Chapitre 4-2

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— Hein...la seule quoi ? Écoutez, je n'y comprends rien. À vous entendre je serais une métamorphe sans en être une ? Je suis quoi alors, une sorte d'hybride ? Ou juste un raté inexpliqué ? ...

— Les hybrides n'existent pas. Nous ne nous reproduisons pas avec les humains, affirma-t-il d'un ton hautain et dégoûté. Nous penchons plus du côté d'un problème survenu durant la grossesse, mais nous n'avons aucune certitude. Nous espérons juste que compte tenu de votre différence, votre capacité innée à communiquer avec les animaux et à ressentir leurs émotions, entre autre choses, sera encore à son maximum malgré votre âge.

— C'est déjà ce que ma affirmé Hannah, mais je n'ai pas cette capacité.

— Vous l'avez. Elle est seulement brimée par peur de vous en servir, comme...atrophiée. Il va vous falloir apprendre à la faire travailler.

— Comment m'avez-vous trouvée ? Et comment saviez-vous ce qu'était exactement ce fichu « don » ? Même moi, je n'étais pas au courant.

Il eut le bon goût de paraître gêné par ma question. Il baissa les yeux une fraction de seconde et quand il les releva, tout soupçon d'embarras avait disparu et c'est d'un ton froid qu'il finit par m'avouer,

— Depuis votre premier internement, en fait. Nous avions un doute, donc nous vous avons surveillée discrètement. Quelques années plus tard à la campagne, lors d'une sortie, un métamorphe de notre communauté vous a vu utiliser vos capacités sur des lézards au bord d'une rivière. Il m'a donc rapporté que nos doutes étaient justifiés. Nous avons alors attendu que votre première transformation se produise. À ce moment-là, nous serions venus vous voir pour tout vous expliquer et vous proposer de vous joindre à nous.

La rage et la douleur m'empêchaient presque de respirer. Je retombai sur le canapé, d'où j'avais commencé à me relever, les jambes coupées par le choc et l'incompréhension.

— Mais elle n'a jamais eu lieu, arrivai-je à prononcer d'une voix blanche.

Un instant je me demandai ce qu'aurait été ma vie si cela s'était produit. Aurais-je connu ce qui se rapproche le plus d'une famille, au lieu de passer d'un orphelinat à l'autre ? Je sentis la colère brute et noire prendre le pas sur l'abattement et l'hébétude ressenties à l'annonce de cette nouvelle stupéfiante et bouleversante.

— Vous m'avez surveillée ! criai-je en m'étranglant presque d'indignation. Comme je ne me transformais pas je n'étais plus digne de votre intérêt ?! Ça n'a pas l'air de vous déranger aujourd'hui, maintenant que vous avez besoin de mon aide ! Vous auriez pu me recueillir à l'époque, puisque je vous cite « je fais partie des vôtres ». Nooon ! Au lieu de ça vous m'avez laissée vivre dans ces institutions de malheur, sans même lever le petit doigt pour m'aider.

Je me levai, les poings serrés. Les larmes que je ne pouvais plus contenir roulaient sur mes joues.

— Vous saviez que je n'étais pas folle. Pourtant vous les avez laissés m'enfermer dans cet horrible hôpital, vous les avez laissés me faire...Je secouai la tête. Je ne pouvais et surtout je ne voulais pas, laisser ces souvenirs remonter trop à la surface. Cela ne les rendrait que trop réels alors que je cherchais à tout prix à les oublier. J'essayai de ravaler mes sanglots. Je ne voulais pas lui faire ce plaisir à ce salaud, et me dirigeai vers la porte le plus dignement que je le pus.

— Nous n'étions pas sûrs à cent pour cent de ce que vous étiez, et certains ne voulaient pas prendre le risque de tout vous révéler. Ils avaient peur que vous paniquiez, que vous ne trouviez pas votre place parmi nous. Il y a eu un vote...et la majorité a décidé de ne pas vous recueillir. Je dirige cette communauté et doit parfois faire des choix pour le bien de tous. Arrêtez donc de vous apitoyer sur le passé et de vous comporter comme une gamine. Allez de l'avant ! Sachez que personnellement je le regrette, je pense que c'était une erreur stratégique...

— Une erreur stratégique ?!

À l'entente de sa formulation...malheureuse, j'explosai littéralement, sans lui laisser le temps de finir sa phrase.

Je revis mon jugement sur sa personnalité en une fraction de seconde. Cet homme était très dangereux et n'avait pas une once d'empathie. Il faisait semblant quand cela l'arrangeait mais au fond, c'était un monstre. Il se contrefichait complètement que ses paroles me fassent du mal. Une erreur stratégique ! Pas, « c'était une décision regrettable je suis désolé que vous ayez dû subir tout cela toutes ces années ». Nooon...une putain d'erreur stratégique ! Au moins voilà qui me remettait à ma place de façon efficace. Je n'étais rien pour eux, qu'une erreur de la nature, dont ils avaient besoin à un moment donné. Mon indignation me donna la force de continuer à lui faire face sans m'écrouler.

— Je ressemble moins à une « erreur », maintenant que vous avez besoin de moi ?

— Je me suis mal exprimé....

— Non, n'essayez même pas de vous rattraper...ce serait pire. J'ai bien compris que j'étais un problème dont vous vouliez avant tout oublier l'existence et surtout indigne de votre belle communauté parfaite. Vous daignez enfin me parler, uniquement parce que vous avez besoin de mon aide. Mais moi, c'était avant que j'aurais eu besoin de vous. Donc merci beaucoup mais...débrouillez-vous tout seul et oubliez-moi à nouveau !

À ce stade j'étais parvenue à un tel niveau de rage que tout mon corps en tremblait. Faisant un effort pour me ressaisir, je me dirigeai résolument vers la porte. J'étais trop choquée pour penser à autre chose que mettre un pied devant l'autre.

— Comme vous voulez, me dit-il sur le ton froid et impersonnel qui reflétait très bien son caractère de sociopathe. C'était ce que nous pensions à l'époque, mais depuis nous avons changé d'avis, reprit-il après une courte pause. J'ai passé de nombreuses années à étudier votre cas pour essayer de comprendre votre absence de transformation. Car à présent que vous êtes devant moi, j'en suis certain, vous êtes bien une métamorphe...mes sens ne me trompent jamais.

Sociopathe, sadique et présomptueux, charmante association ! Je me figeai, mais ne lui fis pas le plaisir de me retourner. Voyant sûrement là un signe encourageant, il continua.

— Je n'ai pas encore trouvé de réponse pour l'instant, en revanche. Je pense que votre particularité peut vous avoir donné des aptitudes supplémentaires, qui vous rendraient unique et précieuse.

— Bien sûr ! Maintenant que ça vous arrange, je suis unique et précieuse. Comme c'est pratique, persiflai-je toujours en lui tournant le dos.

— Vous pouvez passer le reste de votre vie à ruminer sur votre passé si ça vous chante, m'annonça-t-il froidement. Par contre, si vous êtes prête à mettre ça de côté, je peux vous révéler votre vraie nature et vous apprendre à vous intégrer avec les vôtres. C'est à vous de voir ?

Féline. Tome 1 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant