Chapitre XIV

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Cette nuit au relais fut... merveilleuse. J'eus droit au meilleur massage qu'on m'ait jamais fait... et à tout un tas d'autres choses ! Et malgré toute l'agitation de ces derniers jours, je dormis comme un bébé. Baptiste faisait barrage à tous mes soucis, et me protégeait de son corps puissant...

Un soleil radieux remplissait le salon, se faufilant à travers les branches des arbres. Par la porte ouverte, je contemplais la fine poussière qui dansait dans les rayons dorés, jouant sur le cuir des canapés. Tout ça me ramenait... pas si loin que ça en arrière, somme toute. Et pourtant...

Ça me ramenait à une autre vie, quand j'étais adolescent. Quelques jours seulement s'étaient écoulés depuis que Baptiste avait fait de moi un homme, et malgré tout j'avais l'impression qu'une vie s'était écoulée depuis cette nuit-là... J'avais grandi subitement, brutalement, je m'étais métamorphosé comme un papillon : une larve terne enfermée dans une chrysalide qui d'un coup quitte ce cocon douillet, ouvre ses ailes et devient un papillon plein de vie et de couleurs. J'avais quitté le cocon douillet de l'adolescence, et j'étais désormais un homme. Un jeune adulte, certes, mais déjà presque un adulte quand même. Avec tout ce que ça pouvait impliquer comme responsabilités...

Cette histoire de pension me revint soudainement à l'esprit... Je ne voulais pas partir. Pas si loin ! Je ne voulais pas quitter mon vieux château et tous ceux qui partageaient ma vie... Mais comment convaincre Grand-Père ? En plus, avec Maman dans les pattes, et son abruti de copain, je risquais bien plus de me faire taper sur les doigts qu'en temps normal. Et ça ne plaiderait pas ma cause... Peut-être que Grand-Mère... Je ne savais plus trop...

- Romain ?!

- Hein, quoi ? Oh, t'es réveillé ?

- Oui, bébé. Et ça fait deux fois que j'essaie de te faire revenir sur terre...

- Oh, désolé...

- À quoi pensais-tu ?

- A rien... et à tout... La pension, ce crétin de Michael...

- Tu veux que je m'occupe de lui ?

Je me tournai vers lui : il avait l'air tout ce qu'il y a de plus sérieux...

- Tu rigoles ?

- Pas du tout.

- Mais qu'est-ce que tu veux faire ?

- Je ne sais pas trop... Mais il ne m'aime pas des masses, et ta grand-mère m'adore... Il y a peut-être moyen de jouer là-dessus...

Je me collai à lui et le pris dans mes bras :

- Oh, t'es trop mignon ! Mais non, ça va aller...

- Tu es sûr ?

- Oui, oui, doudou... Surtout, ne va pas te mettre dans une situation délicate, comme dirait Grand-Mère. Je gère.

- Tu gères ?

- Oui, bon, d'accord...

- Bébé... ?

- Écoute, j'essaie de gérer ma vie au mieux, entre mon homme compliqué, mon chat collant, mon amant sexy, mes grands-parents coincés, ma mère absente, son mec débile, et tout le reste. Alors il ne faut pas trop m'en vouloir si des fois les choses prennent un peu de temps... J'ai que seize ans, bordel...

- Hé, doucement... Ne t'énerve pas, bébé...

- Je ne m'énerve pas.

- Si, tu t'énerves...

- Bon... un peu...

- Tu veux en parler ?

- Pas maintenant.

Baptiste (Souvenirs, tome I)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant