3 : Charlie, témoin gênant

2 1 0
                                    

Charlie courait à toute allure pour retrouver l'ourson. Il négocia le virage dans la ruelle étroite pour éviter les poubelles métalliques qui décoraient l'angle avec l'avenue. La situation incongrue le faisait sourire, tout en courant. Il s'amusait ! Il n'en revenait pas, mais toute cette histoire l'amusait beaucoup.

En moins de deux minutes, il était sous le lampadaire précis où il avait eu les flashs prémonitoires.

Il stoppa net, posa les mains sur ses genoux, comme le font les basketteurs entre deux allers-retours sur le terrain, et prit quelques secondes pour calmer son souffle.

- Je ferais mieux de reprendre un peu le sport, se dit-il pour lui-même.

Une fois qu'il eut récupéré un peu, il commença à examiner la rue à la recherche de l'ourson. Il se rappelait avoir lancé la peluche en face de lui, entre deux gros containers métalliques. Charlie se précipita. L'endroit était dans la pénombre ; la luminosité qui venait du seul lampadaire était masquée par son ombre.

Il chercha à tâtons, mais l'odeur nauséabonde qui s'échappait des containers lui rappela qu'il fouillait des poubelles à mains nues, ce qui l'incita à être prudent. Il pouvait tomber sur des bouts de verre cassé ou des seringues usagées. Il s'accroupit, laissant ses yeux s'habituer à l'obscurité, essayant de distinguer un peu plus de détails de l'endroit.

Tout à coup, une lumière blanche tomba sur lui. Il repéra immédiatement une patte de l'ourson, qui semblait coincé sous une des poubelles.

Charlie jeta un œil en l'air et comprit que la clarté venait d'une fenêtre située juste au-dessus de lui. C'était celle qu'il avait vue un peu plus tôt lorsqu'il avait trouvé l'ourson, la seule qui était ouverte.

Tant mieux, au moins pouvait-il en profiter pour dégager la peluche. Il tendit le bras, coincé entre un gros carton et un tas de parpaings qui bloquaient le passage. Comment l'ourson qu'il avait jeté quelques minutes plus tôt avait-il pu glisser aussi loin ?

En s'étendant au maximum, il arrivait à peine à effleurer une patte de la peluche. Mais ce n'était pas assez pour pouvoir la saisir. Charlie dut forcer sur les parpaings, son torse s'appuyant fortement contre le béton, à la limite de la douleur, pour avoir un peu plus de préhension.

Enfin, du bout des doigts, il réussit à attraper un fil de peluche et il tira tout doucement l'ourson du dessous du container, le glissant sur un carton gondolé à l'aide de sa prise précaire. Une fois la peluche dégagée, il put la saisir et la ramener vers lui.

Juste à ce moment-là, un énorme bruit retentit, le faisant sursauter. Un bruit qui ressemblait furieusement à un coup de feu et qui venait d'en haut.

Charlie recula et observa la façade : la seule fenêtre allumée - et ouverte - était celle du premier étage, celle-là même qui lui avait laissé assez d'éclairage pour qu'il puisse repérer la peluche.

Un nouveau claquement sec accompagné d'un éclair lumineux qui illumina la pièce confirma ses soupçons : c'étaient bien des coups de feu !

Charlie n'aimait pas cette situation. Il recula tout doucement en prenant garde de ne pas faire de bruit, mais heurta au passage une boite de conserve qui trainait derrière lui. Il eut la même impression que lorsque l'on dit une grosse bêtise en pensant être couvert par la rumeur de la foule, juste au moment, justement, où cette rumeur cesse.

Il prit peur, peut-être y avait-il un règlement de comptes au premier étage, ou un assassinat ! Il ne voulait pas le savoir, ce n'était certainement pas le moment d'être mêlé à cela. Personne ne voulait être mêlé à ce genre d'histoire. Il commença à courir vers la grande avenue, avant de se rendre compte que l'ourson était tombé.

Teddy BearWhere stories live. Discover now