40. « Mais vous l'aimez »

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Ce soir, tu es enfin en vacances de Noël.

Je ne cesse de me le répéter depuis que je suis arrivée à l'école en début d'après-midi. Dernier jour de partiel avant un repos bien mérité. Mais c'est sûrement le jour le plus stressant pour moi. Rien à voir avec les examens que j'ai passé toute la semaine. Ce matin, je dois présenter mon projet photo devant un jury constitué de Gaël, mon professeur d'Arts et Visuel, mais également devant un professionnel de la photo de Toulouse et pour finir, devant deux élèves de l'école que je ne connais pas. Ces deux élèves sont supposés découvrir qui je suis à travers mes clichés.

Je suis la suivante sur la liste et je suis loin d'être rassurée. Une fille est sortie de la salle les larmes aux yeux. Pas assez personnel. Voilà ce qu'on lui a dit. Mais qu'attendent-ils ? Qu'on se dévoile entièrement au risque de trop nous exposer ? Je refuse et particulièrement à cause de Oli. Je prie pour que personne ne découvre qu'il est sur presque toutes mes photos. Qu'on découvre notre relation est ma hantise et surtout depuis que j'ai réalisé qu'il ne serait pas une petite relation de passage. Du moins, on ne dit pas « je t'aime » à quelqu'un qui ne sera que de passage.

Je suppose que c'est à toi, me dit une voix au-dessus de ma tête.

Je lève les yeux et découvre Aiden, un garçon de mon groupe, un sourire sur les lèvres.

Bon, il n'a pas l'air traumatisé. Il a probablement assuré ou alors il a limité la casse.

Je me lève, serrant mon cahier contre moi et me dirige vers la porte de la salle.

Stresse pas trop, je suis sûr que ton projet va être génial, me souffle Aiden en me faisant un clin d'œil.

On ne s'est jamais parlé, mais soit. Je hoche la tête et pénètre dans la pièce.

Quatre paires d'yeux me scrutent et aussitôt mon estomac se serre. Je dépose mon cahier sur la table et recule en essayant d'être le plus zen possible.

Il est trop tard pour paniquer. Maintenant que c'est fait c'est fait.

Le photographe, du moins je présume, me regarde avec un léger sourire, puis pose son regard sur mon œuvre. Même pas un bonjour, de personne.

Mademoiselle Blaze. Un cahier assez simple, du papier classique et des clichés sous format Polaroïd. Pourquoi ? me demande-t-il en me fixant intensément.

Je pourrais faire dans ma culotte juste avec ce regard.

Qu'est-ce que j'en sais moi ? J'avais ce cahier sous la main et j'ai pas les moyens pour un appareil plus cher. Ça te va, mon pote ?

Non, je ne peux pas dire ça.

Le format Polaroïd est authentique et vintage. Deux adjectifs qui me qualifient assez bien. Ce projet est supposé me représenter, alors autant commencer par le choix de l'appareil.

Je suis pas une boss ? En tout cas, ma réponse semble le satisfaire car il sourit avant d'ouvrir mon cahier et d'en parcourir les pages.

Même de loin, je parviens à deviner quelles photos il regarde. Son regard s'arrête sur un cliché de Oli assis par terre, regardant un dessin animé que je l'ai obligé à regarder. Il a fini par succomber au charme de Mulan et était même heureux quand Shang est venu chez la famille Fa, à la fin du film. Heureusement j'ai pris la photo de dos, et d'assez loin. Je doute qu'on puisse le reconnaître.

Pendant de longues minutes, le photographe et Gaël examinent chaque photo, sans me jeter un coup d'œil. Puis soudainement, ils tendent le cahier aux deux élèves. Une fille assez petite, asiatique, qui a l'air absolument adorable et un garçon qui semble assez détaché de mon travail.

Poliroid (Bigflo & Oli)Kde žijí příběhy. Začni objevovat