Jack.
J'enfile mon gros sweat sombre et ne prends même pas la peine de coiffer mes cheveux rebelles, que je n'ai pas coupés depuis bien trop longtemps. Rien à foutre. Je cache mon visage cerné et meurtri sous mon épaisse capuche, et rejoins l'étage du dessous pour me barrer de cette baraque, qui me rappelle chaque jour que je ne suis pas à ma place.
Une femme aux cheveux raides et coupés au carré m'attend à l'entrée. Sa mine épuisée en dit long sur l'inquiétude qu'elle se fait pour moi quotidiennement, tout comme ses nombreux soupirs qui me montrent qu'encore une fois je suis sur la mauvaise voie. Cette femme essaye d'être ma mère depuis bien trop longtemps. Elle aurait dû comprendre depuis un bout de temps déjà, que ce qu'ils m'avaient tous imposés était irrattrapable.
- Jack...Enlève-moi cette capuche tu veux?
Je soupire mais lui obéis tout de même, madame Mickelson est l'une des rares personnes à qui je n'ai jamais manqué de respect. On est un peu dans le même bateau tous les deux, on avait rien demandé et on s'est trouvés embarqués dans cette merde. Elle porte une main à sa bouche, pétrifiée, en voyant les nombreuses marques qui composent mon visage.
- Qu'est ce que c'est que ça ?!
Je n'ai pas pris la peine ce matin de regarder mon reflet dans le miroir, alors je n'ai aucune idée de la mine affreuse que mon visage doit lui renvoyer. Je connais simplement l'état de mon moral qui n'a jamais été aussi bas depuis ces dernières années, et qui n'est comblé que par la consommation de drogue et d'alcool.
- Tu m'avais promis Jack, que tu arrêterais avec tout ça ! Tu m'avais promis que tu essaierais de te reprendre en main et que tu ...
Elle n'a pas le temps de finir, que je la coupe aussitôt:
- Je sais m'man, mais j'y arrive pas! J'y pense tout le temps, c'est plus fort que moi. Le seul moyen que j'ai trouvé pour me sentir un peu mieux, c'est ces putains de stupéfiants!
Le cannabis, l'héroïne, la cocaïne...Toutes ces substances que je ne devrais pas prendre mais que je prends fréquemment pour oublier. Maman déteste lire sur mon visage à quel point mes nuits ont été blanches, à quel point mes yeux ont viré au rouge et à quel point je me dégrade de jour en jour. Mais malgré son envie de m'aider et de me voir aller mieux, elle sait aussi bien que moi que si je sombre c'est uniquement leur faute à eux.
- Je te promets qu'un jour ça ira mieux, mais pour l'instant j'ai pas envie de me prendre la tête avec toi alors s'il te plait laisse moi m'en aller, la supplié-je.
Je lui mens en lui faisant croire que tout se rétablira un jour, rien ne s'arrangera jamais, mais c'est le seul moyen que j'ai trouvé pour qu'elle ne m'abandonne pas et continue de m'aimer. Elle me tend un faible sourire, abaisse le regard et se décale pour que je puisse prendre la porte.
...
Les températures basses du dehors ne m'atteignent pas, tant mon sang bouillonne à l'intérieur de mes veines. J'en veux au monde entier, pire, je serais capable d'exploser à tout moment. Chaque pas que je fais est un miracle, je me demande encore comment je fais pour tenir debout après tous les dégâts que je cause à mon corps. Je serre la mâchoire et les poings à l'intérieur de mes poches lorsque je traverse la grande pelouse du lycée, et me retiens de toutes mes forces pour ne pas craquer et m'effondrer devant tout le monde. Je me sens tellement mal putain !
Je sens le regard de Skyler sur moi, tout comme les regards d'Ashley, de Gavin, de Max et de cette pauvre rouquine qui aurait mieux fait de se faire d'autres potes que cette bande de lâches. Il y a de cela quelques semaines, je me serais sûrement arrêté pour les saluer et fumer une clope ou deux en leur compagnie mais plus maintenant. Cette époque est révolue, et j'ai fini par comprendre que ces gens n'étaient rien d'autres que de parfaits inconnus pour moi. Je continue de parcourir les couloirs du lycée en solitaire quand un groupe de filles s'amuse à me reluquer de haut en bas, un sourire malicieux au bord des lèvres.
Un simple coup d'œil à leur uniforme suffit à me faire comprendre qu'elles font partie de l'équipe de pom-pom girls du lycée.
- Hé Mickelson ! M'interpelle une jeune fille aux cheveux presque dorés.
Je soupire d'impatience, et me dirige vers mon casier en leur demandant ce qu'elles me veulent, d'une voix rude et rocailleuse. L'adolescente s'avance face à moi, avec ce même rictus sur le visage, et n'hésite pas à planter son regard clair dans le mien.
- Je comprends maintenant pourquoi tu es le capitaine de l'équipe, personne ne t'arrive à la cheville Jack. Elle se mordille la lèvre inférieure et passe une main dans ses cheveux aussi blonds que ceux de cette foutue Boucle d'or, et puis je dois avouer que la rapidité et la brutalité de tes gestes ne m'ont pas laissé indifférente...
Ma tête me fait atrocement mal et cette fille m'agace. En temps normal je serais probablement rentré dans son jeu en lui donnant la seule chose qu'elle attend de moi : du sexe. Mais plus maintenant. J'ai juste envie qu'on me laisse tranquille ! J'en ai plus que marre de ces filles à papa qui s'amusent à me séduire pour défier l'autorité de leurs parents, sous prétexte que je représente à la perfection le mauvais garçon de leur putain de bouquins et séries !
- Qu'est ce que tu veux putain ?! Je grogne en bloquant son corps contre le premier casier que je vois.
Elle me sourit comme si la violence dont je faisais preuve lui plaisait plus qu'autre chose, ce qui me donne la nausée. Putain pourquoi est ce qu'elle rigole, j'ai une tête de clown ?!
- J'en sais rien moi, murmure-t-elle en passant une main derrière mon cou. On pourrait...
Elle n'a pas le temps de terminer sa suggestion, que je dégueule sur elle tout l'alcool qui coule en moi depuis ce matin. Je me tords en deux et prends appui sur la porte de mon casier tant mon estomac me fait mal. Je vais pas tarder à crever si je continue comme ça. Le reste des pom-pom girls accourt auprès de leur amie pour nettoyer son uniforme, et la seule chose que je constate en relevant le visage c'est à quel point ce vide est immense autour de moi.
Je suis seul, je souffre, et personne ne s'intéresse vraiment à moi.
...
Je me sentais beaucoup trop mal pour aller en cours, alors j'ai séché presque toutes mes matières de la matinée à l'exception des mathématiques. J'ai passé le temps, seul et assis près du stade, à faire défiler les centaines de photos que je garde sur mon portable. J'étais à la recherche de cette photo, cette photo que j'avais prise avant que maman ne m'annonce la vérité. Et je l'ai trouvé, cette photo sur laquelle je souriais de toutes mes dents comme je ne l'ai plus jamais refait depuis, cette photo sur laquelle j'étais heureux, cette photo où je n'étais encore qu'un gamin de quatorze ans qui ignorait tout de la tragédie qu'était sa vie. Je l'ai regardée longtemps cette photo, et j'ai zoomé plusieurs fois le regard de cet enfant pour y trouver la lueur qui y brillait jadis, conscient qu'elle n'existe plus depuis longtemps. Et puis alors je me suis demandé pourquoi est ce que la vie était si injuste avec moi, et pourquoi est ce que j'étais le seul à souffrir dans cette putain d'histoire.
Ces questions continuent de se bousculer à l'intérieur de ma boîte crânienne, mais malgré l'effort que je fais pour tenter d'y répondre, je ne trouve aucune explication. Alors comme à chaque cours auquel j'assiste, je préfère me balancer sur ma chaise un briquet à la main en contemplant l'horizon sombre que m'offre la fenêtre, tandis que Mr. Robinson énonce des choses sans intérêt.
- Veillez ainsi à faire signer ces coupons de sortie, je vous rappelle donc que notre visite au Space Needle aura lieu la semaine prochaine et qu'un devoir sera à rendre par binôme. Je suis désolé pour les athlètes et les pom-pom girls, mais votre entraîneur; Mr. Markle à tenu à réserver cette journée pour vous préparer au match de fin d'année.
Un brouhaha persistant naît dans la classe suite aux paroles de notre professeur, me forçant à me boucher les oreilles assez fort pour que ma tête n'explose pas. Je ferme les yeux pour faire le vide autour de moi en attendant que le cours prenne fin, et au moment où je les rouvre je tombe sur le regard triste et inquiet de Skyler. Heureusement, la sonnerie retentit avant que je n'aie pu discerner à quel point sa mine était comparable à la mienne.
...
Mes jambes parcourent le terrain à une vitesse telle, que j'ai l'impression que mes pieds ne touchent plus le sol. Le vent me frappe de plein fouet mais ça ne m'empêche pas de penser que je vole. Mes ailes se déploient et plus rien ne compte si ce n'est ces adversaires en face de moi, qui représentent tous les obstacles de ma vie et que je me dois de mettre à terre. Leurs regards me scrutent plein de haine et d'envie de me voir défaillir, mais ma rage est plus forte, je resserre ma balle contre mon torse et n'hésite pas à faire preuve de violence pour arriver à mes fins.
Le sifflet de notre coach résonne dans tout le stade, nous avertissant de la fin de l'entrainement. La plupart des mecs se font une petite accolade pour se féliciter, mais je n'y prends pas part. Je rejoins les vestiaires en faisant abstraction des douleurs qui habitent chaque parcelle de mon corps, et ne prends même pas la peine de me retourner lorsque deux jeunes athlètes lancent dans mon dos:
- Hé mec, c'est lui qui a vomi sur Anastasia ce matin !
- Ouais je sais, tout le monde arrête pas d'en parler. Continue l'autre, on dit même
que ses amis ne veulent plus de lui.
- Chut, arrête de parler trop fort il risque de nous entendre...En plus tout le monde dit qu'il est très violent lorsqu'il est en colère.
Et moi je dis que vous avez de la chance que je ne vous égorge pas sur le champ, pauvres gamins. Je franchis la porte des vestiaires et soupire un grand coup lorsque je me débarrasse de mon casque et de mes épaulières, qui m'encombraient plus qu'autre chose. Ma peau est en sueur et mon corps est si déshydraté, que je vide ma bouteille en seulement quelques gorgées.
- Tu comptes te la jouer perso encore longtemps ? Me demande Gavin en enlevant son équipement.
Je me mets à rire, tu t'attendais à quoi mec?
- Si t'étais pas aussi lent, peut être que t'arriverais à attraper la balle avant moi, je rétorque à la place.
Max intervient directement en passant torse nu entre nous.
- Gav, on s'en fout de sa putain de balle, ricane-t-il. De tout façon c'est la seule chose qu'il a réussi à garder dans sa vie.
Des rires résonnent autour de moi, le sourire narquois de Max ne s'efface pas, et alors je sors de mes gonds. Une rage incontrôlable prend possession de chacun de mes membres, comme ce matin mon sang bouillonne à l'intérieur de mes capillaires, mais contrairement à tout à l'heure, serrer la mâchoire et les poings ne suffit pas. J'explose.
- Qu'est ce que t'as dit ?! Redis ça pour voir!
Le rire de Max s'amplifie face à mon état qui se dégrade, tandis que je m'imagine déjà lui sauter dessus et lui arracher les yeux.
- Calme-toi Jack ! M'ordonne Gavin en m'empêchant d'avancer.
- Non, non je me calme pas ! Je vais le tuer!
Je vois rouge, plus rien ne compte autour de moi si ce n'est ce garçon que je dois anéantir. Il ne sait pas ce qu'il dit putain ! Il ne sait pas à quel point ces mots ont le pouvoir de me briser. Ma respiration se fait de plus en plus rapide, et en moins de deux secondes le grand blond qui servait de rempart entre nos deux corps se retrouve au sol. Je m'élance violemment sur Max et lui attrape fermement le cou.
- T'es tellement pitoyable Jack, raille t-il malgré l'oxygène qui ne passera bientôt plus dans ses poumons.
- Ferme ta gueule putain !
Mon corps me démange et m'ordonne d'obéir à mes pulsions meurtrières. Je resserre mon emprise et ne lâche pas des yeux son regard hilare.
- ...Regarde ce que tu deviens, t'as tout per..du Jaack, suffoque t-il.
Il dit n'importe quoi putain! J'ai rien perdu du tout, c'est eux qui m'ont perdu et c'est bien fait ! Je resserre mon emprise et peut admirer son visage changer de pigmentation.
- Mec déconne pas, tu vas finir par le tuer, s'inquiète un footballeur derrière moi, que je ne prends pas la peine d'écouter.
- Va te faire foutre toi !
Gavin tente de se relever pour m'empêcher de faire du mal à son pauvre ami, mais trois garçons le retiennent au sol conscient que c'est pas le moment de me faire chier.
- Le gr..oupe est entrrrain de...se séparer...par ta faute. T'en a ..rien à fou..tre mais t'es entrain de...tuer la seul perso...nne qui aurait fait n'impo..rte quoi pour...toi.
Mon cœur se resserre dans ma poitrine face à ces accusations, de quoi est ce qu'il parle putain! Je suis tellement en colère, que je n'arrive pas à réfléchir correctement. Je n'ai jamais fait de mal à quelqu'un, ce sont les gens qui m'en font constamment. Mais soudain, sans savoir comment ni pourquoi, son regard sombre aussi cerné et meurtri que le mien surgit dans mon esprit.
Skyler...?
Le sang qui bouillonnait dans mes veines se gèle soudainement, comme si le temps s'arrêtait pour me laisser le temps d'assimiler tout ce qui se bouscule dans ma tête. Je relâche les muscles contractés de mes mains, et libère ainsi Max de ma domination. Il se met à tousser longuement pour reprendre sa respiration, mais aucun des bruits qui m'entourent n'arrivent à couvrir le rythme cardiaque accéléré qui tambourine dans ma poitrine brûlante.
Immédiatement, je laisse tout en plan et m'élance vers la sortie. Je traverse le vaste terrain de football d'un pas déterminé, prêt à interrompre l'entraînement des pom-pom girls, en me fichant de ce que pourront bien me dire ces foutus coachs. Et comme si elle m'avait senti arriver, Skyler s'arrête net et se tourne face à moi.
- C'est moi pas vrai ?! M'écrié-je en continuant de rejoindre le groupe de filles.
Les gymnastes se retournent les unes après les autres, toutes curieuses de savoir à qui appartient cette voix masculine qui brave l'interdit. Je reconnais aussitôt la bande qui était venue me parler ce matin dans les couloirs, mais n'y attache pas d'importance. La seule personne qui m'intéresse ici c'est elle.
- Alors c'est moi?! Je continue impatiemment après m'être arrêté face à Skyler.
- Mais qu'est ce que tu fais là Jack...Va rejoindre les autres.
Sa voix est épuisée et paraît éteinte comme si plus aucune force ne l'habitait, et je lutte pour ne pas détourner le regard de son visage malheureux et complètement anéanti. Elle tente de me pousser pour que je parte, mais je ne bouge pas d'un centimètre. Depuis combien de temps est ce qu'elle porte ces cernes et cet air dépité putain?! Ca peut pas être moi, Max dit de la merde comme d'habitude. Pourquoi est ce qu'elle se trouvait dans un état pareil par ma faute, franchement? Ça n'a pas de sens.
- Hé Sky tu ferais mieux de reculer, ou il risquerait de gerber sur toi!
Je me tourne en direction de la voix féminine qui me répugne toujours autant, et tend à cette merdeuse de boucle d'or un doigt d'honneur accompagné d'un faux sourire. Retourne jouer à la poupée Barbie, connasse.
- Skyler...C'est moi qui t'ai fait ça ? Je demande en redoutant de savoir la réponse.
Elle fronce les sourcils et regarde autour d'elle. On dirait qu'elle se sent mal à l'aise de me parler devant autant ce monde.
- De quoi est ce que tu parles Jack ?
- De ces putains de marques sur ton visage ! C'est ma faute ?
S'il te plait Sky...Ne me dis pas que tu te drogues et que tu ne dors pas à cause de moi. Elle hoche la tête négativement et ferme les yeux, elle pourrait se mettre à pleurer d'une seconde à l'autre.
- Non Jack...C'est la mienne aussi.
Mon cœur continue d'accélérer dans ma poitrine, tout va beaucoup trop vite autour de moi. J'ai l'impression de ne rien comprendre, putain pourquoi est ce qu'elle ne me dit pas clairement si je suis le fautif de sa mine affreuse !
- Depuis le début j'aurais dû comprendre que c'était impossible. Tu es toi, et je suis moi, sa voix se brise dans un sanglot. Et maintenant j'ai tout perdu.
Tout perdu.
- Qu'est ce que t'as perdu putain Sky ?!
J'ai peur. Peur de savoir ce qu'elle va m'annoncer, j'ai la trouille d'apprendre ce que j'ai pu lui faire inconsciemment pour la rendre si triste aujourd'hui. Ses larmes continuent de dévaler sur ses joues, mais mon égo surdimensionné m'empêche de la serrer dans mes bras pour la réconforter.
- Mon cœur Jack, j'ai perdu mon cœur. Tu me l'a pris sans jamais t'en rendre compte et tu ne me l'a jamais rendu.
Je suis perdu. Comme dans les vestiaires, je n'arrive plus à réfléchir. Mais contrairement à tout à l'heure je n'ai pas cette image qui apparaît dans mon esprit, pour me faire comprendre ce que je ne comprends toujours pas.
- Tu te souviens Jack de cette fille à la chevelure brune et aux lunettes rondes, qui n'était rien d'autre qu'une petite intello ? Tu te rappelles des bonnes notes qu'elle avait et des filles avec qui elle restait tout le temps? Jack, est ce que tu arrives à te remémorer à quel point cette pauvre fille a changé pour entrer dans ce groupe et être à tes côtés ?
Ses yeux humides me brisent le cœur, mais je reste stoïque et donne l'impression d'être impassible à son chagrin.
- Jack, cette fille a tout abandonné pour toi et tu n'as jamais été capable de lui donner quoi que ce soit en retour! Cette adolescente passionnée des matières scientifiques a bravé tous ses principes en s'abreuvant de mauvaises toxines pour te plaire...Mais même après tous ces sacrifices elle n'a jamais réussi à attirer ton attention. Et regarde Jack, a quel point cette fille souffre aujourd'hui.
Mon cœur rate un battement, le temps s'arrête à nouveau. Je réalise que cette fille est la même que celle en face de moi, je réalise enfin que cette fille est Skyler. Pourquoi est ce qu'elle me dit ça maintenant, pourquoi de cette façon? Je me mets alors à penser à quelque chose d'effrayant, que je n'ai pas vu arriver et qui remet en cause toute mes certitudes, faisant tressaillir tous mes membres.
- Skyler je t'en supplie, ne me dis pas que...tu m'aimes?
Mon cœur se déchire dans ma poitrine, tant j'ai mal pour elle. Tans j'ai mal pour moi. Car cet amour est inconcevable, car je suis incapable d'aimer, car on m'a arraché cet organe affectif dès la naissance sans que je n'aie pu dire quoi que ce soit.
- Non Jack je ne t'aime pas, je suis folle amoureuse de toi ! Depuis le premier jour je me dévoue à toi et toi seul, depuis le début je lutte pour que tu ailles mieux et pour que ces démons qui te rongent te laissent enfin tranquille.
- Skyler arrête, je murmure en essuyant les larmes qui débordent de ses yeux, tu te fais du mal pour rien. Tu n'aurais jamais dû t'attarder sur moi, sur ce cœur scellé et indomptable.
Une larme s'échappe de mon œil droit, tant je me rends compte à quel point ce qu'ils m'ont fait subir détruit mon quotidien, et m'empêche d'être heureux. Si rien de tout ça n'était arrivé, j'aurais pu t'aimer...
- Pardon Skyler, sangloté-je en ne me cachant pas.
Elle ne réagit pas, ne dit rien et donne même l'impression que son âme n'habite plus son corps. Je te promets qu'ils paieront tôt ou tard. Je m'avance face à elle et lui embrasse le front en lui adressant le peu de tendresse qu'il me reste, et en ignorant tous les regards qui se tournent vers nous. Mais rapidement, une chaleur envahit mes muscles, et une haine irrépressible s'accapare mon être tout entier.
Il doit payer. Tout est de sa faute.
Je me détache de Skyler et fais preuve de la même détermination que tout à l'heure, pour traverser le reste du terrain. Mes poings et ma mâchoire sont si serrés que j'en viens à me demander comment mes muscles font pour ne pas se briser. Je vois rouge, mon sang se remet à bouillonner, mais contrairement aux autres fois je n'en veux pas au monde entier. J'en veux à Ethan Gibson, car il est le seul fautif dans cette histoire, et je vais lui faire savoir d'ici quelques secondes dans les couloirs de ce putain de lycée.