Chapitre 7

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Keran

Debout, droit comme un piqué et les bras croisés, je tente de distraire mon esprit en observant tout ce qui passe derrière la vitre de mon bureau. Ana installe la salle de conférence pour notre réunion hebdomadaire. Devant la machine à café, Eric nous coule deux grosses tasses. Après ma nuit, ça ne sera pas de trop. Allan, angoissé par sa future prise de parole fait des allers-retours dans le couloir et me donne la nausée. Pas besoin de chercher Amber, elle va arriver avec quelques minutes de retard – mais avec des viennoiseries ! J'ai déjà vu Jerry plus tôt mais il doit actuellement squatter les toilettes pour sa commission matinale, et Patrick et Amelia sont déjà à pied d'œuvre devant leur poste d'ordinateur. Ceux-là n'arrêtent jamais !

Mais putain, où est Zéline ?

Mes doigts me démangent de la géolocaliser. Il est bientôt 9h ! Je sais qu'elle a eu et lu mon message hier soir, elle y a même répondu. De façon... très... énervante.

Je serre des dents tout en forçant une grande inspiration. J'ai reçu une photo d'elle en train d'envoyer un baiser à l'objectif avec la vue de sa chambre sur Manathan en arrière-plan ! Et après elle veut me faire croire avec ses pseudos principes à la noix qu'elle n'est pas matérialiste ?!

Si je n'avais pas passé une si bonne soirée aux côtés de Tina, je crois que j'aurais été capable de la réveiller avec un seau d'eau sur la tête, lorsque je suis rentré tard dans la nuit.

Voilà, Keran, pense à Tina. Je ferme les yeux. Tina et ses formes généreuses, Tina et sa souplesse, Tina et sa chaleur accueillante, Tina et sa disposition à toujours m'arranger, Tina...

La porte du bureau s'ouvre et presqu'immédiatement Éric demande moqueur :

— Tu veux un mouchoir et que je te laisse seul ?

J'ouvre les paupières et me tourne dans sa direction. Il se marre. Je lui récupère ma tasse – gravée « Le boss » – fumante d'un café noir, et lui sers un sourire prétentieux tout en rejoignant mon fauteuil derrière mon bureau.

— Et au passage que je baisse les stores ? propose-t-il encore.

— Il n'y a pas de store.

Il dépose sa tasse – « L'autre Boss » – sur la petite table devant le sofa, et s'y affale sans délicatesse. Si moi j'ai passé une très bonne soirée, ça n'est pas son cas. Malade comme un chien après une bonne gueule de bois samedi, il a préféré rester sagement chez lui hier soir.

— C'est une grossière erreur qu'il n'y ait pas de stores ! s'exclame-t'il. C'est vrai quoi ? Nous avons régulièrement des stagiaires et... un accident c'est très vite arrivé.

Il récupère une balle antistress et la lance à travers la pièce. Elle atterrit droit dans le panier fixé au mur et prévu à cet effet puis s'échoue au sol quelques mètre plus bas dans un bruit sourd.

Je me moque :

— Félicitation, cette année tu fais faire des économies à la boite, nous ne commanderons pas de store, puisque la stagiaire c'est Zéline !

Il récupère une deuxième balle et réitère. Il rate son coup, cette fois-ci.

— Putain m'en parle pas. Plus je repense à ce que j'ai entendu et vu la semaine dernière, plus je soupçonne qu'elle aime les nanas.

— Tu es déçu ? Moi, honnêtement je m'en tape.

Il marmonne :

— Mouais, tu as raison...

Je lui jette un regard interrogateur. Il semble déstabilisé, presque perdu dans ses pensées, comme si ça pouvait lui faire quelque chose. Ça veut dire quoi ? Pourquoi semble-t-il préoccupé ?

The Shadow Of Your HeartDove le storie prendono vita. Scoprilo ora