Le goût amer du passé tu m'le rappelle

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Quand je me levais, à poil dans son lit, je me dis que j'avais peut être merdé. Il devait être aux alentours de midi quand je me décidais à lui piquer un t-shirt et le rejoindre dans la cuisine. La pièce était enfumée, et il devait s'enfiler au minima le troisième pilon de la journée pour accompagner ses tartines. Je lui jetais un regard mi contrarié, mi inquiet. 

- Les joints dès le matin, c'est obligé ? 

- Dit celle qui a faillit faire une overdose hier soir.

Sa réponse me fit l'effet d'une douche froide. L'espace d'un instant j'avais oublié tout ce qu'il s'était passé entre nous. On était plus ensemble. Désormais, on était des inconnus l'un pour l'autre. Ou du moins, on devait se convaincre que c'était le cas. 

Sans un regard pour lui, j'ouvrais la fenêtre, admirant rapidement la vue sur sa banlieue parisienne. Un p'tit vieux promenait son chien, un groupe d'ado écoutait du rap en surveillant le four. L'air frais caressant mon visage me réveilla légèrement, et me remit les idées en place.

Toujours en string, je pris grand soin d'éviter son regard.

- J'aurai pas du t'appeler hier, je suis désolée. Je vais y aller...

Alors que je me dirigeais vers sa chambre pour récupérer mes vêtements, il saisit mon poignet, me faisant tourner la tête en sa direction sous le coup de la surprise. 

- Soan. 

Je pris le temps de le dévisager. Ses cheveux en bataille, sa barbe de trois jours, son piercing au bridge, sa chaîne autours du cou. Ses yeux rougis à cause des drogues. 

- Reste. 

***

La nuit était tombée depuis un bon moment depuis qu'Emmy avait débarqué chez moi, avide de savoir comment j'allais. La fille aux cheveux rouges d'hier avait demandé à l'accompagner, inquiète suite à mon état de la veille. J'avais appris qu'elle se nommait Nine. Toutes les trois entassées dans mon studio parisien, on se résumait notre soirée en s'enfilant un énième paquet de Camel. 

- T'as déconné ma belle, constata Emmy d'un air consterné. 

Je ne répondis rien, prenant soin de garder mes suçons recouvert sous le tissu rugueux de mon sweat. C'est comme si tout était comme avant : Ses tâches de cire sur le parquet, son matos à dessins éparpillé un peu partout. J'avais même retrouvé mon matériel photo sur sa commode, que je pensais avoir paumé. Avant de partir, il m'a prit dans ses bras. 

" C'est vraiment la fin ? " Qu'il a dit. Je suis partie sans lui répondre. Il empestait la beuh, le shit et le tabac froid. Ça ma remit les pieds sur terre, me rappelant un peu pourquoi j'avais décidé d'en finir. 

Nine, remarquant qu'on était à court de clopes, sortit son tabac à rouler sans un mot. 

- Sinon, vous ? M'exclamais-je pour changer de sujet. Votre fin de soirée était comment ? 

Les deux jeunes femmes se lancèrent un regard qui me fît froncer les sourcils, suspicieuse.

- Pas grand chose, marmonna Nine en tassant son tabac d'une main experte. Je suis partie peu de temps après toi, je croule sous les annonces facebook pour trouver un coloc. C'est trop la galère. 

Je me redressais sous la surprise. 

- Tu cherches un colocataire ? 

Elle roula sa clope, et lécha la feuille avant de la finir d'un air triomphant. 

- Oui, on est déjà trois, mais l'ancien gars à qui on sous-louait une chambre est partit en Erasmus. 

J'échangeais un regard avec Emmy sachant toutes deux à quel point j'étais désespérée quand à trouver un nouveau logement. Mon proprio me laissait jusqu'à la rentrée pour me reloger, et de toute façon, entre le souvenir de mon ex qui hantait mon studio et mon père qui connaissait l'adresse, je ne comptais pas m'éterniser ici. 

Emmy posa une main sur son épaule d'un air malicieux. Nine releva la tête de sa cigarette toute neuve en laissant son briquet en suspend, faisant tinter ses créoles en or au passage. 

- Et bien je crois que tu as une nouvelle candidate. 

Cœur inerteKde žijí příběhy. Začni objevovat