personne que je voudrais voir, mais après ce que je viens de subir, il est bizarrement la première personne avec qui j'ai envie de me réfugier. Je suis épuisée mentalement et physiquement vu le peu de temps que j'ai dormi cette nuit et vu tout ce qui m'arrive. Je n'en peux vraiment plus, je sature complètement. J'ai peur de ce qu'il va se passer. Qu'est-ce que je vais devoir faire, qu'est-ce que je vais devenir.

Tu as surtout peur que Nate se fasse prendre et que tu ne le revoies plus.

-Tu restes ici, tu ne bouges pas et tu peux autant crier, on ne t'entendra pas de dehors la voiture est très bien isolée. On te laisse la radio histoire que tu ne t'ennuies pas trop. Ne fais pas de conneries. Déjà qu'on ne sait même pas pourquoi Nate t'a gardé au lieu de te buter, évite de trop te faire remarquer.

Je ne réponds pas et ils sortent de la voiture en n'oubliant pas de tout verrouiller. Je me demande s'ils vont lui dire ce que le grand m'a fait. Ça m'étonnerait. J'ai mal partout. Et il n'a pas honte ? Les heures passent sans signe de vie.

Ils ne doivent pas être seuls sur ce coup-là. Je ne sais même pas où l'on est. Pourquoi Nate m'a dit qu'il aurait besoin de moi alors que je suis enfermée dans une voiture souffrante du sort qui s'affale sur moi.

Il est déjà 15 : 20 et j'ai passé la moitié de la journée enfermée. Le seul point positif, c'est que je m'occupe à regarder les gens qui eux ne peuvent pas me voir. Et je peux enfin voir la lumière du jour. Pas comme je l'aurais voulue, mais je peux quand même.

Je vis les deux courir vers la voiture et y rentrer rapidement avant de démarrer en trombe. Je me relève correctement et j'attache ma ceinture. Je tiens en minimum à ma vie, on ne sait jamais avec ces deux abrutis.

-Où est Nate ? Je demande, prise d'une forte inquiétude.

Le grand se tourne vers moi, le regard dur, comme tout à l'heure...

-Il a sa voiture, il nous rejoindra chez lui.

Et sur ce, il se tourne me faisant comprendre qu'il faut que je ferme ma gueule jusqu'à l'arrivée. Il est 20 : 05 quand on rentre enfin. Je suis crevée et j'ai extrêmement faim. Nate habite dans le sous-sol d'une barre pourrie, où traînent des dealers et tout autres cas comme ceux-là. Au moins, je comprends mieux pourquoi il n'y a pas de fenêtres chez lui. Les deux me laissent seule devant sa porte et ils repartent bredouille après avoir vérifié que je rentre bien. Dès que je met les pieds dans ''l'appartement'' je me rue vers la cuisine dans l'intention de manger une tonne de nourriture, mais je suis ralentie par Nate dans mon élan.

Oh non pas lui, pas maintenant.

Il pose ses mains sur mes épaules les sourcils froncés tandis que je baisse honteusement la tête.

-C'est quoi ces marques sur ton visage ? Sa voix devient tout d'un coup dure et autoritaire.

Je ne réponds pas et il se pousse en arrière pour regarder mon état général.

-Bordel Anna, qu'est-ce qui t'es arrivée ?! Il cri désormais, me faisant susauter et trembler.

Il s'en rend rapidement compte et il me prend fermement dans ses bras si rassurants. Je craque, je lâche toutes les larmes que mon corps peut encore donner.

-Anna, dis-moi...je t'en supplie dis-moi ce qui t'est arrivé. Raconte-moi pourquoi tu es si triste. Dis-moi, est-ce que c'est moi ? Nom de Dieu, j'espère que non, je suis déso...

-Non, non ce n'est pas toi Nate, je le coupe pour qu'il ne culpabilise pas, j'étais à la cuisine quand un de tes amis m'a attraper pour me traîner à terre... Je souffle tout ceci en sanglotant.

Et je me remet à pleurer de plus belle. Je suis devenue si fragile, moi qui contrôlais toujours mes envies, là, je ne peux plus, tout simplement.

-Qu'est-ce qu'il t'a fait ? Sa voix est terrifiante mais rassurante à mon égard.

Je lève mes yeux trempés de larmes vers lui.

-Il m'a frappé, plusieurs fois, avant d'abuser de moi.

Et c'est repartit. Je me blottis tellement fort dans ses bras. Je ne veux plus le lâcher et je sens ses muscles se contracter sur mon corps si fragile, peut-être sous l'effet de la colère, mais il me fait mal.

-Tu...tu me fais mal Nate... Je gémie de douleur, en espérant qu'il m'entende.

Il dessert sa poigne avant de se reculer et de me prendre le visage entre ses mains. Il essuie mes joues à l'aide de ses grands pouces et il me regarde comme s'il me promettait quelque chose seulement par le regard.

-Il ne te touchera plus jamais, je te le jure.

Et sur ces mots, il pose ses lèvres sur les miennes une énième fois.

Innocence -TomeI-Kde žijí příběhy. Začni objevovat