「01」

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Chaque masque que nous portons, chaque façade que nous construisons, a sa propre histoire.

L E A H . . .

Face à mon miroir, je glisse soigneusement le rouge à lèvres sur mes lèvres, une nuance que ma mère juge parfaite pour moi. Je réajuste ma jupe, inconfortablement courte, sentant déjà les regards qui se poseront sur moi à l'école. C'est le premier jour, et une boule d'appréhension se forme dans mon ventre. Je sais déjà que ce sera une année compliquée, une autre année de masques et de comédies.

Je soupire, doutant de ma capacité à supporter encore tout ça, mais je n'ai pas vraiment le choix, n'est-ce pas? Ma mère m'a toujours dit que la popularité est un don, une grâce que tout le monde n'a pas. Pour moi, c'est une chaîne, une prison. Être le centre d'attention, la fille que tout le monde regarde, ce n'est pas ce que j'aurais souhaité. Ces vêtements, aussi près du corps, aussi exposants, ne sont pas vraiment mon style, mais ma mère pense qu'ils me mettent en valeur. Elle insiste pour que je sois cette image parfaite.

Avec une dernière hésitation, je jette un regard à mon reflet, cherchant une trace de la vraie Leah derrière cette façade. Mais tout ce que je vois, c'est la poupée que ma mère veut que je sois.

Après un profond soupir, je sors de ma chambre, prête à affronter cette journée. Je suis surprise de trouver Nicolas dans le couloir, son imposante carrure se démarquant facilement. Ses muscles saillants sont visibles sous son t-shirt moulant.

— Leah, tu veux que je te dépose au lycée ? Propose-t-il avec un sourire amical.

Son offre me surprend, mais je suis soulagée de le voir lui, plutôt que ma mère. Je n'étais pas prête pour une autre série de critiques ce matin. Je lui rends son sourire,

— Pourquoi pas ?

Nicolas, contrairement aux autres prétendants de ma mère, a toujours semblé s'intéresser sincèrement à moi. Depuis que papa nous a quittées pour une autre femme il y a trois ans, maman a changé. Elle a commencé à fréquenter plusieurs hommes, changeant de compagnon comme on change de chemise. Elle s'engage toujours dans des relations éphémères avec des hommes friqués. Nicolas, bien que moins fortuné que les autres, semble avoir une place spéciale dans son cœur. Ou du moins, c'est ce que je suspecte, peut-être est-ce une relation de "friends with benefits".

Lorsque la voiture s'arrête devant le lycée, il tourne vers moi avec un sourire sincère.

— Passe une bonne journée, Leah.

Je hoche la tête, appréciant sa gentillesse.

— Merci, Nicolas.

Je sors de la voiture, inspirant profondément. L'air est frais, chargé de l'odeur de la fin de l'été. Devant moi, le lycée s'étend avec ses murs familiers et sa cour bondée. Les élèves se regroupent, partageant des éclats de rire, des retrouvailles, des potins de vacances. Des nouveaux visages, tout aussi nerveux que le mien, essaient de se frayer un chemin.

Il y a des stands pour les clubs, des bannières pour encourager les inscriptions aux activités parascolaires, et des enseignants qui tentent, tant bien que mal, d'orienter des élèves égarés.

J'aperçois mes amies, Jess et Mia, près de l'entrée. Jess, me fait signe, tandis que Mia toujours élégante, les yeux plissés à cause du soleil, m'adresse un grand sourire.

— Leah ! S'exclame Jess, me prenant dans une étreinte étouffante. Ça fait une éternité !

Mia, toujours attentive aux dernières tendances, me dévisage de haut en bas avec un regard admiratif.

— Leah, j'adore ta tenue. Tu es... absolument fabuleuse, dit-elle, clairement impressionnée par l'ensemble que ma mère a choisi.

Je peine à cacher mon malaise, un sourire forcé se dessine sur mon visage. 

— Merci, Mia. Tu sais toujours comment flatter, je réponds, essayant de masquer mon inconfort.

— Viens, me dit Jess, on a tant de choses à se raconter !

Suivant mes amies à travers les couloirs déjà familiers du lycée, je sens les battements de mon cœur prendre un rythme irrégulier. 

Nous nous dirigeons vers notre première classe de la journée, nos voix se mêlant au bourdonnement de celles des autres élèves. Je m'assois, essayant de me fondre dans la conversation, mais mon esprit est ailleurs. Les retrouvailles avec des amis perdus de vue durant l'été, le retour à la rigueur académique, la pression omniprésente de ma mère, chaque élément forme un cocktail d'émotions qui me rend à la fois euphorique et nerveuse.

La pièce commence à se remplir. On entend les chuchotements, les rires étouffés, le bruit des chaises déplacées. Je peux sentir le parfum de Mia, un doux mélange de jasmin et de vanille, mélangé à l'odeur de la gomme de Jess. Tandis qu'elles échangent des potins sur les vacances d'été, je me laisse distraire par le piquant de leurs voix bien trop fortes à mon goût, jusqu'à ce qu'un mouvement brusque me sorte de ma rêverie.

Sans avertissement, ma tête est tirée en arrière, ma longue queue de cheval étant le levier de cette action surprise. Des lèvres pressantes et familières s'écrasent contre les miennes. Mes yeux s'agrandissent sous le choc, et instinctivement, mes mains repoussent cette intrusion. Lorsque je parviens à reprendre mes esprits, un sourire moqueur m'accueille.

— Alex ?! Je m'exclame, plus par agacement que par colère.

Il n'y a que lui qui pourrait me surprendre de la sorte, en plein milieu de la classe, sous les yeux de tout le monde. Son sourire arrogant se fait plus large.

— Salut, bébé. Sa voix résonne d'une nonchalance qui contraste fortement avec mon indignation.

— Pourquoi tu fais toujours ça ? Je marmonne, déroutée par son audace.

Alex, jamais du genre à se soucier des conséquences, hausse les épaules en réponse. Sa réaction typiquement insouciante me laisse frustrée, mais avant que je puisse répliquer, il se tourne et se dirige vers sa bande d'amis qui l'attendent au fond de la classe. Son départ laisse une traînée de chuchotements et de rires étouffés, un phénomène courant après ses escapades.

Alors que je reste assise là, encore abasourdie par le départ abrupt de Alex, Jess se tourne vers moi, les yeux pétillants d'excitation.

— Vous deux, c'est vraiment trop mignon ! Elle s'exclame, enthousiasmée par le spectacle qui vient de se dérouler.

Je suis sur le point de répliquer, de lui dire que ce n'était pas "mignon", que c'était envahissant, quand la porte de la salle de classe s'ouvre à nouveau, laissant entrer notre professeur. Le brouhaha ambiant se calme instantanément, chaque élève se précipitant pour trouver sa place. Le son de la cloche retentit, marquant le début officiel de l'année scolaire.

Loving In Disaster [ PAUSE ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant