Bave

By YannvanderCruyssen

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Épanchement
Un jour aux courses
L'arbre
Près du château
La réception
Le toast
ok

La chèvre

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By YannvanderCruyssen


Techniquement, la fermeture des magasins nous permet à tous de faire autre chose.

Nous entrons par la deuxième barrière en partant de la droite, nous faufilons à travers trains et musées.

Puis nous repartons aussi subrepticement que nous étions venus, avec la même lumière et la même sobriété dans le regard.

La plante n'a rien remarqué, en fait elle croit avoir tout remarqué mais n'a rien dit à personne.

Et ainsi se perpétuent plusieurs étendoirs d'informations qui courent les uns à travers les autres dans les grands prés des données, dans les serveurs de l'entreprise.

Plusieurs animaux se trouvent bloqués dans les flux de données, telle que cette girafe sanglante qui est restée depuis le mois de juillet au bord d'un arbre routier, persuadée que reviendrait un jour la patience des véhicules oubliés.

On entend parfois aussi parler de plusieurs sourcereaux que la mer a laissés pour compte dans son grand dédale de couvertures opaques et que nous n'avions plus jamais recensés sans s'en être rendu compte.

On entend aussi parler d'autres animaux, leurs noms échappent à tout contrôle, ils ne savent même plus ni compter ni apprendre, leur mémoire même a débouché sur plusieurs foules de stratégies complexes qui sont parties et arrivées dans d'autres regards, dans d'autres masques.

La nuit tomba.

On récoltait le butin puis on comptait à haute voix les chiffres qui le composaient : chatre, martinle, pratangue, alvule, albémole, sartine, quatorle-treide, vingtredi, martre, marble, martre, martne, matune, martre, martre gabelin, gobilla métondier, salubloque, salinglinge, ytune, ytin, marte, martre, martre-trois, maturiel, julin, etc...

Puis la cloche retentissait, elle nous faisait signe d'entrer et, au grand dam de tous, la pièce se trouvait vide, pas même un directeur financier pour nous éconduire de sa voix suave et tranchante. Pas même un petit dégoût laissé dans le coin du mur.

Alors nous ne faisions plus attention au butin et la manille se prolongeait d'elle même jusqu'à couler à contre-sang.

L'hôtel accueille plusieurs véhicules de luxe d'occasion que se partagent les employés et réciproquement, on leur donne un peu à manger en guise de rétribution, puis nous partîmes.

La mer nous attendait encore en se gargarisant de sa propre eau salée jusqu'aux couilles. On entre dedans, on s'installe confortablement puis on laisse pétrir toutes les pâtes.

La voilà bien avancée et alors déjà omise depuis sa tangente.

- Qu'aviez-vous fait de vos butins précédents, entonna-t-elle en chantant ligoureuement

- Nous les avions répandus parmi la chaire, répondis-je simplement.

Il s'en va.

- Et lui, quand arriva-t-il ?

- Nous ne le savons pas encore, nous ne l'avons pas encore lavé de tous soupçons.

- Nous allons ouvrir le ventre de la chèvre en guise de rétribution et nous répéterons l'opération autant de fois que nécessaire.

- Nous ferons la même chose avec la volaille.

- Pouvons-nous procéder ?

- Oui, dis-je amèrement.

C'est donc parti. Un goût sucré-salé commence à se faire sentir dans toute la pièce et on ne le remarque déjà presque plus, voilà qu'il est parti, on se demande même à quel point il a déjà été là ou s'il était trop douillet pour se faire remarquer.

- Avez-vous vu la chèvre ?

Non, bien sûr que non, nous n'avions rien vu, elle était passée à la barbe et aux nez de tous les généticiens du monde sans qu'aucun d'entre eux ne pense ne serait-ce qu'à ouvrir la chèvre à l'intérieur pour y voir les réponses qu'il attendait calmement.

Sous la pluie, la chèvre attend le bus, on la rencontre.

- Bonjour la chèvre, comment ça va la chèvre ?

La chèvre ne répond pas car elle est traversée d'un sentiment insupportable de solitude de chèvre très typique de chèvre.

La chèvre continue à attendre car c'est là, en fait, la seule activité qui a vraiment du sens pour elle, elle murmure de ses petites babines tendues un mot trop faible pour être entendu et on devine bien de quel mot il s'agissait.

Si vous avez bien fait attention à l'épisode précédent, vous saurez trouver la réponse au grand concours d'information tactique que vous trouverez dans votre magazine habituel et champagne au grand gagnant de la chaîne qui se voit emporter chez lui un tourbillon de saveurs martiales et il le mérite bien alors bravo à lui on lui fait un gros champagne et des petits bisous allez encore bravo on vous laisse maintenant.

Voilà. Le silence est revenu sur la chaîne et on peut retrouver la chèvre.

Elle n'a pas poussé d'un poil de chèvre, elle attend toujours calmement et on peut se dire que la situation est si stable qu'elle ne bouge probablement même pas à l'intérieur, aucune maladie ni injure ne peut l'atteindre, finalement c'est comme si elle n'était plus une chèvre mais une statue ou un simple escabeau de cuisine ou même une gouttière argentée telle que celles que l'on voit parfois juste à côté de chez toi.

C'est très difficile de suivre cette chèvre du regard tant il est difficile de savoir ce qui est chèvre et ce qui ne l'est plus donc on ne peut que supposer ou compter les gouttes de sang mais pour ça il faudrait être vraiment assidu, très assidu.

Voilà à présent la chèvre a presque totalement disparu, on ne la sent plus du tout elle s'est effacée et les quelques rayures de gomme qui persistent encore sur le papier se sont répandues ici et ailleurs et continuent de se mélanger aux décors alentours.

Cependant, le bus arrive.

Il arrive alors une question essentielle à ceux qui ont bien suivi le cours de géométrie du second semestre : qui, de la chèvre ou du choux est entré dans le bus et qui n'y est pas entré, qui est resté éventré là déchu sur le parking glacial ?

Personne ne sait. On ne sait pas, on n'en a rien à faire, il faut faire traître la chèvre c'est son destin.

Dans l'eau, le plâtre que nous avions malicieusement disposé commence déjà à se faire tard et tandis que l'eau, mugissante, se fige sous l'effet du plâtre, on entend la mer se plaindre et vociférer même pleurer elle qui jurait de ne jamais tomber dans un panneau aussi évident la voilà qui ne peut s'en prendre qu'à elle-même c'est vraiment trop triste je vais aller me coucher tellement on peut y voir de répercussions environnementales dans tous les sens.

Alors le mauvais côté du truc c'est qu'on ne peut plus aller se baigner, là ça commence même à devenir du ciment, la mer ne peut même presque plus parler c'est presque comme si elle était prise dans un bloc de ciment sauf que le bloc c'est elle-même si vous voyez ce que je veux dire.

Il va bien falloir trouver d'autres activités sauf que cette fois on pourra les porter sur le pont de ciment jusque de l'autre côté de la mer.

Donc par défaut on choisir de retourner dans l'entreprise et revoir le pot de fleur qu'on avait laissé de côté tout à l'heure, on va même le tutoyer tiens.

Donc le pot de fleur est là il nous regarde avec un air incidemment débile et naïf, on voit bien qu'il ne sait pas du tout ce qui vient de se passer il ignore tout, on peut compter sur lui c'est bon.

Donc on lui injecte un produit déstabilisant et le voilà pliant du genou et manifestant un fort inconfort.

Il a déjà un malaise c'est très gênant pour lui après un long moment mais court aussi il titube et s'évanouit.

On récupère les eaux usées de la fleur pour les injecter dans un autre contenant.

On est content du résultat, c'est bien cool sa mère, ça fait ressortir les couleurs malines des tourne-feuilles et ça fait aussi beaucoup de bien d'une façon générale à l'hygiène.

On a trouvé la solution au colmatage des entreprises il suffit de les compter une par une puis de les placer dans l'ordre qui avantage la partie adverse, à partir de là le lecteur qui ne va pas particulièrement fouiller dans les strates inclusives croit que tout est déjà placé et ne pense pas à redistribuer les cartes... Et c'est précisément là qu'on l'attend.

Donc c'est la prochaine vibe : on teste ça avec le premier lecteur. Il y en a justement un qui se présente à la porte du bureau-directeur dès jeudi.

Il a un visage bien bouffi et des dents de seuillage déjà prêtes à tout, il tourne un peu du coin de la bouche et il fouille dans ses yeux par manie. On comprend de quel type d'individu il s'agit.

On lui fait passer un peu de musique et on demande son avis sur la chanson.

- Alors, l'interprétation, ça boome ? L'instrumentation, ça boome ? Et les couleurs musicales, ça boome aussi ?

- Au oui-da mon petit père, s'empresse de répondre le jeune analphabète déjà au seuil de l'oreiller.

Alors on continue avec le jazz et les musiques actuelles, on fait passer des disques simplement, posément, et on lui demande son avis à chaque fois.

Malgré la fatigue il se tient encore sur ses deux pieds surplombés de ses deux jambes bien fermes.

- Et celle-là, elle boome grave du pâté, ne trouvez-vous pas ?

- Oh, je sais pas, on pourrait en dire bien des choses... Mais bon moi tout ça en fait ça me laisse assez indifférent vous savez, surtout que j'ai déjà étudié tous ces trucs à l'école quand j'habitais à Merci-les-Roubignolles alors vous pensez bien moi tout ça hein, tout ça... Hein...

En fait il passe plus de temps au final à parler de ses Roubignoles ou de je ne sais quoi que de parler de la musique du coup on est un peu circonspects, on ne sait pas bien s'il va faire l'affaire, s'il va le passer cet examen.

Mais on insiste, on continue, on en passe une autre, puis une autre puis une autre, puis une autre... Et tandis que les musiques s'enchaînent dans une similitude qui s'agrandit au fur et à mesure qu'elles finissent toutes par se ressembler et que le jeune homme en finit par dire toujours exactement la même chose et que nous continuons à nous dire la même chose à propos de son propos et que les musiques se ressemblent en se disant exactement la même chose et que la même chose du propos de se dire la même chose de se dire la même chose de se dire la même chose.

Et dans ce vaste papier peint qui s'est construit à mesure que l'entretient avançait, un pattern légèrement cassé se fait entendre, personne n'a la moindre idée du temps qui s'est écoulé avant qu'il ne vienne tintilloner à nos oreilles, qui donc se dessine à travers les lignes moirées de la chambre ?

C'est la chèvre !

Elle qui était restée hors du temps dans sa chambre de bus ou dans ses papillons de gomme, qui sait, elle est là, délibérément, mieux encore : elle n'est pas ailleurs, uniquement là. C'est le concept de la chèvre échappant à tout soupçons qui est là.

Elle nous parle cette fois d'une voix saine et claire, d'une fois belle, elle nous enchante par des paroles qui vont et viennent entre les murs, elle parle au postulant, elle parle à nos orteils et nos narines, elle se fait légèreté et arabesques.

Elle nous parle dans des mots doux d'une langue merveilleuse, elle nous promet un présent luxueux et déterministe, elle nous parle des plaisirs de sa parole, c'est vraiment très réconfortant.

Ni une, ni deux, tout le monde se précipite sur la chèvre armé de couteaux cachés et préparés depuis déjà bien longtemps, on lui ouvre le ventre et on cherche tous avidement à l'intérieur.

Tout le monde est penché au dessus de la chèvre, plus rien d'autre n'a d'importance, nous sommes tous la même personne au regard de cette chèvre-là.

Le sang dessine de jolis immeubles sur nos manches et nous continuons à chatouiller les entrailles délicates de la chèvre mais rien n'apparaît ?

Et si tout ceci avait été un affreux mensonge ? Ou bien encore si quelqu'un l'avait trouvé, pris dans ses mains et caché sans rien dire à personne et prétendait maintenant que "Non, non j'ai rien vu rien trouvé, et vous ?".

On le saura bientôt. Ce qu'il reste à définir c'est la sentence.

Maintenant inutile de vous dire que la période d'essai est dépassée et que la mer est maintenant cousue de fer blanc et parfaitement solide, on ne suspecterait même pas qu'elle ait un jour été mer, ni d'Ève ni d'Adam.

C'est la moitié des véhicules qu'il vous faudra embarquer dans le grand voyage si vous voulez enfin savoir ce qui se cache derrière la mer et pourquoi elle ne voulait jamais vous en parler.

Vous risquez d'être, disons, un tout petit peu déçu.

Tout le monde embarque donc pour le grand voyage...

Le postulant (il s'appelle André), Joseph, les collègues et moi-même, la fleur, la chèvre, nos véhicules ainsi que le bus, les voies principales du seigneur, les bouts de gomme et j'en oublie...

Tout le monde forme une grande caravane grâce à une technique de queue leu-leu inédite, et ça avance, et ça marche. Ça marche encore dans les froids et les didascalies, ça marche, ça compense, ça compose et ça revient comme la houle qui fut autrefois sous nos pieds.

On continue à marcher et s'il n'y a rien à dire c'est qu'il n'y a là encore rien d'autre à faire que marcher encore et toujours jusqu'à une destination incertaine voire même peut-être oscillante.

On se souvient de l'époque où faire le tour du monde ne coûtait à Monsieur qu'un petit bout de pain désargenté et émietté comme le blé mais aujourd'hui que voulez-vous, on rentre dans un système de sornettes à pistons qui empêche le moindre emmerdement du futur.

Je suis déjà désolé mais on est toujours en train de marcher, chacun pense dans son coin à ce qu'il veut pendant qu'il marche, on assiste même à des alternances plaisantes de voitures et d'individus, de la même manière que nous aurions placés les hommes et les femmes à un banquet autour des tables en essayant qu'il y ait toujours un homme à côté d'une femme et réciproquement sauf s'il y a par exemple onze femmes pour dix hommes auquel cas il faudra bien qu'il y ait deux femmes côte-à-côte à un moment mais dans ce cas la règle veux qu'on choisisse les moins bêtes des deux ou quelque chose comme ça.

On est encore en train d'avancer.

Là je viens de vérifier et on est encore en train d'avancer, il n'y a rien à faire. On ne se couche même pas pour s'arrêter car c'est vraiment un voyage très important et il ne faut surtout pas s'arrêter.

On se dit même qu'on a du franchement y aller de main forte avec le plâtre car la mer est entièrement corrompue par sa présence, elle ne peut plus rien faire elle est à la fois complètement invulnérable et impuissante, voilà ce qu'on se dit.

Quand soudain : terre à l'horizon !

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