Immortels 2 : Purgatoire

23. Un sur quatre

Ereyne laissa Valefor l'accompagner jusqu'au pont-levis qui séparait Woodcastle du monde. L'adolescent était fasciné par ces hauts remparts austères.

— On dit que c'est l'antre du mal, murmura le rouquin en ralentissant à l'approche de l'entrée.

Ereyne songea avec amusement à la véracité des ces propos. Le château était la porte d'entrée de l'enfer, le passage entre la surface et le royaume souterrain.

— Il l'est, répondit l'immortelle alors qu'elle contemplait les tours noires. Ces murs empêchent le pire de se déverser sur Terre.

— Moi qui pensais que les Primaires et les Vampires étaient le pire de ce qui se faisait.

— Ces créatures ne sont rien comparées à celles qui sont en bas.

— Et c'est quoi ça ? demanda le jeune en pointant un doigt vers le haut.

Ereyne leva les yeux et grimaça. Etait érigé là-haut un monument qu'elle aurait bien voulu ne jamais voir apparaître. Il n'en restait plus grand-chose mais ces restes suffisaient à éveiller d'anciens souvenirs. Comme elle avait dû souffrir...

— C'est une preuve de la cruauté du maître des lieux, soupira Ereyne.

Valefor demanda plus d'explications, cette vision horrible nécessitait qu'il en sache plus, même si une part de lui savait qu'il ne pourrait rien en tirer de bon. Cependant Ereyne refusa tout net, remuer le passé ne mènerait à rien. Elle coupa court à la conversation et demanda à l'adolescent s'il avait besoin de quelque chose avant de rentrer chez lui.

— Des provisions, une couverture ?

Valefor secoua la tête, il n'avait besoin de rien, c'était un chasseur, il était habitué à la vie sauvage.

— Par contre je vous vois mal survivre plus d'une semaine en forêt.

Pour toute réponse Ereyne fouilla dans ses poches et en sortit une pierre.

— J'ai passé des millénaires avec ceci pour toute arme, ne juge jamais quelqu'un à son apparence.

Valefor doutait, cela se voyait à son attitude, il examinait la pierre taillée qu'Ereyne tenait entre ses doigts. Ce n'était qu'un caillou sombre taillé, juste une pierre en forme de pointe. Il était impossible qu'une arme aussi petite s'avère efficace pour lutter contre les dangers du monde.

— Si j'étais toi je ferai attention ! Ma douce a tué plus de créatures avec ce caillou que tu n'en verras toute ta courte et misérable vie, cria une voix en haut.

Les deux levèrent la tête et virent un homme en haut. Ereyne reconnut son compagnon sans peine mais Valefor banda son arc, prêt à tirer. Ereyne posa une main dessus et l'obligea à baisser son arme avant de lui souffler qu'il n'aurait pas le temps de tirer qu'il serait déjà mort. Zelyan n'était pas de ceux que l'on pouvait aisément abattre, d'autres avaient essayé : des anges, des vampires, des loups, des archanges, Dieu lui-même s'y était laissé tenter mais Zelyan était toujours là.

Le Diable se laissa tomber en bas et jaugea l'humain du regard. Ce n'était qu'un jeune, un rouquin, mais il avait une odeur, une fragrance qu'il reconnut, un lointain rappel du passé.

« C'est une fille, elle s'appelle Ereyne. »

A l'époque ce n'était qu'un bébé lové contre le sein de sa mère. A présent c'était une femme, la plus puissante qu'il n'ait jamais connue, la plus belle aussi, atrocement adorable et agréable en tout point. Qu'il haïssait toutes ces qualités qui la rendaient parfaite.