Chapitre 4 - Réalité

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Et ma vie dans tout ça ? Elle était mise en pause.

Une fois par mois j'avais le droit de rentrer chez moi et de reprendre ma vie à la normal. Ce qui était bizarre, c'est que lorsque je rentrais, je me réveillais sans cesse dans mon lit, au petit matin. Une nuit de sommeil, équivalaient à un mois passé dans cette maison. Si bien que chaque nuit était le retour au calvaire. Je tentais, chaque soir de repousser cette phase de sommeil. J'ai essayé, plusieurs nuits de ne pas dormir, mais le lendemain la fatigue m'affaiblissait et je ne pouvais plus y résister.

De ces nuits d'acharnements, j'en gardais des marques bizarrement. Le matin j'avais souvent de gros cernes, comme si j'avais fait une nuit blanche. Je perdis en vision aussi. Je devais porter des lunettes en cours. La journée à l'école, j'avais des migraines ou des courbatures dans tout le corps.

A ce moment de ma vie j'étais en étude supérieur, à l'université. J'aimais bien ce que je faisais et j'étais plutôt bon. A vrai dire, j'étais un jeune comme les autres, libre, qui faisait ce qu'il veut, entouré d'amis et qui ne pensaient à rien d'autre qu'à achever ses études et passer du bon temps. J'étais, ce que qualifiait l'une de mes professeurs, un esthète. Je dois avouer que j'étais tout le temps bien habillé, au grès des dernières tendances. Je n'aimais pas ressembler aux autres, je voulais me sentir libre de porter ce que je voulais. Je n'avais pas l'habitude de me balader en jogging ou comme tous les autres.

Mais ces nuits agitées perturbaient mes études et surtout mes capacités de mémorisation et d'attention. Je pensais tout le temps à la prochaine nuit et à ce qui allait se passer. Je n'avais même plus la force de m'habiller, le matin avant d'aller en cours. Peu à peu je me mis à porter des vêtements amples, souvent noirs ou du moins sombres. Jogging, basket, teeshirt ou sweat noir ample. Cela me permettait de cacher certaines marques et mon malaise. A vrai dire, c'était aussi la solution de facilité. Je n'avais plus gout ni force à essayer de m'habiller. Mes pensées étaient toutes autres et c'était déjà beaucoup.

J'avais même des hallucinations. Il m'arrivait, parfois, de voir l'ombre d'Arès dans des coins de ma salle de classe, dans un miroir ou sur le chemin. Il me hantait. Je le voyais partout, tout le temps. Je revivais tous les soirs le même cauchemar qui se prolongeais la journée avec ces hallucinations.

Tout mon entourage avait remarqué mes traits et marques de fatigue, tout comme mon manque d'énergie. Je le justifiais en parlant de la saison, que c'était un moment fatiguant et que j'étais soumis aux insomnies. L'excuse était recevable par tous, même s'ils s'inquiétaient de me voir dans cet état.

Je ne pouvais pas leur dire ce qu'il se passait réellement.

Comment allaient-ils réagir ? Je ne sais pas. Je ne préférais même pas y penser. Alors je gardais tout pour moi. Je devenais plus distant avec mes amis. La journée, je ne leur adressais presque plus la parole. J'étais avec eux, mais je ne disais rien. J'étais dans un mal-être profond. Lors de nos pause déjeuner, je ne m'alimentais presque plus. Je me demandais tout le temps si je méritais cette nourriture et donc je la repoussais. Je prétextais aussi des excuses pour ne pas sortir le soir avec eux ou ne pas aller chez les uns et les autres entre deux cours ou après les cours. Je m'enfermais dans une sorte de solitude. Je me privais de m'alimenter, de mes amis et ma famille. Mon regard devenait de plus en plus mystérieux et noir. Il était là, Arès était là. Dans ma tête, tous les jours, tout le temps. Je lui étais fidèle.

J'étais convaincu que c'était souffrir pour se libérer. Mon entraînement allait permettre de rendre cette utopie une réalité. De vivre dans un monde débarrassé de magie ou les deux royaumes qui entourent notre monde auraient disparu.

Quand je doutais ou que j'étais au plus bas, je repensais à Arès qui me criais « eh l'exception, tu fais ça pour ta destinée. Alors soit tu donnes tout, soit tu niques tout. A toi de voir à quel camp tu veux appartenir ». J'étais captivé par cette phrase qu'il me répétait à chaque fois que j'échouais. C'était ma motivation dans ces jours compliqués. Il était omniprésent dans mon esprit et je ne pensais qu'à lui et ses paroles.

Je l'idolâtrais.

ExceptionWhere stories live. Discover now