Chapitre 2 - Tromperie

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Sir Gerald Hawkins, ancien corsaire britannique, était gouverneur de Nassau depuis peu. Envoyé par le roi George Ier afin de restaurer l'ordre, l'homme exerçait ses fonctions avec peine, la ville étant devenue un véritable coupe-gorge depuis que les pirates s'en étaient emparés.

- Bonjour Monseigneur, avez-vous bien dormi ? Demanda Wilbur, son fidèle valet.

Sir Gerald ouvrit les yeux avec difficulté, grognant de mécontentement. L'homme se redressa puis se leva son lit pour se rendre à sa fenêtre, souhaitant juger sous quels auspices se présentait la journée.

- Des nouvelles du Goldenhind ? L'interrogea-t-il alors que Wilbur, son fidèle valet, préparait son baquet d'eau pour sa toilette matinale.

- Ce navire a été aperçu non loin des côtes cette nuit, il devait rentrer au port en début de matinée. Assura le vieil homme en se courbant pour ramasser un linge de soie abandonné au sol, grimaçant sous l'effort.

- Parfait, tout est parfait ... Sir Gerald s'approcha pour aider Wilbur à se redresser.

- Laisse-moi ramasser, prépare plutôt ma tenue. Ordonna-t-il d'un ton faussement amical à son fidèle valet, repoussant sèchement le linge sous le lit dès que Wilbur eut le dos tourné.

Généralement perçu comme un sauveur et vénéré comme un dieu vivant, Sir Gerald dissimulait habilement sa nature hypocrite et malsaine.

- Aujourd'hui, une pendaison est prévue, n'est-ce pas ? L'interrogea-t-il en se dirigeant vers les paravents pour se changer.

- Oh oui, monseigneur, une pendaison très attendue, mais qui risque de poser problème. Grâce à Floyd Smith, nous allons pendre Duncan Blackwell, le capitaine du Black Weapon. Répondit Wilbur, ne cachant pas ses craintes entourant l'événement.

Sir Gerald tiqua, claquant la langue contre son palais tout en levant les yeux au ciel.

- Crains-tu une mutinerie ? L'interrogea-t-il avec lassitude.

Le vieil homme acquiesça en tendant les vêtements à son maître qui s'habilla prestement.

- Duncan Blackwell est en contact étroit avec Barbe Noire et Benjamin Hornigold... Trembla le valet à la simple évocation de ces noms.

- Sornettes ! Nous n'avons aucune preuve de cela. Cet homme use de ses belles paroles pour semer la peur. Gronda Sir Gerald, s'admirant dans son miroir.

- À vrai dire, Blackwell ne parle pas beaucoup ... je crois même qu'il n'a jamais échangé avec les geôliers. Si la rumeur s'avère vraie, sa mort pourrait nous porter préjudice ... ces malfrats pourraient se retourner contre nous et nos enfants. Ajouta Wilbur, exprimant ses inquiétudes.

Sir Gerald frappa du poing contre la colonne du lit à baldaquin et gronda sévèrement.

- Toi, simple valet, oses-tu me conseiller d'épargner ce... ce forban ? Rugit-il.

- Jamais je ne me permettrais ! S'exclama Wilbur.

Sir Gerald, le visage crispé, arracha son chapeau de sa tête, le pressant contre sa poitrine avec un geste brusque avant de s'éclipser d'un pas hâtif. La lourdeur de l'air pesait sur ses épaules alors qu'il maudissait déjà la chaleur moite qui l'assaillait avant même qu'il ne quitte sa demeure pour rejoindre son carrosse. Des perles de sueur glissaient le long de son front, ajoutant à son irritation croissante alors qu'il pestait entre ses dents en passant devant ses enfants, l'air renfrogné.

Dans la pièce, Suzanne, l'aînée de la fratrie, envoya un petit signe de la main à son père, qui répondit d'un faible hochement de tête, refusant d'être retardé par les adieux familiaux. Le deuil avait marqué leur foyer lorsque la mort avait emporté sa femme en même temps que leur fils unique.

Beyond The SeasWhere stories live. Discover now