Chapitre 6

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- C'est tout ce que vous vouliez savoir ?
- Quoi ? Non, je...
- Hop, hop, hop vous avez utilisé votre quota de parole. On reprendra une discussion dans exactement six ans et trente-trois jours.

En l'espace de cinq secondes son regard s'est complètement métamorphosé et le revoilà comme il était auparavant.

Il appuie sa réponse en s'avançant vers sa voiture. Je le suis au pas de course.
- Nous n'avons pas assez parlé.
Il se retourne brusquement, me faisant vaciller en arrière.
- Je sais que je suis un homme très captivant. Mais parfois...
- Ne m'obligez pas à vous relancer mon sac en pleine tête.
- Vous me fatiguez, Mademoiselle.
- Je vous attends depuis deux heures puisque vous étiez en train de vous occuper de Thomas ! Alors, l'épuisée ici c'est bien moi !
- Ah. Non, en réalité c'était une excuse pour prendre un bain et pour me reposer un peu devant la télé. Il a des parents pourquoi je ferais tout ça ?

Le rouge me monte aux joues.
- En fait, vous savez quoi ? Vous avez raison : retournez chez vous. Je ne vois même pas pourquoi je me prends la tête avec vous.

Je raffermis ma poigne sur mon sac et retourne à ma voiture.
Il ne m'en empêche pas et heureusement. Ce soir c'est très clairement l'ascenseur émotionnel.
- Un rendez-vous lance-t-il derrière mon dos.

Je me retourne sans trop l'écouter.
- Pardon ?
- Un autre rendez-vous. Cette fois-ci, je vous répondrais.
- Vous vous foutez de moi.

Il fait mine de réfléchir, un air narquois au visage.
Irrésistible.
- Peut-être un peu. Vous êtes... amusante ? Quoi qu'il en soit je vous prie d'excuser ma conduite de ce soir. La prochaine fois je tâcherai d'agir convenablement. Et de répondre.

- Je ne crois pas que je vous laisserai le choix Je le toise.
- Je prends cela pour un oui ? Un rendez-vous avec vous ? Un véritable ?

Je me pince la lèvre supérieure, hésitante. Si ma conscience se démène pour m'en empêcher, mon cœur et mes lèvres en pensent tout autre chose.
- Très bien, oui.
- Je ne vais pas agir en gentleman et vous déposer chez vous ce soir, j'ai retenu la leçon de la nuit dernière.
- Vous apprenez vite.

Il s'en va et je réalise, une fois encore, de la bêtise que je viens de commettre.
Pourquoi je cherche si désespérément à le connaître ?

***

- Si je suis encore vivante à la fin du mois c'est clairement un exploit.
J'observe attentivement les différents sachets de pâtes qu'il me reste et qui devront, bon gré mal gré, me servir de nourritures pendant les trois prochaines semaines.
- Pourquoi tu ne reviendrais pas vivre chez papa et maman ? Me demande ma grande sœur, un paquet de chips en mains.
- Encore mieux : je postule ailleurs. Si je suis acceptée je vais devoir dire aurevoir à mes choux mais ça en vaut probablement la peine.

Je laisse les annonces défiler et recherche dans quel établissement je pourrais postuler.

Je me relève et lui enlève férocement le paquet.
- Tu vas en mettre partout et j'ai pas assez d'argent pour me payer un agent de traitements des nuisibles.

Ça fait plusieurs mois que j'envisage de changer d'établissement scolaire. Même si j'adore mes enfants, mon amour n'est pas suffisant pour me payer un toit et de la nourriture.
- Lâche moi un peu cet ordi et viens découvrir les news avec moi lance ma sœur, la luminosité de son téléphone au maximum.
- T'en as pas marre d'espionner la vie des gens qui ne te connaissent même pas ?
- Ils me connaissent pas mais ils vivent pour être connus. Ah tiens, tu connais Dave Smith ?

À Travers Nos CœursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant