Elestreÿa : l'Assemblée

By DorianeVallois

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De l'Yggdrasil, le Royaume de Tarian n'a hérité que du mauvais : entre pénuries d'eau, chaleur étouffante et... More

Prologue
[CARTE] Les Royaumes d'Elestreÿa
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By DorianeVallois


« J'espère un jour pouvoir vous raconter ses aventures, en espérant qu'il ne tardera pas trop à quitter son palais ... Qui sait, à dos de dragon peut-être ? »

Des paroles et des rires étouffés succédèrent à cette fin qui n'en était pas une. A dos de dragon ? Cela semblait être invraisemblable pour le comité qui écoutait avec attention. Les seuls dragons vivants étaient les Créateurs, l'espèce étant tombée bien avant Elestreÿa.

Adalrik s'accorda à penser que Vardan n'était pas si bon conteur qu'il ne le laissait paraître. Sa maîtrise des mots n'était pas assez parfaite. En revanche toute sa gestuelle, ses regards, sa présence dans le ton qu'il employait ... Tout cela lié ensemble hypnotisait ceux qui l'écoutaient et le regardaient. Il enchaîna sur d'autres histoires connues et qui étaient déjà passées sur beaucoup de lèvres.

- Avant, il n'y avait rien. Ni terres, ni cieux. On appelait ce rien le Ginnungagap, l'abîme. Seuls existaient les antipodes : au nord, le monde de glace : le Niflheim ; au sud, le monde de feu : le Muspelheim. D'Helheim, le monde des morts, coulait Helivagar, les douze rivières de qui virent le jour les filles du gel, ainsi qu'Ymir, le premier géant. » Adalrik avait beau avoir entendu cette légende des milliers de fois, la voix de Vardan faisait naître en son esprit les images-même de la création. « Ymir se nourrissait au pis d'Audhumla, qui tâchait chaque jour à lécher la glace qui se formait dans le brouillard du Ginnungagap. Un jour, Buri en sortit, père de Bor, lui-même mari de Bestla. De leur union naquirent Odin - le dieu des dieux - et ses frères, qui tuèrent Ymir. De son cadavre, ils créèrent le Midgard, le monde des Hommes, qui siégeait au milieu des mondes de l'Yggdräsil, et des larves qui très vite s'installèrent dans le corps sans vie du premier géant dans le but de s'en nourrir, ils façonnèrent les Nains. En hommage aux quatre premiers d'entre eux, des nains géants dont la mission fut de soutenir la voûte céleste, les quatre points cardinaux furent nommés : Nordi, Sudri, Austri et Westri. Odin et ses frères tâchèrent ensuite de passer à la création des premiers Hommes : Ask, et sa compagne Embla. Alors que la société des Hommes allait bon train sous les regards du dieu Heimdall, une guerre éclata chez les dieux ... »

C'était le silence total dans l'auberge. Une chaise fut tirée, un homme remplissait sa pipe à l'aveuglette, exécutant à plusieurs reprises le même geste inutile.

- Les géants déclarèrent la dernière guerre aux Ases et aux Vanes : le Ragnarök. Les plaines de Vigrid connaissaient leur dernier combat, et l'Yggdräsil ne tarderait pas à sombrer, emmenant ses mondes avec lui dans les profondeurs de l'Helheim ... C'est alors qu'apparut Nidhögg, le Grand Dragon, qui s'éleva au dessus des neufs mondes, quatre autres reptiles aux longues ailes écailleuses volant derrière lui. Leurs noms étaient Graback, Grafvolluth, Goin et Moin. La légende raconte qu'ils périrent dans la bataille. De son souffle miraculeux, Nidhögg transforma d'autres créatures en dragons : Idun, Fenrir, Heidrun, Eikthyrnir, Munin, Hugin, Jormungand, Ratatosk et Vedrfölnir. Ensemble, les dix dragons tractèrent les neufs mondes, les détachant de l'Yggdräsil qui s'effondrait sur lui-même et prenait feu, les faisant fusionner entre eux. » Vardan marqua une pause pour boire une gorgée. Dans l'assemblée, tous attendaient la suite de cette histoire qu'ils ne connaissaient pourtant que trop. « Dans le ciel, le sang des anciens dieux tombait en averse, et les dix dragons dansaient. La nouvelle terre était bénie par le sacrifice des géants, des Ases, des Vanes, et l'Yggdräsil n'était plus. D'un profond rugissement, le Grand Dragon appela au rassemblement. Tous les peuples : Hommes, Alfes Claires et Sombres, Nains, Fées, et autres petits comités ; ... tous avaient les yeux rivés sur le même ciel, et ruisselaient du même sang du renouveau. Elestreÿa passa de bouche en oreille et d'oreille en bouche ... Telle est notre origine, et au-delà des océans, il n'y a plus que vide. Aujourd'hui, les Dix Dragons Créateurs sommeillent de part et d'autres du territoire, se reposant de leur dur labeur, veillant dans l'ombre sur les peuples et prenant les formes de leur choix pour sillonner les terres d'Elestreÿa et - »

La porte claqua, coupant l'histoire de la création dans laquelle Vardan plaçait toute son énergie. Il fit claquer sa langue sur son palais par mécontentement, suivant cela d'un souffle. Une femme venait quémander de l'aide aux voyageurs : il n'y avait plus d'hommes dans le village.

- ... et la bête ! La bête ! La bête, elle a attaqué l'troupeau ! Elle va dév'rer nos enfants ! Grande, sale .. une odeur âcre, comm'un ch'val ! »

Hystérique, la villageoise faisait de grands gestes, les yeux implorants, terrifiée, une petite fille dont les pleurs couvraient presque ses explications à demi-criées sous son accent paysan. La petite tenait fermement l'arrière de sa jupe entre ses deux minuscules mains.

Adalrik se leva d'un bond. Il ne regarda pas un instant ceux qui l'accompagnaient : il se jeta à l'extérieur, contournant la villageoise, courant plus vite qu'il ne s'y attendait - il n'avait pas l'habitude de ne pas être gêné par son armure, qu'il avait retiré avant son départ du palais -, suivant les torches, se rendant là où, soit-disant, la bête se trouvait. Un rugissement phénoménal, plus de défense qu'autre chose, le força à accélérer. Une main lui agrippa alors l'épaule, le renversant en arrière. Il attrapa cette dernière, qui lui empoigna avec force la main :

- Tu vas où comme ça, gamin ? » Vardan, le visage d'abord sans expression, sourit : « Tu as cru que tu étais le seul à pouvoir t'amuser à casser la mâchoire de ce truc ? »

L'homme l'aida à se relever, et la compagnie derrière attendit le signe de tête de Vardan pour se jeter dans le combat. Le signe de tête fut donné. Les femmes reculèrent, quelques cris retentirent. Les hommes n'eurent pas besoin de se faufiler, les villageoises les laissaient passer. La main sur la fusée de leur épée ou tenant fermement de longues lances aux piques mortelles, les hommes bouchèrent la sortie, empêchant la bête de trouver toute issue : elle était coincée contre un pan de mur. Menacé par les lances tendues en sa direction, l'animal regardait les hommes un à un : il n'était pas effrayé. Sa queue fouettait, soulevant un léger nuage de poussières qui s'élevait sous la lumière des torches et lampes. Ses babines étaient retroussées, laissant apparaître de longs crocs, dont il ne devait pas se servir pour ciseler du basilic ... Il était comme prêt à bondir, son corps plein de boue séchée regroupé comme un ressort qu'on pince entre ses doigts.

Vînt le moment où il passa ses yeux dans ceux d'Adalrik. Sa poigne se relâcha sur son épée. L'animal soutînt son regard. Ses yeux étaient d'un vert émeraude. Le chevalier n'avait jamais vu de couleur plus intense, et plus belle. En eux, il lisait comme quelque chose. Il voyait comme quelque chose. C'était plus qu'un regard de simple bête, une part était intelligent, une autre rayonnait ... A la fois fasciné et intrigué, il hésita à dégainer et user de son arme. Vardan préparait déjà son prochain signe de tête. Il comptait l'abattre.

Bien que le félin fasse un bon mètre vingt aux épaules et possède un attirail d'attributs naturellement aiguisés et faits pour tuer, Adalrik se jeta sous lui sans hésitation. Il dégaina son épée et, se servant du pommeau, il donna un grand coup dans la cage thoracique du félin. Ce dernier eût un hoquet et se recroquevilla sur lui-même, ne pouvant plus respirer, écrasant le chevalier qui se dégagea tant bien que mal, envoyant un grand coup de coude dans la tête de l'animal, sous les yeux ébahis de ses compagnons. Voyant que l'animal boitait en tentant de sauter sur le toit de l'habitation au pied de laquelle il était coincé ; Adalrik l'attrapa par la queue, l'empêchant de s'élancer pour se sauver, se faisant projeter dans le même temps vers l'avant. Le torse contre le sol, le félin saisit l'occasion et la faiblesse du chevalier en envoyant un grand coup de patte, les griffes dehors. Déboussolé, il rata sa cible, qui en profita pour se tourner sur le dos et lui asséna un grand coup de pied dans l'épaule qui soutenait la patte faiblarde. Un feulement mélangé à un grondement de colère brisa l'espérance des villageoises à voir ce monstre vaincu. Les hommes de Vardan prirent alors part au combat, venant en aide à Adalrik.

- Tu es vaillant mon petit ! » lui lança Vardan.

- Ne le tuez pas ! » cria seulement le chevalier en réponse.

Vardan leva un sourcil incrédule avant de crier :

- Maîtrisez-le ! Mais qu'aucun n'entache ce pelage de sang ! »

Les hommes bloquèrent le félin au sol, les plus courageux se jetant dessus et le plaquant à plusieurs ; d'autres autour brandissaient toujours leurs lances. C'était particulier, l'animal ne se débattait plus, il soufflait fort, grondait, mais ne bougeait plus. Un animal sauvage se battait pourtant toujours même si mort devait s'en suivre. Surtout lorsqu'il s'agissait d'une telle bête.

- Des entraves, des chaînes, tout de suite ! Apportez la cage du griffon ! »

Adalrik réceptionna les attaches à peine quelques minutes après que l'ordre ait été entendu et exécuté. Il s'approcha, la bête tentant à plusieurs reprises de lui donner un coup de patte en pleine figure, signe qu'elle opposait ses dernières résistances. Il l'entrava, et elle fût directement placée dans la cage d'acier, poussée petit pas par petit pas - aussi grand que ses chaînes le lui permettaient - par les lances que brandissaient toujours les hommes.

Essoufflés, les hommes comptaient les griffures et morsures que leur avait asséné l'animal. Aucune perte n'était à déplorer, et les blessures n'étaient que superficielles. Vardan s'en assura en personne, et en signe de remerciement, les villageoises tâchèrent de soigner les blessés, évitant de croiser le regard de l'animal tout le temps qu'elle se déplaçait autour de lui. Au travers des barreaux, il grondait dès que quelqu'un s'approchait ou osait le regarder. Elles en étaient terrifiées.

Tout était allé très vite, et Adalrik se laissa glisser le long du mur, face à la cage du félin, son visage porté vers le ciel. Vardan s'approcha à pas las, cachant la lune au dessus d'Adalrik, le couvrant dans l'ombre.


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