Une seconde chance |4|

Depuis le début
                                    

En plus de devoir laver ces satanés rideaux, il a fallu que je nettoie la piscine ! Et dans quel état elle est ! Des feuilles recouvrent toute la surface du bassin d'eau, on dirait qu'une couverture de feuille a été posée là, ou encore que c'est un sol enseveli sous des feuilles mortes et que l'on pourrait marcher dessus sans problème. À croire que ça a été fait exprès !

- Je m'amuse comme une folle ! Je l'adore ! Il m'a montré des photos qu'il a prises quand il était en Amérique. Des photos de son école, en compagnie de ses professeurs, des paysages... Plein, plein, plein de photos ! Puis on a mangé une glace dans le jardin, et je lui ai parlé de Ricky aussi et-

Ah, ça y est. Elle a abordé le sujet « Ricky ». J'entends parler de cet ami imaginaire tous les jours que le bon Dieu fait. C'est le deuxième et dernier ami que Mona , la première amie étant moi-même. C'est un ami imaginaire qu'elle a inventé pour remplir ses jours vides. Elle lui raconte ses problèmes et ses bonheurs comme s'il était réel.

D'après elle, il est roux avec des cheveux bouclés, des taches de rousseurs et une canine lui manque, il aurait même son âge. Le fait que Mona ait parlé de Ricky à son frère montre qu'elle lui fait confiance puisqu'elle n'en parle pas facilement. La seule fois où elle a essayé d'en parler à son père pour se rapprocher de lui, il l'a remballée en lui disant que ce n'étaient que des sottises et qu'elle ferait mieux d'utiliser son imagination à des fins plus concrètes et productives.

Ricky à part, je n'arrive pas à imaginer le prince de bonne humeur. À l'imaginer... sourire en fait. J'ai envie d'en rire rien que d'y penser. Je n'arrive pas à l'imaginer placer un sourire sincère sur ses maudites lèvres. Même l'imaginer en compagnie d'amis me semble impossible. Il est tellement froid et rigide... Je ne l'ai jamais vu parler à quelqu'un d'autre que sa famille, son secrétaire et la gouvernante. Jamais à quelqu'un qui n'a aucun lien avec son travail.

D'ailleurs, quand Mona a parlé des photos prises en Amérique, elle n'a pas mentionné le fait d'avoir vu des photos de lui en compagnie d'amis. Je me pose peut-être trop de questions, ça ne me concerne pas après tout... mais quand même... préfère-t-il être en solo ? C'est un loup solitaire ? Serait-il asocial et incapable de se montrer un minimum sympathique ?

Je me refuse à croire à cette image, cependant. Tout le monde a ses bons côtés... N'est-ce pas ? Je ne le connais pas assez pour le juger, de toute manière. Tout comme Azélie et moi ne nous entendons pas, j'aimerais un jour qu'on mette nos différends de côté et apprendre à la connaître. On ferait peut-être de bonnes amies.

Je soupire puis fais des mouvements précis du poignet pour attraper une feuille assez loin. Je me mets sur le bord de la piscine pour augmenter mes chances de l'attraper pendant que Mona raconte encore une fois le jour où elle et Ricky ont construit un château en carton.

Au moment où j'attrape presque cette fichue feuille jaunâtre, je sens un poids percuter mon dos et me retrouve projetée en avant, me retrouvant mouillée de la tête aux pieds avec des feuilles collées sur tout le corps. J'ai le réflexe de me débattre pour refaire surface et ne pas avaler les feuilles qui entravent ma respiration. Un rire aigu se fait entendre et je lève les yeux pour voir Azélie s'esclaffer comme une hyène.

- Bah alors ! Je pensais qu'avec ta taille de girafe, tu aurais pied au sol, mais visiblement tu trouves quand même le moyen de te noyer... Bonne à rien, crie-t-elle avant que son rire ne reprenne de plus belle.

Elle ? Une bonne amie ? Mes fesses. Je n'ai aucune envie d'apprendre à la connaître. Une colère sourde s'empare de moi et je sors de la piscine, jette un coup d'œil à Mona et lui dis :

- À ne pas reproduire, ma puce.

Je prends Azélie par les genoux et la place par-dessus mon épaule, ses poings s'abattent violemment sur mon dos tandis qu'elle essaie de se débattre en crachant des « Lâche-moi ! Lâche-moi, connasse ». Arrivée au bord de la piscine, je dis d'une voix neutre :

Au-delà des limites Où les histoires vivent. Découvrez maintenant