Pepperonis for Christmas [TER...

By 1ecrivaine_en_herbee

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Chute après chute, Jaëlle emménage à Grenoble pour son master de psychologie clinique. N'ayant pas pu valider... More

Avant-propos
Prologue
1- A
2- Al
3- All
4- All I
5- All I w
6- All I wa
7- All I wan
8- All I want
9- All I want f
10- All I want fo
11- All I want for
13- All I want for ch
14- All I want for chr
15.1- All I want for chri
15.2- ELIO
16- All I want for chris
17- All I want for christ
18- All I want for christm
19.1- All I want for christma
19.2- ELIO
20- All I want for christmas
21- All I want for christmas i
22- All I want for christmas is
23- All I want for christmas is y
24.1- All I want for Christmas is yo
24.2- ELIO
25- All I want for christmas is you
Epilogue

12- All I want for c

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By 1ecrivaine_en_herbee

J-20 / Vendredi 5 décembre

Assise dans la salle à manger, je jette un regard désespéré à Michel : se replonger dans les cours, c'est tellement dur ! Depuis trois heures, j'essaie de me remettre dans mes fiches de l'année dernière, mais rien ne rentre dans ma fichue cervelle. Peu importe le nombre de fois que je relis les phrases, j'ai l'impression de les découvrir encore et encore. Pourtant, ce n'est pas faute d'avoir assisté à chacun de mes cours magistraux. Je pose ma joue contre mon poing et me mets à chantonner l'air emblématique des Aristochats : Tout le monde veut devenir un cat.

C'est fou ce que cette chanson peut rester en tête ! Et bien mieux que les cours, évidemment...

Mon téléphone vibre, probablement un message d'Elio, mais je le tourne face contre la table. Pas de distractions ! Je tente de me concentrer de nouveau, mais c'est peine perdue. Je ferme mon stylo ainsi que mon carnet de notes et laisse mon esprit divaguer. Depuis le début de la semaine - et notre dernière sortie par la même occasion -, nos échanges par textos se sont multipliés, si bien que je ne me souviens plus d'une journée où je n'aurais pas eu de ses nouvelles. La facilité avec laquelle il est entré dans ma vie et dans mon quotidien me déconcerte. Pourtant, je n'essaye pas de ralentir la cadence de notre relation, notre équilibre me convient. Lui tente par tous les moyens de me faire apprécier les fêtes de fin d'année, tandis que je trouve des excuses plus stupides les unes que les autres pour les esquiver. Honnêtement, je me prends de plus en plus au jeu et ça m'amuse vraiment, preuve qu'Elio est assez fort. Je mange même les chocolats de mon calendrier à présent !

Profondément plongée dans mes pensées, je suis interrompue par une sonnerie stridente qui retentit dans tout l'appartement. A contrecœur, je m'extirpe de ma position étrange en déplaçant la table dans un horrible grincement, ce qui ne manque pas de faire dresser une oreille à mon lapin, puis me traîne jusqu'à l'entrée. J'ai à peine le temps de tourner la poignée que le battant s'ouvre, me poussant avec une délicatesse imperceptible contre le mur. Elio entre sans me remarquer et appelle :

— Jaëlle ? T'es où ?

— Derrière toi, soufflé-je en refermant la porte pour me libérer du sandwich dans lequel il m'avait coincée.

Fais comme chez toi surtout ! Il pivote sur les talons et je vois ses yeux s'illuminer de malice.

— Oh, je t'avais pas vue, tu te fonds si bien dans le décor, rit-il.

— Tu devais pas garder Conan ? je l'interroge en ignorant délibérément sa pique.

— Marine et Samuel sont rentrés plus tôt, alors je me suis permis de passer... s'explique-t-il soudainement gêné.

Il referme la porte doucement, se balançant d'un pied à l'autre. Sa main triture ses cheveux et il me sourit timidement. Comprenant qu'il attend que je l'invite réellement à entrer, je me dirige vers la cuisine et lui propose de me suivre. Il s'exécute, puis s'avance vers Michel qui le regarde avec de grands yeux malicieux et lui gratouille le bout des oreilles pendant que je le surveille d'un œil. Il scrute mon salon comme s'il cherchait une faille, je hausse un sourcil.

— Tu cherches quelque chose ?

Il s'approche simplement de mon calendrier et vérifie soigneusement que les cinq cases ouvertes soient vides. Bien sûr, puisqu'il est là, autant en profiter pour s'assurer que je ne lui ai pas menti par message !

— Non c'est bon, me répond-il d'un air satisfait.

Il est fier de lui, le bougre.

— Tu veux un thé ? lui proposé-je

— T'es sûre d'avoir vingt-deux ans ? Parce que là, ta boisson te rajeunit pas...

— Hé, c'est pas ringard ! m'indigné-je

— Bon, d'accord, d'accord, capitule-t-il en levant les mains. Je m'en contenterai !

Il se moque avant d'aller s'asseoir à ma table de bois quand un bruit de succion interrompt mon geste vers la théière, et me fait me retourner. Elio me regarde sans que je ne parvienne à déterminer s'il est en colère, agacé, ou désespéré. Je repose le plateau où trônent deux tasses - miraculeusement - encore intactes sur le plan de travail en l'interrogeant :

— T'as vu un monstre ?

A peine les mots échappés de mes lèvres, une odeur nauséabonde me parvient et je comprends son air ahuri. Flûte de zut. Michel avait encore décidé de se soulager loin de son foin, et je ne l'avais pas remarqué. Je crois que j'aurais préféré mille fois m'y être assise à sa place. A croire que le ridicule est un don...

Je m'empresse de prendre de l'essuie-tout, et vais nettoyer la chaise qu'il a surprenamment bien vite délaissée. Ce faisant, je l'observe du coin de l'œil. Je ne peux pas le laisser avec une aussi grosse tâche sur les fesses quand même. Joignant la parole à la pensée, je lui propose d'aller nettoyer son jean pour ne pas paraître trop étrange et m'excuse mille fois pour ma bourde. Il part silencieusement dans la direction que je lui indique. Il semble avoir perdu son humour et son joli sourire avec...

Quelques minutes s'écoulent, accompagnées du bruit de l'eau qui circule dans les tuyaux, pendant que je nettoie nerveusement la moindre petite tâche osant croiser mon regard. A choisir : la paranoïa ou la honte ? A genoux devant mon meuble de télévision, je frotte avec frénésie une goutte de thé séchée lorsque la voix d'Elio me fait sursauter :

— T'as pas de sapin ?

Je me retourne et laisse échapper un soupir de soulagement en constatant que, malgré son air médusé, il a retrouvé une posture décontractée ainsi que sa petite risette irrésistible.

— Non j'ai pas de sapin, et alors ? répliqué-je du tac au tac en levant les yeux au ciel.

Il sait que Noël n'est pas ma tasse de thé. Pourtant, il ne remarque pas mon malaise et continue, enthousiaste.

— Il faut absolument remédier à ça ! Demain ?

— Peux pas, je bosse, rétorqué-je, ravie d'avoir une chance d'échapper à cette horrible corvée on ne peut plus commerciale.

— Pas jusqu'à minuit j'espère ! s'indigne-t-il.

— Non quand même ! Je finis à seize heures.

Je me retiens de me frapper le front de désespoir, mais ce n'est pas l'envie qui manque. Et voilà que je viens de lui tendre la plus longue perche jamais connue. Qu'est ce que je suis courge quand je m'y mets...

— Parfait, je passerai te chercher alors !

Il pouffe de rire, mon regard s'attarde sur les fossettes creusées sur ses joues colorées et je me prends une baffe. Les mêmes que Thomas... Les larmes me montent aux yeux et je me mords la lèvre jusqu'au sang en tentant de les retenir. Ses éclats de rire cessent et je l'entends me demander si je vais bien. Dans ma tête, l'image de mon cousin flotte, me maintenant fermement dans le passé. Pourquoi lui et pas moi, hein ? Je secoue la tête pour tenter de m'en libérer, mais rien n'y fait. Doucement, Elio pose sa main sur les miennes, jusqu'alors entrelacées sur la table. Son geste me ramène à la réalité et m'électrise un court instant. Par réflexe et surprise, je me défais de ses paumes en reculant contre le dossier de ma chaise et lui adresse un sourire reconnaissant. Son visage reste soucieux et je tressaille lorsque sa voix grave me questionne faiblement :

— Ça va ? Tu es pâle.

— Oui, oui, ne t'inquiète pas ! m'empressé-je de lui répondre, aussi convaincante que possible.

Je repense alors au thé, toujours en train d'attendre son eau sûrement refroidie depuis le temps.

— Tu veux toujours de ma boisson de grand-mère ?

— Sers toujours, ça me donnera du courage pour le rideau...

Je fronce les sourcils, le temps que mes neurones se connectent et que l'allusion se fasse. Je m'esclaffe en me levant, avant de me diriger vers la cuisine pour remettre l'eau à chauffer. En attendant le déclic de ma bouilloire, je m'assois sur le plan de travail et observe Elio, penché sur son sac. Il farfouille un instant à l'intérieur, puis se retourne vers moi, en brandissant fièrement une boîte à outils. Il se trimballe avec un kit de bricolage dans son cartable : pourquoi pas ?

— Il est où ?

— Euh... Peut-être derrière le canapé, bredouillé-je en rougissant.

Son rire se répercute dans mon cœur et relève les commissures de mes lèvres. Il quitte mon champ de vision en parfaite synchronisation avec ma bouilloire. Je saute du plan de travail, m'en empare et prépare un infuseur aux deux thés, menthe et cannelle. Je le rejoins dans le salon et dépose le plateau aux côtés de mes feuilles de cours que je constate toujours en vrac. C'est qu'elle aura été bien vaine ma séance de révisions ! Je pouffe toute seule et déclare le goûter de la fin de soirée servi, en regroupant rapidement les fiches de révisions en un tas atrocement désordonné. Mes pensées dérivent vers ma mère, qui aurait certainement piqué une crise, mais Elio m'empêche de me noyer dans mes souvenirs en me demandant de démêler le rideau. Curieuse de la raison de sa demande, je le rejoins et lui offre un sourire on ne peut plus hypocrite en découvrant l'ampleur du nœud. Un espèce d'amas de tissu beige est enroulé autour du pied du canapé et de la lampe, avec ce qui semble être des extrémités dépassant de tous les côtés. Désespérée par moi même, je m'agenouille pour m'atteler à la lourde tâche que Monsieur vient de me confier. Pendant un instant, je crois le nœud définitif, mais Michel -ce génie- surgit des entrailles du rideau, un angle coincé entre les dents. Mes yeux s'écarquillent et je me jette sur mon pauvre lapin pour récupérer le morceau.

— Tu reprends quand les cours ? m'interroge Elio dans mon dos.

— En janvier, mais j'arrive pas à bosser... soupiré-je.

Je tire sur l'angle du tissu toujours dans ma main et pousse un petit cri de victoire quand le nœud cède enfin, causant une crise cardiaque à mon lapereau qui bondit sur plusieurs mètres.

Je croise le regard du jeune homme et nous craquons, laissant exploser notre hilarité à l'unisson. Après quelques minutes, je sèche les larmes qui naissent aux coins de mes yeux et tire le rideau démêlé jusqu'à Elio, qui est debout sur une chaise sous ma tringle défectueuse. Il s'affaire quelques instants supplémentaires puis attrape le tissu que je lui tends pour le faire glisser sur la baguette, qu'il raccroche enfin sur la tige en fer enfoncée dans le mur. J'allume ma télévision et lance une chaîne de radio pendant qu'il range ses outils, puis nous nous affalons sur le canapé comme les deux cachalots que nous sommes, dans un soupir commun.

— Voilà une bonne chose de faite ! s'exclame Elio.

— Merci, tu m'as sauvé la vie. Je crois pas que le proprio aurait apprécié que je lui rende l'appartement avec un trou dans le mur.

— Je ne pense pas, non.

On pouffe un instant, puis son regard redevient sérieux et me scrute avec hésitation. Je lui souris timidement, l'incitant à poursuivre et il baisse les yeux sur ses mains.

— Tu vas rentrer chez toi pendant les vacances ?

— Pourquoi je le ferais ?

— Bah c'est Noël.

Son air perplexe me prend de court, tout comme sa question. Il est vrai que nous parlons rarement de nos familles et je sens la discussion dériver vers ce terrain glissant sans peine. Je me détourne de lui et fixe l'écran face à nous qui diffuse Fever, nouveau morceau d'Angèle et Dua Lipa que j'entends sur toutes les fréquences ces temps-ci. La mélodie me distrait quelques secondes, mais la vague de pression qui m'écrase la poitrine me ramène rapidement à la question d'Elio.

Célébrer Noël. Avec ma famille. Un rictus nerveux secoue mes épaules, que je hausse simplement.

— On fête pas tellement Noël, inventé-je.

Pas dupe pour un sou, il m'examine de ses iris orageux puis hoche la tête sans revenir sur mon mensonge.

— Et toi ?

— Je reste ici pour les fêtes. Mes parents ont déménagé au Brésil il y a quelques années, j'essaye de leur rendre visite autant que possible mais avec les examens en décembre et janvier, je préfère rester à Grenoble.

— Oh...

Je me mords la joue, ne sachant pas quoi dire devant son air nostalgique.

— On aura qu'à le faire ensemble ? propose Elio innocemment.

— Rêve toujours, ris-je. Je t'ai dit que je ne faisais pas Noël.

— Tu fais Hanoucca, c'est ça ?

Je le regarde incrédule, cherchant la blague.

— Je suis pas juive, précisé-je les yeux plissés.

Une main devant la bouche, il tente vainement de masquer un rire avant de le laisser sortir plus franchement.

— Je sais, mais t'aurais vu ta tête !

— C'est pas un problème d'être juif.

Il fronce les sourcils, saisissant probablement que sa petite blague ne m'a pas amusée. Pourquoi ça aurait dû m'énerver ou me choquer ? C'est bien d'être juif !

— Je sais Jaëlle, je n'ai jamais dit que ça l'était, se justifie-t-il nerveusement. Je me payais ta tête, c'est tout.

Mes yeux s'écarquillent et j'entrouvre la bouche, formant un "o" parfait. Mes joues rougissent alors que je m'enfonce dans le canapé. Et dans mon ridicule au passage. Comprenant que j'ai pris sa blague au premier degré, le rire d'Elio s'élève dans la pièce, brisant le silence gênant qui s'y était installé et écrasant ma fierté au passage. Mes lèvres s'étirent finalement dans un sourire amusé devant le spectacle que m'offre le jeune homme qui se tord sur mon canapé.

Il faut croire que le ridicule a du bon.

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