Chapitre 8 - Partie 1

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Chacun resta plusieurs minutes à contempler le feu en silence, Océane sur la couchette, les genoux repliés sous son menton et William sur une chaise, les bras croisés sur la poitrine. Océane, rompant l'inertie, passa la main à sa gorge que Sila avait malmenée et grimaça. William, sortant de sa torpeur, se redressa et s'approcha d'elle.

— Fais-moi voir, demanda-t-il d'une voix douce.

Il s'assit à côté de la jeune femme qui retira la main de son cou, dévoilant des marques violacées. Le seigneur ne dit rien mais il songea que, finalement, Sila avait mérité son sort. Du bout des doigts, il effleura une des zébrures et sentit Océane se contracter. William ne sut si c'était de douleur ou en souvenir du geste du maitre des domestiques. Il retira sa main par prudence ne souhaitant pas la traumatiser plus qu'elle ne l'était déjà.

— D'ici quelques jours il n'y aura plus rien, déclara-t-il pour rompre le silence qui commençait à peser.

— Je sais, répondit Océane laconique.

— Tu devrais mettre de l'onguent dessus, ça disparaitra plus vite.

— Vous avez raison, acquiesça-t-elle en se secouant la tête. Mais avant vous allez me faire voir vos côtes ! Je dois vérifier si le voyage ne les a pas fragilisées.

— Elles vont bien, annonça William soulagé de revoir les habitudes de sa servante revenir.

— Permettez-moi d'en douter. Hier encore l'une d'entre elles vous faisait souffrir.

— Peut-être qu'hier je te mentais et que je n'avais plus mal, badina le jeune homme.

— En quel honneur ? Montrez-moi vos côtes !

— Des fois je me demande qui donne les ordres, maugréa-t-il pour lui-même.

Pendant que William se déshabillait, Océane alla récupérer son embrocation dans son sac. Une fois que le seigneur fut torse nu, elle s'approcha et lui palpa les côtes. William se retint de grimacer de justesse lorsqu'Océane appuya sur celle qui n'était pas tout à fait remise encore.

— Ça ira. De toute façon vous devrez faire avec, mais je ne pense pas que le voyage empirera votre état. Par précaution je resserrai la bande tout à l'heure. Pour le moment je vais les laisser libre.

— Très bien, fit William en remettant sa tunique.

Le feu avait un peu réchauffé la cabane, embuant les carreaux de la petite fenêtre, mais il faisait encore froid. Océane commençait à grelotter.

— Maintenant fais-moi voir ce cou, continua-t-il une fois rhabillé.

— Ce n'est pas la peine, s'écarta Océane gênée.

— Laisse-moi prendre soin de toi à mon tour, insista-t-il doucement.

— Vous l'avez déjà fait, répliqua-t-elle sans oser la regarder.

— Je t'ai impliqué dans cette histoire et c'est ma façon de me racheter, tenta-t-il pour expliquer son sentiment de culpabilité.

— Vous n'avez rien fait sans que je le veuille, s'emporta Océane. J'ai choisi de vous accompagner. Je connais les risques et les implications qui en découlent, continua-t-elle avec fougue. Vous ne m'avez forcée en aucune façon, ce choix est ma décision.

— Dans ce cas assieds-toi et laisse-moi faire. C'est mon choix... et mon ordre. Alors assise !

Océane obtempéra cette fois-ci sans broncher. Pendant qu'il lui passait de l'onguent, elle réfléchissait à ce qu'elle venait de dire. Suivre William était en effet son choix mais elle n'avait pas dévoilé les raisons. Elle-même ne se l'avouait qu'à l'instant même. Elle n'était complètement en phase avec elle-même que depuis que le jeune Seigneur était entré dans sa vie. Elle sentait que son destin était de l'accompagner. Une autre vérité l'assaillait compressant sa poitrine, elle était tombée amoureuse de son maitre. Elle l'aimait tellement fort que l'idée en devenait douloureuse et des larmes naquirent dans ses yeux. William le remarqua et se méprit quant à leur origine.

— Je te fais mal ? questionna-t-il inquiet.

— Non pas du tout, pardonnez-moi, riposta-t-elle en essuyant ses larmes d'un geste rageur.

William ne répondit rien, préférant la laisser à ses pensées et ne pas la brusquer. Il continua à passer l'onguent sur la gorge de la jeune femme.

— Tu devrais te reposer à présent. Dors un peu.

— Ça va aller, je n'ai pas sommeil.

— C'est faux. Je ne suis peut-être pas un soigneur mais j'ai senti ta nuque raidie, tu as les traits tendus et tu n'es pas habituée à chevaucher durant des heures. Après je comprends que tu ne veuilles pas fermer les yeux par peur des images que tu pourrais voir. Mais cette couche est sans doute l'endroit le plus confortable que nous trouverons jusqu'à Somgysaï, alors profites-en ! Arrête de lutter sans cesse contre toi-même.

— Ce n'est pas contre moi que je lutte, grommela la jeune femme vexée, provoquant un sourire affectueux chez son maître.

Elle obtempéra toutefois, attrapa la couverture que le Seigneur lui ramenait et s'enroula à l'intérieur, lui tournant le dos et malgré ce qu'elle avait déclaré, sombra dans le sommeil en quelques secondes.

— Tu n'étais pas fatiguée, hein ? fit William tendrement avant de secouer la tête.

La légende des deux royaumes [TERMINÉ]Where stories live. Discover now