44. La locomotive des enfers

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Hello, 


Nous sommes dimanche, et dimanche, c'est Purgatoire. 

Bonne lecture :)

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Ereyne avança lentement dans les couloirs de l'immense labyrinthe faiblement illuminés par de petites torches accrochées à certains cubes. Les démons n'utilisaient que très peu leur vue pour se repérer, ils n'avaient pas besoin de lumière. Ils n'utilisaient d'ailleurs pas leurs autres sens non plus. L'enfer regorgeait d'odeurs plus agressives les unes que les autres et les démons participaient à la puanteur ambiante en oubliant régulièrement leur bain annuel. L'ouïe n'était pas non plus très sollicitée, les âmes hurlaient leur désespoir dans une cacophonie persistante. Non, les démons n'usaient guère de leurs sens, ni le reste, mono-tâche qu'ils étaient.

L'immortelle en revanche aurait apprécié un peu plus de clarté. Les couloirs se ressemblaient tous et, si elle avait ignoré que Cerbère était un trio d'amour, elle se serait attendue à le voir débouler et la dévorer tant le décor s'y prêtait. Sur son passage gémissaient les âmes emprisonnées qui la sentaient. Ereyne marchait bien au milieu pour les éviter mais elle ne pouvait empêcher sa présence d'être détectée. Elle ne s'attarda pas et avança en tendant l'oreille dans l'espoir d'entendre Lucifer.

Elle appelait régulièrement l'archange, et le maudissait de l'avoir ainsi abandonnée. Le moindre crissement provoquait chez elle un sursaut et une poussée d'adrénaline. Où était donc passé ce fichu Lulu ? Alors qu'elle arrivait au niveau d'une intersection aussi froide et sombre que les autres, elle entendit des claquements sur sa droite. Elle découvrit ce qui ressemblait à une gare primitive. Des rails rouillés partaient vers l'infini et un « train » patientait. Une dizaine de plateformes sur roues métalliques, vides, formaient les wagons et la locomotive était composée d'une vingtaine de démons enchaînés. Ils trépignaient d'impatience mais devant eux Lucifer jouait du fouet pour les maintenir immobiles. Lorsqu'il la vit il lui fit de grands signes de son bras libre.

— Enfin te voilà ma reine monte ! cria-t-il. Je peine à les retenir.

Il désigna l'un des wagons et Ereyne lui obéit prestement. Elle monta et s'accrocha au rebord du mieux qu'elle put. Lucifer relâcha les démons qui galopèrent, entraînant le train, puis il s'envola et vint s'asseoir avec l'immortelle.

— Depuis quand y a-t-il un train aux enfers ? Demanda-t-elle. A quoi sert-il ?

— Si je ne me trompe pas c'est la nouvelle version du convoi des enfers. Les rails ont à peine 1500 ans. Avant les wagons avaient des roues. Et les démons ne suivaient qu'à moitié la route. Nous étions à l'entrepôt, c'est là que les âmes vidées sont envoyées pour souffrir dans leur petit enfer personnel lorsqu'elles ne fournissent plus assez d'énergie pour le pilier. Le train va nous ramener au pilier !

« Génial, songea Ereyne, retour à la case départ ».

En enfer, tous les chemins menaient au pilier, mais pas avant quelques détours. Le convoi traversa une immense caverne où, posées sur des eaux noires et tumultueuses, les ruines de l'Atlantide, cité sanctuaire d'Ereyne, subissaient les violences de l'océan. Une larme coula sur la joue de l'immortelle alors qu'elle contemplait la magnifique cité tombée en décrépitude. Les âmes des atlantes erraient sur les restes des remparts, leurs silhouettes bleues brillant comme des milliers de lumières. Ereyne entendit leurs murmures au plus profond d'elle, eux bénis par son nom à la naissance, et certains esprits la virent et lui firent de grands saluts du bras auxquels elle répondit de la même manière. Ça et là, de petites embarcations bravaient les flots afin de rejoindre l'île. Les âmes à bord, déchirées pour la plupart, en lambeaux, luttaient de toutes leurs forces pour rejoindre l'Atlantide. La cité était le phare des enfers pour les esprits liés à la déesse.

Immortels 2 : PurgatoireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant