Chapitre 5 - L'impensable (Teano) [Partie 2/2]

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Je le récupérai aussitôt. Ma gorge se noua entre angoisse et chagrin. J'étais trop sensible pour supporter ça. Accélérant le pas, je réprimai une forte nausée et commençai à courir de toutes mes forces. Portant le bracelet face au scanner, je compris que cette action refermerait la porte du laboratoire. Des larmes perlèrent sur mon visage, embuant ma vision à travers le tunnel que je traversais. Je ne craignais plus une punition, mais un réel danger pour ma vie.

Je m'arrêtai soudain près du salon pour reprendre mon calme. Tenant fermement le carnet, je songeai à taire ma découverte, au moins le temps de pouvoir le digérer. Séchant brièvement ce début de larmes, je me hâtai de quitter la maison et pour retrouver Samay, dont je composai le numéro de téléphone en chemin.

— T'es parti Teano ? demanda-t-il.

Je réunis toutes mes forces pour lui répondre et étouffer les sanglots grimpants dans ma gorge.

— C'était pour te dire que j'arrive dans cinq minutes, affirmai-je, glacial.

— OK. Mais t'es sûr que ça va ?

— Ouais, t'inquiète.

Samay me connaissait mieux que quiconque et savait discerner quand quelque chose clochait. J'étais toujours énergique, enjoué et particulièrement positif. Jamais je ne lui aurais parlé ainsi sans raison.

— J'te connais, fais pas genre. Il s'est passé un truc avec ton père ?
Je préférai raccrocher.

Tandis que je déambulais dans les rues de Lausya, l'obscurité avait déjà recouvert la ville. Être dehors si tard n'était pas dans mes habitudes. La poudreuse s'était transformée en une pluie battante. Petit à petit, je fis en sorte de me focaliser sur la mystérieuse raison qui obligeait Annabelle à nous voir ensemble, aussi vite. Ça m'aidait au moins à oublier les mots du carnet. Je parvenais à chasser ces informations de mon esprit, mais mon corps les gardait au contraire profondément gravées en lui. Trop occupé à penser, j'avançai au feu rouge. Un véhicule bien engagé freina juste devant moi en klaxonnant bruyamment.

— On t'a pas appris à regarder avant de traverser gamin ? cria la conductrice en s'agitant avec énergie derrière sa vitre.

Je me confondis en excuses avant d'accélérer le pas. Chaque fois que mon regard se posait sur un objet ou une surface métallique, des flashs du laboratoire et de ma découverte m'assaillaient.

« Comment cacher ça à Sam? Il faut que je cache le carnet, il sera trop curieux et va m'obliger à lui montrer.»

J'arrivai dans le quartier de mon ami, quelques minutes après avoir traversé quelques passages cloutés et trottoirs. Les immeubles livides s'étiraient devant moi vers les cieux assombris. Après avoir trouvé la bonne résidence et le nom de Samay dans l'interface du digicode, je pris une grande inspiration. Seul avec moi-même, j'exécutai des grimaces aléatoires pour détendre mon visage au maximum.

« Ça rendra les mensonges plus simples, et il n'y verra que du feu»

Le petit écran vert lumineux affichait « HESVALL » en lettres digitales. Sans plus réfléchir, je sonnai. Samay décrocha et ouvrit sans répondre, appuyant une quinzaine de fois sur le bouton pour me faire entrer. J'empruntai l'ascenseur. Face au miroir, je répétai quelques grimaces pour vérifier si je simulais correctement mon propre sourire et ma positivité légendaire.

— Tu es Teano, le fils du maire. Jeune, fringant, cool et idéal. Tout le monde t'aime et tu aimes tout le monde. Voilà pourquoi tu es ici et personne ne te volera ta bonne humeur.

Lumières & Origines : I - L'autre côté du TempsWhere stories live. Discover now