Chapitre 17 : Perdons notre temps

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Trouver un pot de peinture alors que le soleil était en train de se coucher n'était pas évident et je n'aurais jamais pu le croire si je n'avais pas été confrontée à cette situation. D'un certain côté, c'était assez logique que je ne m'en sois jusqu'alors pas rendu compte.

Après cette longue – et désespérée – tournée en ville, j'étais retournée chez moi, m'attelant immédiatement à recouvrir ces immondes lettres rouges. Je n'avais jamais été très friande des lettres écarlates, en particulier quand je les voyais inscrites sur ma porte d'entrée contre mon gré.

J'avais enfilé un t-shirt qui avait vraiment beaucoup vécu, ne craignant ainsi pas de le tacher, et avais recouvert de nombreuses couches la porte. Même après en avoir étalé quelques-unes, une légère trace rouge était encore visible. Si on ne s'y attardait pas, on ne verrait – a priori – absolument rien, du moins, je l'espérais.

Lorsque j'entendis quelques pas s'approchant lentement de moi, je me figeai et resserrai mon emprise sur le pinceau, prête à le brandir sur cet inconnu. Était-ce la personne qui avait dégradé ma porte ? Reviendrait-elle sur les lieux du crime ? Immobile, je guettai chacun de ses pas pour me retourner une fois le moment opportun venu. J'entendis un souffle, rapide et coupé. Brusquement, je me défendis, brandissant mon pinceau pour seule arme, mais fus arrêtée en cours de route par une main saisissant mon poignet.

Et voilà que je me sentais stupide désormais... Ce n'était que Stan. Aussitôt, je relâchai mon bras tout en soupirant de soulagement.

— Qu'est-ce qu'il se passe ? s'enquit-il, inquiet. Tu as l'air à cran...

— C'est juste que... juste la pression des derniers jours, prétendis-je.

Je n'avais aucunement envie de parler de mes quelques problèmes. Il ne les comprendrait sûrement pas et je passerais probablement pour une parano. Ensuite, je n'avais pas envie de gâcher sa présence.

— Hum... Qu'est-ce que tu fais là à cette heure-là ? demandai-je, assez curieuse.

— J'avais envie de te voir, affirma-t-il, tout sourire. Et pourquoi tu faisais de la peinture à cette heure-là ?

— Je devais faire ça depuis un bon bout de temps... et je n'ai trouvé que ce moment à cause des cours.

Et un second mensonge. C'était vraiment lamentable... Mais tant que je n'en saurais pas plus, je ne devais pas lui en parler sans avoir à passer pour une abrutie.

— Tu te surmènes beaucoup trop, constata-t-il.

Il n'avait pas idée à quel point... Enfin, il n'en saurait jamais rien. Nous n'avions pas les mêmes vies même si nous avions les mêmes origines d'une certaine manière.

— Et sinon... Tu veux entrer ? proposai-je avec hésitation.

Il opina de la tête et me suivit à l'intérieur. Rapidement, j'avais emprunté un t-shirt bien plus confortable puis nous nous étions installés dans le canapé du salon, discutant autour d'un verre.

— Tu as l'air vraiment ailleurs, me fit-il remarquer tandis que je buvais une gorgée.

Mes mains resserrèrent mon verre. Je ne pouvais pas lui dire la vérité, mais je ne pourrais pas me cacher bien longtemps. Mon seul moyen fut alors de détourner l'évidence, ce qui était loin d'être gagné...

— En fait... Je me suis disputée avec une amie. On se connaissait depuis des années... et du jour au lendemain, elle m'adresse à peine la parole et balance de nombreuses atrocités.

Il m'écoutait attentivement, n'osant pas faire le moindre commentaire.

— Elle a osé insinuer que je me foutais de sa gueule... que je n'étais qu'une traîtresse... Je ne la pensais pas capable de telles accusations...

Les Lâches vautoursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant