5 | Un truc qui cloche

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— Lyly, marmonné-je, je n'ai rien.

— Je m'en suis assuré moi-même, précise Evan, attrapant mes doigts devant la mine brutalement horrifiée de mon amie.

Mais enfin ?!

Evan Northwood, se présente-t-il, enveloppant ma paume d'un délicieux contact emballant à nouveau mon pouls. J'ai souvent entendu parler de toi, Taylor. À tel point que j'étais étonné de ne jamais t'avoir rencontrée. Je me demandais presque si Carly ne te dissimulait pas volontairement.

Northwood ? Ah d'accord, je vois.

— Très amusant ! rigole-t-elle, nerveuse. Tu es rarement là, voilà tout !

Tu me caches un truc, toi ! Depuis quand faisons-nous ça ?!

— Et bien je reste, maintenant, précise-t-il en posant ses lèvres sur le dos de ma main.

Oh. Bon. Sang.

Génial ! s'extasie faussement la créature brune que je ne reconnais plus. Et si tu allais te servir à boire ? Peux-tu demander à ton cousin de me préparer mon cocktail préféré, s'il te plaît ? Va-y aussi, Wyatt ! On vous rejoint !

Les deux hommes acquiesçant, Evan – qui appartient à la famille de Joshua, donc – maintient la connexion physique entre nous le temps d'accrocher mes iris.

— Et toi ? s'enquiert-il avec une gentillesse rendant incompréhensible la tension de Carly. Veux-tu quelque chose ?

— Non merci, pas pour l'instant, exhalé-je, me détournant pour aller ranger mon manteau.

J'espère que tu as une bonne raison de m'avoir caché cet homme ! lancé-je mentalement à mon amie m'attrapant par le coude, clairement pour m'éloigner de lui.

Je vais tout t'expliquer ! me répond-t-elle silencieusement.

Alors. Faisons le point. Non, nous ne sommes aucunement télépathes. Juste tellement proches que nous n'avons guère besoin de mots pour nous comprendre, ni de secret l'une pour l'autre. Du moins le croyais-je jusqu'à maintenant.

— Crache le morceau ! grondé-je une fois dans la chambre d'amis.

— Il n'était pas censé être là ! gémit-elle. J'étais tellement sûre que vous vous plairiez !

Ce que tu dis n'a aucun sens !

Comprenez que depuis que nous nous connaissons, nous avons toujours fait l'inverse. Lorsque nous repérions un garçon susceptible d'attirer l'une de nous – ce qui est définitivement le cas ici – nous trouvions un moyen de favoriser une rencontre. En conséquence, je vous avoue être totalement perdue. Certes nous avons aussi cette règle de ne pas toucher à celui qui plaît à l'autre même s'il ne se passe rien, ou évidemment, l'interdiction de s'approcher d'un ex, mais clairement, là, il ne s'agit nullement de ce cas de figure. Je l'aurais su, c'est une évidence ! Et en dépit de la particularité que je traîne depuis ma sortie du coma, sachez que je n'ai pas pour autant cessé de sortir avec des hommes. Je me montre juste prudente, quitte à passer pour une fille avec un trouble obsessionnel du comportement. C'est sans importance puisque je ne cherche nullement le mariage. Merci, la pitoyable expérience de mes fiançailles avec Fred m'a passé l'envie de retenter ma chance ! En prime, tomber amoureuse pour de vrai compliquerait ma vie, c'est certain. Mais bon, bref.

Explicite ! En quoi est-ce un problème ? Il semble adorable !

Sois convaincante s'il te plaît !

Carly s'assoit sur le lit dans une moue contrite nouant mon estomac, puis tapote la couette à côté d'elle du bout de ses élégants doigts, m'invitant à la rejoindre. Bien que je me sente passablement vexée, j'obtempère après avoir tout de même croisé mes bras sous ma poitrine, plissant les yeux pour exprimer mon mécontentement.

Depuis quand nous cachons-nous des choses toi et moi ?

Il EST adorable, soupire-t-elle. C'est justement l'un des problèmes !

Euh... Ouais ?

Je t'ai demandé d'être claire, Lyly, râlé-je. Alors évite de tourner autour du pot !

Pas de ça entre nous !

— Il l'est tellement que tu pourrais réellement craquer pour lui, si tu vois ce que je veux dire.

Ah. Ok.

Sauf qu'elle semble si nerveuse que son explication me paraît un peu simpliste. Surtout que...

— Je suis assez grande pour gérer et tu le sais, m'agacé-je impulsivement. Je ne te comprends...

— Arrête, me coupe-t-elle fermement, saisissant mes deux mains pour les étreindre. Tu me connais, je ne ferais jamais rien pouvant te desservir.

Effectivement. Il n'y a personne au monde en qui j'ai davantage confiance qu'elle. Ce fait remit à sa juste place – loin devant n'importe quel homme de l'univers – je me calme instantanément. Opinant légèrement, je suis désormais attentive à la suite.

— Le plus important à savoir, c'est...

— Hé, vous êtes ici, nous coupe le concerné en toquant trois petits coups.

Bordel de dieu !

Sursautant en retenant mon souffle, je redresse la tête pour rencontrer le regard – toujours parfait – du sujet de notre étrange conversation. Souriant et appuyé contre l'encadrement de la porte, il tient un verre d'eau qu'il me tend aussitôt.

— Tu ne voulais rien, néanmoins je me suis dit qu'après ta mésaventure ce serait bien que tu boives un peu. Surtout que tu as parlé d'un mal de tête.

Oh. Mon. Dieu. Carly ! Tu as définitivement raison ! Il est BEAUCOUP TROP craquant !

Mon pouls s'emballe, donc vraiment, ça sent mauvais, je suis obligée de l'admettre. D'ailleurs les doigts de ma meilleure amie se resserrent une dernière fois sur les miens en signe d'avertissement alors que je me lève pour attraper la boisson.

Reste loin de lui, Tay ! me hurle-t-elle silencieusement. Nous devons finir cette conversation !

Hélas, je suis trop hypnotisée pour l'écouter pour l'instant. Cela ne peut être si grave. Je suis sûre que comme d'habitude, elle se fait trop de soucis.

***

L'autre côté de la porteWhere stories live. Discover now