Chapitre 13

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Je sirote mon verre de jus d'abricot, plus pour m'occuper les mains que par réelle soif. Le fait d'être un étranger sous ce toit me saute encore plus aux yeux lorsque je les vois tous s'activer avec aisance dans la cuisine. Loris ouvre les placards pour sortir les bols afin de les remplir de gâteaux apéritifs, Swan a déjà sorti les verres pour les remplir, Olympe s'est emparé d'un saladier pour y déverser les pop-corn qui sortent tout juste du micro-onde. Tout est bien rodé, chacun paraît à l'aise et familier avec l'environnement. Et moi, je les écoute simplement bavarder joyeusement et rire sans oser intervenir.

La pression sur ma poitrine s'accentue. Si seulement Sohan avait été là... Il aurait été un repère, une présence rassurante. Il a souvent été une passerelle entre les autres et moi, le lien qu'il me faut pour me lancer. Peut-être que je me cache trop derrière lui ?

— On a tout ? s'enquiert Charles.

— Je pense qu'on est bon !

Olympe fait rouler son fauteuil jusqu'au canapé. Elle enroule ses bras autour de la nuque de son petit ami et il doit lui murmurer quelque chose à l'oreille, car elle glousse tout bas et se laisse porter. Charles l'installe à côté d'un accoudoir et pose un plaid sur ses genoux. Leur complicité est flagrante. Je ne les trouve ni niais, ni mièvres. Même s'ils sont jeunes, leur amour tendre et sincère me pique le cœur. Ils sont beaux, complémentaires, amoureux.

Je détourne les yeux avant que la jalousie ne me submerge complètement. C'est idiot, je sais, mais je crois qu'Ilyès ne m'a jamais regardé de cette façon. Il ne m'a jamais aimé comme je rêvais qu'il le fasse.

Swan et Eugénie s'installent sur les fauteuils et Loris s'assoit près de Charles en déposant le plateau des boissons sur la table basse. Je me cale donc entre lui et l'accoudoir, le regard rivé sur mes mains, une excuse au bord des lèvres, parce qu'à quatre sur le canapé nous sommes obligés de nous serrer et que ma hanche frôle la sienne. Pourtant, il ne semble pas s'en formaliser.

Manette en main, Charles lance un Mario Kart pour débuter la soirée.

— Tu veux commencer ? me propose Loris en me tendant une manette.

Quatre autres paires d'yeux se braquent sur moi et je secoue la tête.

— Non, vas-y ! Je n'ai jamais joué, je préfère regarder le premier tour.

Swan décline également. Les autres choisissent rapidement leurs personnages, ainsi que leur modèle de voiture. Loris oriente sa manette dans ma direction afin de me montrer et de m'expliquer les touches qu'il active. Il opte pour Donkey Kong et une moto, dont les caractéristiques des roues et du parachute m'échappent complètement. Bientôt, ils se retrouvent sur la ligne de départ et la course commence. J'ai du mal à suivre les quatre zones de l'écran, à me repérer sur les circuits qui défilent à toute vitesse. Visiblement, ils connaissent tous le jeu par cœur.

— Charly nous a dit que tu voulais devenir astronome.

Olympe me jette un coup d'œil rapide, avant de se reconcentrer sur l'écran.

— Oui. Enfin... Dans l'idéal, mais je ne sais pas si c'est possible.

Je glisse mes mains entre mes jambes lorsque je prends conscience que j'allais me ronger les ongles.

— Il faut faire quoi après le bac ?

— Il faut que je sois accepté à la fac. Normalement, c'est une licence de mathématiques ou de physique, mais j'aimerais faire le double cursus.

Et, surtout, que j'obtienne une bourse, afin de pouvoir payer les frais de scolarité.

À ma droite, Eugénie lâche un sifflement.

Une cuillère et demie de chocolat en poudreWhere stories live. Discover now