Chapitre 14-2

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À mon réveil, mis à part mes yeux bouffis et un mal de tête lancinant dus à mon trop-plein de larmes, je me sentais beaucoup mieux physiquement que je ne l'avais été depuis des jours. De l'autre côté, émotionnellement, cela tenait plus d'une plage après un tsunami, inondée, balayée puis dévastée. Trop de chocs, d'informations, d'espoirs et de rejets. Trop de tout en trop peu de temps pour mon pauvre petit cerveau. Je décidai que prendre les choses, révélations, catastrophes et que sais-je encore, l'une après l'autre lorsqu'elles se présenteraient, était encore la meilleure, voire la seule option acceptable, si je voulais avoir encore une chance de pouvoir fonctionner normalement. Lorsque toute cette histoire serait derrière moi, je pourrais me permettre une introspection accompagnée d'un bon séjour en maison de repos.

Je me levai sans trop savoir quoi faire, ni où aller. Il faisait nuit dehors, j'avais dormi toute la journée. Pas étonnant dès lors que je me sente en forme, mais un peu déphasée. Je repassai par la salle de bain pour me rafraîchir le visage et finir de me réveiller, puis sortis de l'appartement. À peine avais-je refermé la porte derrière moi que je m'entourai automatiquement de mes bras. Nous étions au mois d'octobre et le tee-shirt que l'on m'avait prêté avait beau avoir des manches longues, il ne suffisait pas à me protéger du froid d'une nuit automnale dans cette partie du monde.

Je commençai à avoir froid au bout d'à peine trente secondes et décidai donc de me diriger vers le bâtiment du conseil, faute d'un autre endroit où aller, lorsque je vis Hannah venir dans ma direction d'un pas énergique. Je ne l'avais pas revue depuis le jour où elle m'avait accompagnée au village, il y avait de cela déjà trois jours, voire quatre peut-être maintenant. Je lui trouvais un air moins froid et imperturbable, mais peut-être était-ce dû à la pénombre ? Lorsque nos regards se croisèrent, elle s'arrêta brusquement et commença à faire demi-tour.

— Viens, suis-moi ! aboya-t-elle de son habituel ton glacial.

Mon imagination me jouait bien un tour au final ! me dis-je nullement surprise. Je la suivis le plus rapidement possible, pressée de me mettre au chaud et à l'abri de ce vent glacial. Elle ne me conduisit pas au bâtiment du conseil, mais à la maison d'habitation principale où Charles m'avait d'abord accueillie. Nous pénétrâmes dans le même salon où se déroulait une conversation, apparemment animée, entre les trois membres de leur fameux conseil et Jude qui n'avait pas l'air de l'emporter. Instinctivement, je vins me placer à côté de lui, dos à la cheminée, ce qui me valut un coup d'œil hostile d'Hannah, et essayai de m'intégrer à la conversation.

Au bout de presque une heure de discussion plus qu'houleuse où Daphnée me traita de tous les noms pour avoir osé mêler la police à leurs histoires et de les avoir, selon ses dires, presque menés à leurs portes, nous arrivâmes à nous mettre d'accord sur le fait que je devais rencontrer l'inspecteur comme prévu le lendemain matin et le conduire jusqu'à l'endroit où l'on avait découvert Martha. Peut-être qu'avec toutes les ressources dont disposait la police, ils pourraient trouver un début de piste susceptible de nous aider à comprendre ce qu'il s'était passé.

Jude leur montra ensuite les balles qu'il avait eu la présence d'esprit d'aller récupérer dans la poche de mon jean. Il s'avéra, d'après Charles, que celles-ci étaient constituées d'un alliage qu'il ne connaissait pas mais que surtout, et c'était là le plus inquiétant, le corps de Jude aurait dû les rejeter spontanément au bout de quelques minutes, comme avec n'importe quelle autre munition plus classique.

Féline. Tome 1 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant