6- La modiste

163 16 0
                                    

Le lendemain, Gayle me réveille en tirant les rideaux, le soleil pénètre dans ma chambre comme une fleur s'ouvre le matin. Elle me force à sortir de mon lit, le plus confortable dans lequel j'ai jamais dormi. Elle me dit de rester en nuisette, je me sens mal-à-l'aise lorsque la Duchesse entre d'un pas décidé dans mes appartements. Gayle a peigné mes cheveux, mais je dois encore avoir une mine matinale et je suis toujours en nuisette. Je me sens rougir lorsque d'autres personnes la suivent, une femme trentenaire, les cheveux noirs bouclés, la peau chocolat et portant une jolie robe marron. Des servantes trottinent derrière elle, traînant des valises et des rouleaux de tissu. La modiste.

— Allons, June! Ne faites pas cette tête! Vous devrez vous habituer à ce que la modiste vienne, plus jamais vous ne porterez la même robe deux fois de suite, me lance la Duchesse en se dirigeant vers la partie salon. Venez.

Je la suis silencieusement, la modiste vient avec moi, toujours suivie par ses servantes.

Ces dernières installent une plateforme sur laquelle la modiste m'indique de me mettre debout dessus. Ensuite, elle me fait enlever la mince robe de nuit blanche que je porte. Je me retrouve donc en sous-vêtements devant de parfaites inconnues.

— Alors je vais prendre vos mesures, Mademoiselle, me dit la modiste en ouvrant ses valises.

Elle sort un long morceau de ruban à mesurer, puis elle pose un bout sur mon épaule, puis elle laisse le reste tomber sur le sol. Une servante se penche à mes pieds et colle une partie à mes orteilles. Elle dit une mesure à la modiste, une autre servante le note dans un calepin.

C'est ainsi pendant un moment, elle mesure mes bras, mes jambes, mon cou, ma taille, ma poitrine...

Finalement, ses servantes étendent des bouts de tissus presque tous dans les teintes de bleu, de violet ou de gris.

— Celles-ci sont parfaites pour les robes de soirée, Madame Parlow, indique la Duchesse en pointant certains types de tissu, plus élégants que les autres, plus brillants. Je préfère les sobres pour de simples robes sans occasion. Comme cette grise-là et ce bleu poudre.

La modiste acquiesce, puis elle ordonne à ses servantes de remballer ses affaires.

— Les robes seront disponibles dans quelques jours, mes servantes viendront les porter dès qu'elles seront prêtes.

— Je les veux pour demain, notre deuxième héritier arrive dans deux jours, je veux que Mademoiselle June soit bien habillée quand elle le rencontrera, annonce sèchement la Duchesse.

La modiste ouvre la bouche, puis la referme, elle réfléchit à ce qu'elle va dire.

— Je suis une Duchesse, celle qui a le plus grand territoire, qui plus est, vous ne voulez quand même pas perdre votre meilleure cliente, n'est-ce pas, Maude? grogne-t-elle.

La modiste acquiesce d'un sourire inquiet.

— J'y passerai mes nuits, Madame la Duchesse, bafouille-t-elle en s'inclinant.

Elle se précipite ensuite vers la sortie une fois que je suis descendue de la plateforme.

— La première chose que vous verrez ici, c'est qu'il n'y a pas de place à l'erreur dans notre monde. Nous devons être impitoyable, à l'inverse, les autres le seront, me dit la Duchesse en se tournant vers moi, posant ses yeux cruels dans les miens.

— Oui, Madame.

Elle soupire.

— Vous ne comprenez pas, ce regard de détresse dans vos yeux, je ne plus jamais le revoir, c'est mon dernier avertissement. Les autres vous feront d'une seule bouchée si vous continuez à avoir l'air d'un chien battu!

Sur ce, elle tourne les talons et se dirige vers la même porte par laquelle la modiste a fui. Je me retrouve seule avec une Gayle silencieuse. Cette dernière m'informe que je ne pourrai pas sortir de ma chambre pour les deux prochains jours, jusqu'à ce que j'ai mes robes. J'imagine que la Duchesse ne veut pas que son héritière sorte en robe de nuit dehors.

Je m'installe dans la partie salon pour prendre mon petit-déjeuner, seule et silencieuse. 

La Duchesse du Nord (En réécriture)Onde as histórias ganham vida. Descobre agora