À cœur perdu

By NPaanda

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Joachim ne ressent rien, et ce, depuis un tragique événement qui s'est produit trois ans auparavant. Depuis... More

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Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 13
Chapitre 14 - Partie 1
Chapitre 14 - Partie 2
Chapitre 15
Chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 19
Chapitre 20
Chapitre 21
Chapitre 22
Chapitre 23
Chapitre 24
Chapitre 25
Chapitre 26

Chapitre 16

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By NPaanda

 Joachim

Je cours aussi vite que je le peux. Émilie a fait tellement de bruit en dévalant les escaliers que Gabin a tout de suite compris qu'on se foutait de sa gueule. Au moment où j'arrive dehors, je vois Émilie, tremblante contre la voiture, Gabin à terre et... Kelly avec un taser dans la main. Émilie la remercie en haletant tandis que Kelly lui sourit. Je me précipite vers Émilie.


— Est-ce que ça va ?

— Oui, il n'a pas eu le temps de faire quoi que ce soit.


Je me tourne vers Kelly en fronçant les sourcils.


— Ne me fais pas cette tête-là ! implore-t-elle.


Je prends le poignet d'Émilie et je la conduis à l'intérieur de l'immeuble sans un regard pour Kelly, mais celle-ci peste derrière mon dos.


— Qu'est-ce que tu peux être rancunier !

— J'ai mes raisons, il me semble.

— Laisse-moi t'expliquer.

— Je m'en fous, Kelly. Rentre chez toi.

— C'est comme ça que tu me remercies d'avoir sauvé ta copine ?


Au moment où je m'engouffre dans l'immeuble, elle peste de plus belle :


— Comment je vais me débarrasser de Gabin, moi ?

— Démerde-toi, vous vous connaissez bien à ce que j'ai pu comprendre.


Nous rentrons quelques minutes plus tard dans l'appartement et je ferme à clé derrière nous. Émilie s'assied sur mon canapé en soupirant.


— La curiosité me perdra.

— Je t'avais dit de te cacher.

— J'ai voulu le faire, mais sûrement trop tard.

— Tu m'étonnes, en plus tu es aussi discrète qu'un poids lourd.


Elle lève les yeux au ciel et tente de rire, mais je sens qu'elle est encore sous le choc. Savoir que son ex qui la frappe est toujours à ses trousses, ça doit être un stress permanent et quotidien. Je m'assois à ses côtés et je lui demande :


— Est-ce que ça va aller ?

— Je pense que tant qu'il ne sera pas mort, ça n'ira jamais.

— T'as de la marge avant qu'il meure. Il a quoi ? Vingt-cinq ans ?


Elle soupire.


— Vingt-neuf, malheureusement. Tu me diras, je préfère que ça soit un jeune qui abuse de moi plutôt qu'un papi.


Elle tente de rire, mais je ne peux que me sentir mal à l'aise.


— Je sais que j'ai dit que je respecterai tes choix, mais... ça me met hors de moi qu'il continue à avoir cette emprise sur toi.

— Tant que tu es là, je sais que je suis en sécurité.


Sa confidence me fait plaisir et j'acquiesce.


— Je fais de mon mieux en tout cas.


Après un petit moment de blanc non déplaisant, elle se tourne vers moi.


— Tu sais quelle somme ton père va te donner ? Il manquera combien ?

— On pensera à ça demain, pour l'instant je te propose qu'on décompresse.

— Avec Gabin en bas de l'immeuble ?


Je hausse les épaules tandis que ses épaules s'affaissent.


— On ne sera jamais en sécurité ici, Joachim.

— Et tu proposes quoi d'autre ?

— On a qu'à s'enfuir.

— Ouais, c'est ça. On n'est pas dans un film là, Émilie.

— Je ne plaisante pas, on serait débarrassé de Gabin et d'Antonio pour toujours !


Je pose mes mains sur ses épaules.


— Bon écoute, là tu pars en couille, tu dis n'importe quoi. On ne pourra pas échapper à Antonio comme ça, et tu le sais très bien.

— Ce Giovanni a bien réussi lui à ce que j'ai compris.


Je retire mes mains de ses épaules comme si elles m'avaient brûlé. Émilie est tout de suite alertée par mon comportement.


— Tu ne comptes toujours pas me dire qui c'est, hein ?


Je soupire et fronce les sourcils.


— J'en suis incapable, je ne sais plus qui c'est...

— Comment ça tu ne sais plus ?

— Je pensais le connaître, mais plus les jours passent, plus j'apprends des choses sur lui qui...

— Te déçoivent ?


Je hoche la tête.


— Je pensais que s'il avait des problèmes, il m'en parlerait, mais... Il paraissait toujours si heureux et souriant que... Je ne me suis douté de rien.


Elle passe une main rassurante dans mon dos tandis que je me perds dans de vieux souvenirs qui me hantent encore aujourd'hui.


***


Plus tard dans la journée, je suis sur le canapé avec Émilie devant une série. C'est dur de faire comme s'il ne s'était rien passé, comme si je n'avais pas une épée de Damoclès au-dessus de la tête, qui risque de tout emporter avec elle une fois qu'elle aura traversé mon corps et sans doute libéré tous mes pêchés à la vue de tout le monde. Si je meurs, comment se souviendra-t-on de moi ? On se remémorera un jeune homme froid et distant ou comme la personne que j'étais avant ces trois ans ?

Émilie pose une main sur ma joue ce qui me fait sursauter.


— Toi, tu rumines...

— Pourquoi tu dis ça ?

— Tu mords encore ton piercing.


J'esquisse un léger sourire lorsqu'elle retire sa main.


— C'est rien.

— Oui, tu dis toujours ça.

— Parce que c'est le cas.

— Non, c'est parce que tu as tellement peur de faire confiance à quelqu'un que tu gardes tout enfoui.

— Je n'ai pas peur.

— Non seulement tu as peur, mais en plus tu mens mal.


Elle m'agace. Ça m'énerve qu'elle puisse savoir ce que je ressens juste en me regardant. Elle passe sa main sur le haut de mon crâne pour venir jouer avec mes cheveux. Je ne sais plus à quel moment nous avons commencé à être aussi proches. Peut-être quand on a commencé à être liés par la dette de Giovanni ? Ou avant ?

Des coups sur ma porte me sortent de mes pensées. Je me lève et vais ouvrir. Si c'est encore Gabin, je jure que je le pends par les couilles au lustre au-dessus des escaliers. Pourtant, je suis surpris de ne trouver personne devant ma porte. Je baisse les yeux et remarque qu'une boîte en carton est sur mon tapis d'entrée. Je la ramasse en arquant un sourcil. J'entends Émilie s'impatienter pour remettre la série en route :


— C'est qui ?

— Une boîte.

— Hein ? Une boîte ?


Je referme la porte et m'assois sur le canapé en observant l'objet.


— Tu penses que ça va m'exploser à la figure si je l'ouvre ?

— Pourquoi ça exploserait ?


Je hausse les épaules en secouant la boîte.


— Peut-être que Gabin n'a pas aimé être tasé en bas de l'immeuble ?

— Il n'est pas assez intelligent pour penser à t'envoyer un carton avec une bombe à l'intérieur. Il répond par les coups, c'est plus son genre.


Je réprime un sourire puis commence à ouvrir le carton. À l'intérieur se trouve une clé USB rouge. Je fronce les sourcils.


— Mets-la dans ton ordinateur !

— Et s'il y avait un virus dedans ? Je tiens à mon ordi, moi !


Elle lève les yeux au ciel.


— Arrête ! Toi, le sombre Joachim, tu tiens à quelque chose ?


Je soupire.


— Ok c'est bon, je vais le faire.


Je m'exécute. Une fenêtre s'ouvre, m'indiquant qu'il n'y a seulement qu'un fichier vidéo dans cette clé. Curieux, je l'ouvre tandis qu'Émilie se rapproche de l'écran.

Je vois d'abord un écran noir, puis soudain, un documentaire sur l'hôpital psychiatrique « Denver ». On aperçoit des infirmiers et des psychologues parler chacun leur tour. Je serre les poings au fur et à mesure que la vidéo avance. On se paie ma tête ? Pourquoi m'envoyer l'endroit où...

Mes pensées sont interrompues par un nouvel écran noir, puis la pièce de vie, que je reconnaîtrais entre mille. Je distingue, au fond de celle-ci, une femme aux cheveux décoiffés, assise sur un fauteuil roulant. Sa tête est baissée et elle fixe le sol avec ennui. Émilie ne comprend pas tout de suite de qui il s'agit, et bien sûr, elle ne peut pas savoir. Mais moi, je comprends très vite et je sens déjà la colère me submerger.

Antonio apparaît sur l'écran avec un sourire trompeur et chaleureux. Si on ne le connaissait pas, on pourrait tomber dans son piège. Mais cet homme est tout sauf chaleureux, c'est pourquoi je me tends lorsqu'il approche la caméra vers le fond de la pièce.


« — Madame Alves ? Bonjour ! »


Je ne peux m'empêcher de lâcher un « enfoiré » entre mes dents. Émilie fronce les sourcils.


« — Je suis un ami de Giovanni, je suis ravi de vous rencontrer ! »


Elle lève la tête et scrute Antonio qui lui sourit. Elle acquiesce.


« — Giovanni, mon petit... Pourquoi tu as fait ça ? 

— Il vous a causé beaucoup de soucis à ce que je vois.

— Giovanni... »


Elle se met à répéter son prénom de plus en plus fort, jusqu'à ce qu'elle se mette à hurler et gesticuler sur son fauteuil. Antonio couvre sa voix pleurante par un avertissement :


« — Comme tu le vois, je sais où est ta mère. Je vais lui tenir compagnie quelques jours dans la semaine, jusqu'à ce que tu m'ais rendu mon argent. Rah... Mais tu sais, mon petit Giovanni... Tu me connais, j'ai très peu de patience... Si elle ne s'arrête pas de hurler, je vais être obligé de... »


Il sort un couteau de sa poche et entaille sa main, ce qui la fait taire quelques secondes, pour finalement d'autant plus hurler. Antonio me fait son plus beau sourire.


« — Ne m'oblige pas à aller plus loin. Rends-moi l'argent, le temps presse. Tic... Tac... Tic... Tac... »


Une infirmière arrive en courant et demande ce qu'il se passe. Antonio cache sa caméra et répond d'un ton horrifié :


« — Mon dieu je ne sais pas ce qu'il lui a pris, j'étais venu la voir et elle s'est mise à hurler et à se mutiler... Je n'ai pas su quoi faire... »


La vidéo s'arrête, laissant un silence pesant dans l'appartement. Émilie est la première à le briser :


— Qui... Qui est cette femme ?


Je me lève et frappe sur la première chose que je vois : un mur. Celui-ci n'étant pas très épais, puisqu'il sépare ma chambre de la salle de bain, il s'effrite sous mes doigts désormais blessés.


— C'est la mère de Giovanni, c'est ça ?


Je frappe encore tandis qu'Émilie sursaute.


— Joachim arrête !


Je ne l'entends pas, je ne veux plus l'entendre. Antonio a déclaré la guerre, il a osé s'en prendre à...

Je sens les doigts d'Émilie s'enrouler autour de mon bras pour l'empêcher de frapper une nouvelle fois dans quelque chose. Sans me lâcher, elle me demande, apeurée :


— Joachim, dis-moi la vérité.


Lui dire la vérité ? Mettre des mots sur ce que je contiens depuis trois ans ? Comment pourrais-je sans me briser en même temps ? Les seuls mots qui parviennent à passer mes lèvres sont :


— Je vais le buter.

— Attends, tu n'as pas les idées claires... Lui et sa bande sont armés jusqu'aux dents... Tu... Tu ne sais même pas où le trouver ! Joachim assieds-toi et réfléchis juste cinq minutes...

— JE VAIS LE TUER !


Émilie se met à crier plus fort que moi :


— JOACHIM STOP !


Je la regarde, « enfin » pense-t-elle sûrement trop fort. Je lis dans ses yeux verts qu'elle a peur. Peur de moi ? Je respire comme un animal sauvage, j'ai les poumons en feu comme si j'avais couru pendant deux heures sans m'arrêter. Mon corps est tendu à l'extrême et mes poings sont en sang. Tandis que j'essaie de me calmer, je la vois chercher la trousse de secours dans ma salle de bain, la même que j'ai utilisée pour soigner les dégâts que Gabin lui avait faits. Sans un mot, mais toujours avec cette peur encrée dans ses yeux, elle attrape mon poing et commence à le désinfecter et le soigner. Je ne dis pas un mot, la regarder faire me fait penser, l'espace d'un moment, à autre chose. J'ai toujours cette colère qui rugit encore en moi, mais pour une raison que je ne comprends pas encore, savoir qu'elle n'a eu ne serait-ce qu'une seconde peur de moi, m'oblige à me contenir un minimum.

Une fois mon poing soigné, elle range la trousse, toujours sans ne rien dire. Je reste debout au milieu de la pièce, perdu avec les images toutes fraîches de la vidéo dans ma tête.

Émilie revient et respire un grand coup avant de me dire d'une voix douce, mais légèrement tremblante.


— Je sais que tu me caches énormément de choses, Joachim. Je sais aussi que tu ne donnes pas ta confiance à n'importe qui. Par contre, je ne sais pas quel est ton lien avec cette femme, mais...


Elle pose deux doigts sur ses lèvres, marquant une pause pour chercher ses mots.


— Antonio est une pourriture et je rêverai de le voir mourir dans la souffrance et la solitude.


Elle semble encore retournée par la vidéo et ma réaction.


— Mais... s'il te plaît, ne te lance pas en quête de vengeance. Il n'attend que ça, n'entre pas dans son jeu !


J'allais répondre, les poings de nouveau serrés, mais plus douloureux puisque l'adrénaline commence à s'atténuer lentement, mais Émilie m'en empêche :


— Je refuse de te perdre. Paie ta dette, je t'aiderai, tu peux compter sur moi. Mais ne meurs pas, Joachim. Tu as beau être toujours mystérieux et indifférent, tu n'es pas invincible.


Elle s'avance vers moi et ses confidences ont l'air beaucoup plus réelles lorsqu'elle encre ses yeux verts dans les miens.


— Ne meurs pas, promis ?


Je reste silencieux quelques secondes, le temps d'encaisser ce qu'elle vient de me dire. Elle tire sur le bas de mon t-shirt comme le ferait une enfant pour qu'on l'écoute. Je relève alors mes yeux vers elle tandis qu'elle me repose la question :


— Promis ?

— Promis.

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