Rapprochement |8|

Depuis le début
                                    

Le prince arrête de mâcher et me regarde presque... surpris ?

— Vous avez remarqué que je ne mangeais pas ?

Je hoche la tête sans vraiment comprendre son étonnement. C'est mon rôle en tant que servante.

— En passant la plupart de mon temps à vous accompagner, je remarque des petites choses. Vous oubliez ma présence, mais ce n'est pas pour autant que je ne suis pas là.

Il me regarde encore quelques secondes, avec une expression que je ne saurais qualifier sur le visage. Enfin, il avale la dernière bouchée de chocolat. Je pensais qu'il allait s'en aller, mais il me tend la main :

— Vous en avez un autre comme ça ?

Il a l'air d'aller mieux. Dans ses yeux luit une lueur de malice. Je souris aussi et fourre ma main dans mon tablier.

— Oui, bien sûr.

Il fourre la barre chocolatée dans sa poche et s'en va. Pendant une fraction de seconde, j'ai l'impression qu'il veut me dire quelque chose, mais il se ravise et ferme un bouton de sa veste. Le prince est déjà loin quand je lance à son attention :

— Si vous avez besoin de moi, il suffit de demander !

Contre toute attente, le prince semble m'entendre malgré la distance. Il s'arrête, se retourne, m'électrocute de son regard océan et s'en va comme si de rien n'était, l'ombre d'un sourire sur le visage. Une vague puissante de frissons et une douce chaleur envahissent mon corps tout entier.

Merde.

***

Zaria, Lina, Azélie, quelques autres servantes et moi attendons de voir apparaître les visages du roi et du prince à la télé. En effet, le roi va rendre le retour de son fils en Manésie officiel.

Quelques publicités défilent et enfin le drapeau de notre pays s'affiche sur l'écran, indiquant le début de la conférence de presse. Le présentateur fait une petite introduction, et enfin nous voyons le roi et son fils, assis à une table dorée, sûrement en or, recevoir une horde de flashs d'appareils photos des journalistes. Le prince fait preuve d'un calme exemplaire. Moi qui déteste être au centre de l'attention, je serai tombée dans les pommes dès le premier flash.

Les journalistes arrêtent de prendre des photos, s'asseyent et certains se munissent de leur caméra. Le roi raconte que son fils est revenu d'Amérique après de longues études qui porteront leursfruits quand il deviendra roi. L'héritierécoute tout ce qu'on raconte àson propos sans broncher. Son avenir est déjà tout tracé. Il n'a pas son mot à dire.

Le discours du souverain prend fin et une foire aux questions débute. Les journalistes lèvent la main un à un pour poser des questions, et Sa Majesté y répond avec éloquence et grâce. Cependant, une question se démarque des autres et semble agacer le dirigeant :

— Bonjour, Votre Majesté. Tout le monde sait qu'il y a des tensions entre la noblesse et le peuple. Ce n'est pas un secret. Plusieurs manifestations du peuple dénoncent l'inégalité entre la noblesse et les moins fortunés, alors, ma question est la suivante : comment allez-vous atténuer ces tensions ?

Le roi se crispe, mais répond tout de même:

— Le comité et moi-même étudions encore la question. Sachez que nous trouverons assurément une solution à ce... léger problème.

Le reste de la conférence se déroule sans encombre et la réception prend le relai. Les invités arrivent un à un. Leurs vêtements coûteux les mettent tous en valeur, des robes en dentelle, des robes en soie ou encore des diamants et des rubis. Des costumes sur-mesure, des chaussures d'un cuir italien. Tout un chacun porte au moins trois mille euros sur soi, je suis prête à le parier.

Au-delà des limites Où les histoires vivent. Découvrez maintenant