Un divin dimanche

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Le dimanche avait toujours été un jour particulier. Même chez les Dieux. Car même si ces derniers ne pouvaient pas mettre de côté leurs tâches quotidiennes – il en valait du bon fonctionnement du monde entier -, ils pouvaient tout de même, ce jour-là, se permettre quelques écarts. Ainsi, le dimanche, les divinités faisaient souvent des choses qu'ils ne pouvaient faire en semaine. C'était en effet le cas de bon nombre d'entre eux, ainsi que celui du Seigneur des Cieux, Zeus, cependant trop fier pour l'avouer aux autres :

« Moi, le dimanche, clamait-il à tous ceux qui le lui demandait, je ne fais pas plus et pas moins que ce que je fais durant la semaine. Je m'astreins à mes responsabilités, je n'ai guère le temps de faire autre chose. »

Il était vrai qu'entre les nombreux orages de prévu, le conseil du soir, l'éternel et épuisant repas dominical ainsi que les autres responsabilités divines, l'emploi du temps du roi des Dieux était déjà bien rempli. Aussi, toute personne ayant conscience de cela ne pouvait douter de sa version des faits. Même ses frères et sœurs se laissaient facilement berner. Cependant, le Seigneur des Cieux n'avait jamais été un très bon menteur. Certes, il s'était entraîné à ne plus rougir ainsi qu'à garder la tête haute et le regard ancré dans ceux de ses camarades lorsqu'il sortait un mensonge, mais le roi des Dieux ne pouvait décemment pas empêcher ses pupilles de se dilater. Il n'en avait pas le moyen, cette partie du corps ne pouvant lui obéir aux doigts et à l'œil (NDLA : notez le jeu de mot tout à fait pourri que vous ne trouverez sûrement pas, tellement il est pourri). Et cela, Hermès l'avait très bien compris. Ce dernier ne savait plus exactement à quel moment il avait découvert que son père cachait quelque chose. Cette découverte pouvait dater d'une semaine comme de quelques centaines d'années. Il se souvenait juste avoir, un jour, croisé le regard de Zeus au moment où celui-ci leur mentait volontairement sur ses occupations dominicales et ainsi avoir observé la transformation des pupilles. Le Dieu des Voyageurs, également Dieu des Menteurs, avait alors immédiatement compris la cause de ce changement et avait continué à examiner avec attention - et avec le plus grand des intérêts - les nombreux faits et gestes de son père, jusqu'à tomber des nues, et complètement hilare, un dimanche matin, jour où il découvrit le talent insoupçonné et très bien caché de celui que l'on surnommait le Roi des Dieux.


Flash-back

un dimanche matin,

heure et date inconnues,

au Mont Olympe,

600ème étage de l'Empire State Building.

Zeus ne pouvait s'empêcher d'esquisser un sourire radieux alors qu'il prenait la direction de la salle des Trônes. Pour la troisième fois en un mois, il avait réussi à échapper à la vigilance d'Héra et il en était plus que ravi ! Les repas de familles n'avaient jamais été son truc. Ces petits événements répétitifs et barbants ne servaient souvent pas à grand choses et le Dieu avait tellement plus intéressant à faire ! Après tout, il voyait ses enfants tous les jours de la semaine alors pourquoi devrait-il les supporter le dimanche, sachant que leur compagnie n'était pas pour le moins du monde reposante ?

Avec un soupir de contentement et frissonnant d'excitation à la simple pensée de ce qu'il s'apprêtait à faire, Zeus saisit la poignée en marbre blanc et ouvrit la porte, n'oubliant cependant pas de jeter un coup d'œil derrière lui, comme pour s'assurer que personne ne le suivait. Auquel cas il devrait alors inventer une excuse bidon, peut-être même inventer une modification à faire sur son trône pour justifier sa présence.

Mais qu'en serait-il si c'était Héphaïstos qui débarquait ? Mieux valait ne pas y penser.

La voie libre, le Seigneur des Cieux pénétra alors dans la salle, vérifiant par la même occasion que personne ne s'y trouvait.

« Il y a quelqu'un ? », demanda-t-il à plusieurs reprises alors qu'il faisait lentement le tour de la salle, passant la tête derrière les trônes.

Face à l'absence de réponse, son sourire s'agrandit. D'un pas précipité, il se dirigea vers le centre de la pièce et claqua des doigts. Aussitôt la salle se transforma.

Les trônes disparurent, dégageant ainsi de l'espace supplémentaire. La clarté diminua subitement, laissant la place à une étrange lumière bleue marine et un projecteur s'alluma, projetant une lumière d'un blanc froid vers le plafond. Mais le plus surprenant, fut l'apparition, dans des volutes de fumées légères et parfumées, d'un superbe violon moderne et étincelant. A sa vue, les yeux de Zeus brillèrent d'un éclat nouveau et enfantin, comme ceux d'un gamin de cinq ans découvrant ses cadeaux le jour de Noël. Un air radieux sur le visage, le Dieu afficha un sourire ravi avant de s'élancer au milieu de la salle et de claquer des doigts. Aussitôt, et comme animé par une main invisible, le violon commença à jouer et Zeus, plein d'entrain, entreprit de répéter les quelques pas de danse qu'il s'efforçait à apprendre depuis plus de deux semaines. Depuis qu'il s'était mis en tête de battre Hadès à la compétition du mois d'Octobre.

Sauts, pas chassés, rondes, pliés, adages, pirouettes ... Le Seigneur du Ciel les maîtrisait un peu plus chaque semaine et il pouvait en être fier ! Cela ne faisait que quelques semaines qu'il pratiquait, cependant, il se pensait déjà être un adversaire redoutable ... Hadès allait voir ce qu'il allait voir !

C'est ainsi que, pendant plusieurs heures, Zeus répéta inlassablement les mêmes mouvements, encore et encore, juste pour le plaisir et la volonté de se perfectionner. La simple pensée qu'il allait certainement surpasser son frère suffisait à le mettre en joie. Zeus était né pour être le meilleur, il l'était, sa mère le lui ayant longuement répété durant son enfance. Ce n'était donc pas son grand-frère, ce stupide être qui avait été dévoré par leur détestable paternel qui allait lui faire de l'ombre. Zeus devait assurer dans tous les domaines. Même les plus improbables. Il se devait d'être le plus fort. Et il le serait.

Et cette simple pensée le rendait heureux.

Ce qui rendait Hermès heureux, par contre, c'était d'avoir enfin un dossier sur son père et d'avoir l'honneur et le devoir de le partager. C'était une tradition ancienne à l'Olympe, que de se moquer des proches en famille !

Et si j'avais un conseil à te donner Zeus, ce serait celui-ci : n'oublie jamais de regarder le plafond quand tu entres dans une pièce. Des personnes avec des chaussures volantes pourraient s'y cacher !


Recueil d'OS Percy JacksonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant