VIII

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Je m'empresse de refermer la porte à clé derrière moi, avant de descendre vers le salon. Elle est si pure, si innocente, mais tellement terrorisée. Son regard se retrouve vide de toute expression, en dehors d'une peur indéfinissable, dont je suis l'unique cause. Elle me voit comme son bourreau, et c'est ce que je suis.

"Nathan, vous avez reçu un appel de votre mère durant votre absence. Désirez-vous la rappeler maintenant ?".
Dahlia était ma domestique depuis très longtemps maintenant, puisqu'elle était auparavant ma nourrice. Mes parents, deux grandes personnalités réputées dans le monde de l'édition, sont en perpétuels déplacements depuis mon plus jeune âge. C'est pourquoi Dahlia est depuis tout ce temps à mes côtés. Plus qu'une gouvernante, c'est avant tout une deuxième mère. La seule personne pour qui j'ai de l'estime.
"Merci Dahlia, mais je la recontacterai demain. Il est tard pour l'instant, repartez dormir".

Elle était bien évidemment au courant de la présence d'une personne étrangère dans l'appartement mais n'en parlait pas, et cela à cause d'une clause de confidentialité qui lui impose de ne pas interagir dans mes affaires personnelles. Elle savait que je ne voulais que son bien, c'est pourquoi en contrepartie elle m'avait accordée son entière confiance et tâchait de ne pas me questionner. De toute façon, elle ne peut avoir d'autres choix.

J'entre dans mon bureau, pièce dans laquelle je suis le seul à pouvoir pénétrer. J'allume mon PC et me connecte à ma boîte mail, quand un mail interpelle mon attention : il s'agit de mon père.
"Tout est réglé, tu peux la relâcher.
Évitons les dommages collatéraux.
Merci encore, fils".

▫▪▫

La lumière du soleil agressant mes yeux, je me réveille doucement avant de me rendre compte qu'il est 10h15. Je me dirige vers la cuisine d'un pas sûr, avant d'apercevoir que deux plateaux, composés chacun de viennoiseries et d'un café, sont prêts.
"Je me suis permise de préparer un petit quelque chose pour votre... hôte. En espérant ne pas vous avoir contrarié.
- C'est gentil, Dahlia".

Je saisis le premier plateau et monte à l'étage. Ouvrant la porte de ce que je voyais désormais comme sa chambre, je pénètre lentement et la découvre encore allongée sur le lit, dos à moi. Elle ne dit rien durant de longues minutes, me forçant à me demander si elle n'est pas encore en train de dormir. Puis, d'un coup, elle rompt ce silence interminable et prononce les mots suivants.
"Laisse moi aller aux toilettes.
- Si tu me promets de me suivre, dis-je d'un habituel ton ferme et froid.
- Et où pourrai-je bien aller de toute façon ?" répliqua-t'elle, pleine d'ironie, malgré une peur perceptible.
Posant le plateau, je lui fais signe de me suivre et ouvre la porte. Nous traversons le couloir sans dire le moindre mot, au milieu d'une ambiance pesante.
Elle avait peur de moi, je le savais. Et à vrai dire, je crois que j'aime ça.
Mais, sans que je ne le soupçonne, alors que nous arrivions presque devant les toilettes, elle se met à courir aussi rapidement qu'elle le peut avant de s'enfermer à quelques pas de là, dans la salle de bain. Colère, rage et détermination se livrent un combat sans merci en moi à ce moment là. Tout s'efface, et je perds tout contrôle : elle venait de me provoquer.

"Putain April tu n'aurais JAMAIS du faire ca. Dépêche toi d'ouvrir cette putain de porte, de suite ! Ne me force pas à...".
Au même moment, n'ayant pas de réponse, je frappe la porte d'une violence qui m'étonne moi même, afin de réussir à la défoncer. Aucun bruit de la part d'April ne se fait entendre. Au bout de multiples coups, la porte s'ouvre violemment, me faisant presque tomber en même temps. Incontrôlable, je m'approche d'elle, la plaque contre le mur en lui saissisant ses deux poignets, et la force à a lever les yeux afin de me regarder, avant de lui lancer ces derniers mots :

"Tu n'aurais jamais du faire ça. Jamais".

CAPTIVEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant