Chapitre 2 : Lycée

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Au lycée, il était dans ma classe, mais Louise et Clément étaient dans une autre. Dès la rentrée, j'avais rencontré deux nouveaux amis qui s'étaient joints à notre petite bande un peu bizarre. Un couple qui s'aime d'un amour fou et un autre qui ne se supporte pas. Et, comme tous nos amis étaient des amis communs, même là je devais partager avec l'insupportable Noah.

Avec Matthieu et Benji, ça avait commencé par mes cris hystériques et une araignée terrifiée.

J'étais assise au premier rang, prête à entamer cette nouvelle année de façon studieuse. Et j'avais remarqué que Noah s'était assis juste derrière moi. Il avait beaucoup changé durant ces deux mois. Finis les traits enfantins. Même si tout était là, ses cheveux légèrement bouclés, ses yeux marrons. Il avait les épaules larges et le visage d'un jeune homme, la façon qu'avait cette mèche de tomber sur son front, son regard sombre et plus affirmé, plus... je ne sais quoi. Je m'étais surprise à l'observer un moment, jusqu'à ce qu'il me regarde aussi. Si son corps n'était plus celui d'un enfant, son sourire restait le même. Et cette étincelle de malice dans ses yeux, je la connaissais, mais cette fois, elle me semblait différente, elle me troublait. Je chassais vite cette idée de mon esprit quand il me fit un de ses clins d'œil annonciateur d'une nouvelle et longue année de chamailleries. On ne s'était pas vus de l'été parce qu'il avait voyagé avec ses parents, l'eau avait coulé sous les ponts... C'était mal le connaître !

Notre professeur principal nous mettait la pression pour qu'on comprenne que le lycée, ce n'était pas le collège, qu'on allait bientôt devenir des adultes et qu'on devait se montrer matures et responsables. C'était pile le moment que Noah avait choisi pour déposer une énorme araignée aux pattes velues sur mon épaule. L'arachnide monstrueuse s'était baladée le long de mon bras avant que je la remarque, au moment où elle touchait ma main. Alors j'avais bondi de mon siège comme une sauterelle et j'étais montée sur la table de Noah en hurlant toute la peur que m'inspirait la créature. Et Noah qui se marrait... Il se tenait le ventre et tapait du poing sur la table en se foutant de moi. Matthieu avait attrapé l'araignée avant qu'elle n'atteigne sa table et l'avait calmement relâchée par la fenêtre. Et Benji m'avait tendu la main pour m'aider à redescendre. J'étais essoufflée et au bord des larmes. Et surtout rouge de honte ! Plusieurs élèves se moquaient de moi alors que le professeur me regardait par-dessus ses lunettes, agacé.


— Comment tu t'appelles ? me demanda-t-il fermement.

— Dany, monsieur, répondis-je mal à l'aise.

— Danielle, son prénom c'est Danielle, ajouta Noah, qui savait que je détestais qu'on m'appelle Danielle.


Ce sale petit fourbe refermait discrètement la boîte dans laquelle il avait apporté l'araignée. Il avait tout prévu à l'avance !


— Eh bien, Danielle et vous... monsieur comment ?

— Noah, dis-je comme une petite peste, contente que la roue tourne.

— Très bien, allez tous les deux dans le bureau du nouveau proviseur et donnez-lui un aperçu de l'année qui l'attend en lui expliquant quel genre d'âneries vous font rire.

— Mais, monsieur, tentai-je...


Il m'arrêta d'une main et reprit son discours pour le reste de la classe. Benji et Matthieu me regardèrent, l'air désolé. Et Noah m'ouvrit la porte en faisant une révérence caricaturale pour m'inviter à sortir. Je passai devant lui en l'ignorant et filai dans le couloir jusqu'au bureau du proviseur.

Il nous avait passé un sacré savon. Et je prenais ça au sérieux. Je voulais réussir le lycée, sortir de là avec mon bac en poche et oublier ces gamineries. Mais Noah m'énervait tellement ! Et j'aimais trop me battre contre lui... Lui aussi adorait ça, je le savais. Et, en sortant du bureau du proviseur, qui nous avait interdit de nous mettre à moins de deux chaises l'un de l'autre en cours, on s'était insultés en chuchotant jusqu'à ce qu'il n'y ait plus aucun adulte pour nous entendre.


— Refais jamais ça sinon... dis-je en tendant un doigt autoritaire vers lui.

— Sinon quoi ? me défia-t-il.

— M'oblige pas à faire revivre Pisse-Partout, conclus-je en le plantant là, dans le couloir.

— J'ai pas peur de toi, Chicot ! cria-t-il alors que je prenais les escaliers.


Le lendemain, pendant la dernière heure de cours, je lui volai ses baskets dans les vestiaires avec la complicité de Matt et Benji et je les attachai ensemble par les lacets avant de les balancer dans l'arbre au-dessus du terrain de foot.

J'avais fait plus de tours de piste en cinq minutes pour lui échapper que j'en avais fait durant toutes les heures de sport au collège. Il me poursuivait en chaussettes et je riais tout en criant, craignant qu'il me rattrape. Mais, à un moment, il avait fait semblant de se faire mal au pied en se roulant dans l'herbe et en geignant. Alors, parce que Louise et Clément m'en auraient voulu à mort s'il s'était fait mal à cause de moi... j'étais venue vers lui pour vérifier que ça allait. Noah m'avait attrapée par la taille et m'avait fait rouler dans l'herbe jusqu'à ce que je me retrouve sur le dos. Il était au-dessus de moi et tenait une touffe d'herbe dans la main, comme s'il allait me forcer à la manger. Mais je riais, je n'en pouvais plus de rire.

Son regard devint différent, comme s'il était sérieux tout à coup. Nos visages étaient proches pendant ces quelques secondes suspendues dans le temps. Je me sentais vulnérable soudain...


— Je te déteste, Danielle, avait-il murmuré en me regardant dans les yeux.


J'avais senti le souffle de sa déclaration sur ma peau.


— Moi aussi je te déteste, Noah ! avais-je répondu en le repoussant pour me relever.


Il m'avait balancé la touffe d'herbe dans le dos, mollement. Et les olympiades des gamineries avaient semblé se calmer après ce jour... On se contentait de ne pas s'aimer. Et quand on se disputait, souvent, ce n'était plus un jeu. Il m'agaçait, je l'agaçais. Et on s'engueulait parfois jusqu'à s'ignorer des semaines entières avant la prochaine embrouille.

Même pas en rêve #1 (à nouveau disponible)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant