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Party |10|

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Je dépoussière l'étagère du prince, le cœur lourd. Les mots du médecin ne quittent pas mon esprit. Son état s'aggrave et on ne peut rien y faire. L'argent ne peut rien y faire. Je ne peux rien y faire. Toutes ces pensées négatives me rendent morose, même Zaria et Lina l'ont remarqué. Elles m'ont dit que depuis que j'étais rentrée de mon congé, je ne souriais plus. Que d'habitude, quand je rentre, je leur redonne le sourire, alors pourquoi râler autant ?

Je comprends qu'elles pensent ça, j'aurais dû revenir pleine d'énergie et motivée. Mais ce n'est pas le cas. Je n'ai même pas la force de prétendre que tout va bien alors je me mets au travail à fond, comme à chaque fois que je vais mal. Ça doit bien être la troisième fois que je dépoussière cette étagère.

La chambre est déjà étincelante, mais je n'arrête pas de nettoyer sans arrêt cette pièce, je n'ai pas envie de descendre sinon je vais devoir côtoyer d'autres personnes et afficher un faux sourire. Au moins ici personne ne me pose de question, je suis seule. Enfin, presque. Il y a l'héritier qui travaille à son bureau, mais c'est tout comme si j'étais seule, vu qu'il ne me calcule pas.

Je remets les livres à leur place un à un en veillant bien à les essuyer eux aussi. Je lis leurs reliures ; Ulysse, Hercule, Percée. Il y a aussi Icare, de la même édition que mon propre livre traitant de la même histoire.

Je regarde la chambre de haut en bas, de gauche à droite à la recherche de ce que je pourrais faire de plus. J'ai déjà nettoyé la salle de bain de fond en comble deux fois. J'ai astiqué tous les meubles trois fois. J'ai passé la serpillère deux fois. J'ai nettoyé chaque lustre trois fois et enlevé les poussières du plafond quatre fois.

Qu'est-ce que je peux faire de plus ? Tout est scintillant... Mon regard se pose alors sur le prince. Il a l'air d'être plongé dans son travail. Comme à son habitude, c'est-a-dire tout le temps, il a les sourcils froncés. Il lit un dossier qui doit bien faire six cents ou sept centspages. À sa place, j'aurais mal aux yeux au bout de la centième page, au plus.

Il soupire en tournant une page pour la énième fois, et passe sa main dans ses cheveux. Il porte un T-shirt bleu clair et un jogging noir. Si je le pouvais, je le regarderais travailler sans fin et sans jamais en être rassasiée.

Merde. Mais qu'est-ce que je raconte encore ? Reprends-toi, Aurore !

Il tourne encore une page, se frotte les yeux puis se tient la tête entre les mains. J'en déduis qu'il doit avoir mal à la tête. Je n'ai plus rien à faire, autant m'occuper de lui maintenant, le souvenir de ma mère ne me quittant toujours pas. Je m'approche en veillant à faire du bruit pour ne pas le surprendre et lui demande gaiement :

- Vous avez mal à la tête ? Si vous voulez, je peux vous ramener de l'aspirine et un verre d'eau.

Il me répond sans lever la tête.

- Faites ce que vous voulez.

Quel grincheux. Il a trop de fierté pour accepter mon offre... Je ne me décourage pas et m'empresse quand même de lui amener de l'eau et de l'aspirine.

- Voilà, dis-je en posant le plateau devant lui.

Il me jette un rapide coup d'œil et pose la pilule dans sa bouche avant de porter le verre à ses lèvres. Sa pomme d'Adam fait le yoyo pendant qu'il boit jusqu'à la dernière goutte. Merde. Comment fait-il pour rendre ce simple geste, banal et quotidien, sensuel ?

- Le cachet fera effet dans quelques minutes, lui dis-je comme s'il ne le savait pas.

Je repense soudainement à ma mère et à toutes les pilules énormes qu'elle ingurgite je ne sais combien de fois par jour. Mon cœur se serre et quelques larmes tentent de se frayer un passage jusqu'à mes yeux, mais je les retiens. Je me mordille la lèvre, préférant me concentrer sur la douleur physique que morale.

Au-delà des limites Où les histoires vivent. Découvrez maintenant