𝟔.

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Sa petite cuillère, tournant en rond dans la tasse et se butant plus d'une dizaine de fois à ses parois, avait elle-même le tournis.

Se mordant de toutes ses forces la lèvres inférieures, les phalanges serrées à en devenir blanchâtre, elle attendait son retour.

Le fichu air impassible s'affichant sur sa face ne lui donnant aucun indice, elle but d'une traite le fond de sa tasse pour se donner contenance, mais sans résultat.

Il semblait plongé dans le texte, et contenir son stress devenait de plus en plus impossible.

Elle se demandait pourquoi elle lui avait permis de devenir son bêta-lecteur.

Pourquoi elle avait envoyé un mail à cette adresse de malheur qu'il avait noté dans son carnet.

Pourquoi elle s'était naïvement prise au jeu.

Pourquoi son cœur faisait un tintamarre de tous les dieux là-dedans et pourquoi elle croyait son estomac organisateur d'une fête foraine dans son ventre et faisant faire des tours de grand-huit à ses papillons locataires de ses tripes.

Pourquoi ce foutu brouhaha dans son crâne résonnait.

Pourquoi elle avait écrit ces trois fichus pages.

Et pourquoi par Jupiter elle les lui avait donnés à lire, non pas par mail comme d'habitude, mais en personne !

Elle regrettait le moindre de ces choix, et haïssait les rougeurs enflammant de gêne son visage et ce temps qu'il mettait à lire son récit.

Récit pour laquelle ses remords et aversion n'avaient pas de limites.


Il est souvent insupportable.

Et là dedans, j'ai l'impression que ça danse la guigue.

L'amour et l'affection sont souvent dessiner sous forme de cœur rosâtre et de fleurs délicates.

Je n'y vois qu'un poignard de la conscience et un gouffre où se jetterait ma dignité.

Voilà que déjà, cette horreur me fait perdre ma plume.

Je relis mes précédentes lignes et je me retiens de froisser la feuille et de la jeter dans ma corbeille à papier.

Il ne m'en reste pas beaucoup, je ne tiens pas à les gaspiller.

Je repense à son visage et, à peine aperçu, ma tête chute sur mon bureau, brûlante, un soupir lascif m'échappant, des scénarios Dieu immoraux dans ma tête de jouant.

Dorénavant, je prends constamment soin de fermer à clé la porte de ma chambre de crainte que mes frères ne me voit dans ces états de faiblesse.

Je ne m'abaisserais pour personne.

Pourtant, je me sais capable de me donner corps et âme à lui.

J'ai l'impression de lui avoir accorder ma confiance.

Je voudrais d'ailleurs la reprendre, mais je ne sais comment.

Ces idiots autour, je ne leur ai rien dit.

Personne ne le sait.

Les entendre parler d'amour avec un grand A me donne envie de régurgiter mon petit déjeuner sur leurs hauts, leurs moqueries risquant sûrement d'écoper d'une perte de contrôle de ma part et d'une paire de baffes bien placées.

𝕷𝖎𝖇𝖊𝖑𝖑𝖊𝖘 𝕽𝖔𝖒𝖆𝖓𝖈𝖊́𝖊𝖘 || 𝗦𝗛𝗜𝗞𝗔𝗧𝗘𝗠𝗔Where stories live. Discover now