Divine Darkness, Tome 1 : Une...

By AnnaTriss

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Une offrande de chair et de sang destinée au plus dangereux des dieux... Danaé est la fougueuse princesse reb... More

Avant-propos et présentation de l'univers
Partie I : Le baiser du soleil
Prologue : Humeur massacrante 1/2
Prologue : Humeur massacrante 2/2
Chapitre 1 : Le Renard 1/2
Chapitre 1 : Le Renard 2/2
Chapitre 2 : Ténèbres intrusives
Annonce importante : contrat d'édition
Cover reveal Divine Darkness + dates de sortie + résumé

Chapitre 3 : Un souffle en perdition

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By AnnaTriss


La main moite de Cyrill agrippa la mienne et la pressa fort dans le noir. Nous ne bougions pas d'un pouce et osions à peine respirer, conscients du danger mortel qui rôdait à proximité. Nous étions défavorisés par rapport au ténèbris, qui évoluait sur son terrain. Son acuité supplantait nos sens humains. Si nous esquissions le moindre geste pour tenter de nous enfuir, il nous attaquerait... et de toute manière, nous étions aussi impuissants qu'aveugles dans ce bain d'ombres.

Un courant d'air glacial dressa le fin duvet sur mes avant-bras. Je compris que la créature se déplaçait en flottant, attirée par le fumet de l'angoisse que mon garde et moi exsudions à notre insu. Je serrais toujours mon couteau ridicule entre mes doigts tremblants, même s'il me semblait peser une tonne.

— Danaé ? appela une voix féminine claire et familière à proximité.

Celle de... ma sœur ?

Je me raidis de tout mon corps, le cœur cannibalisé par l'inquiétude. Impossible, Lara ne pouvait pas être là ! Elle ne sortait quasiment jamais du palais, contrairement à moi. Je comprimais la main de Cyrill, dans l'espoir qu'il me fasse signe qu'il avait entendu l'autre princesse du royaume, mais il se contenta de caresser mon poignet avec son pouce dans une tentative de réconfort qui m'incitait à ne pas perdre mon sang-froid malgré notre situation critique. Tel que je le connaissais, il cherchait une solution, une échappatoire à travers les souvenirs de sa formation de Paladin Royal. Mais pendant ce temps-là, la créature errait dans les ténèbres denses aux alentours... Qu'attendait-elle pour nous tomber dessus ? Elle devait pourtant percevoir nos respirations, nos signes vitaux...

— Danaé, petite sœur, souffla doucement Lara. Où es-tu ? Rentrons à la maison ensemble. Je ne veux pas que père te dispute encore. Je n'aime pas cet endroit. Il empeste la mort...

Elle jongle avec mes nerfs, réalisai-je en me mordant la langue pour ne pas lui répondre.

Ce devait être l'une des multiples caractéristiques magiques des ténèbris. Ils imitaient les proches de leurs proies pour les duper et amplifier leur terreur, dont ils se nourrissaient. Voilà comment ils exploitaient les points faibles de leurs victimes avant de les achever... Et les ténèbres renforçaient leur pouvoir, à l'instar de bien des membres de la cour du Royaume Obscur, dont leur dieu.

— Père, c'est... c'est vraiment toi ? balbutia nerveusement le Paladin près de moi.

Je lui donnai un coup de coude dans les côtes pour l'exhorter au silence et le ramener à la raison. Lui aussi subissait l'influence délétère du Polytre.

Nouveau courant d'air. Cyrill bondit en arrière avec un cri étranglé, m'entraînant avec lui. L'entité sournoise l'avait effleuré pour lui mettre la pression. Je trébuchai sur une stalagmite et me raccrochai in extremis au cône de pierre pour ne pas m'écrouler, mais ma main quitta celle de mon garde dans ce mouvement. Mon couteau tomba à terre. L'absence de son m'indiqua qu'il avait atterri sur une parcelle de mousse. Je tâtonnai dans le vide, en quête du corps du soldat. Mes doigts se refermèrent sur un... tissu... doux... de la soie ? Mais l'officier n'en portait pas... Il n'arborait que sa cotte de mailles et son tabard, aucune cape...

— Cyrill ? soufflai-je, incertaine et frissonnante.

Une poigne d'acier me saisit soudain par le cou. Je sentis le bout d'un nez froid humer la courbe de ma joue tandis que le bas d'une robe évasée enveloppait mes jambes. Il avait emprunté l'apparence de ma sœur ! Je me mis à suffoquer en me débattant en vain pendant que le ténèbris me reniflait avec une insistance animale comme un chien de chasse le ferait avec son gibier.

— Je t'ai trouvée, petite Éphémère, chantonna la voix trompeuse de Lara à mon oreille.

Je ne savais pas pourquoi, mais j'avais l'impression que ce simple constat énoncé sur un ton caustique recelait un double sens.

— Lâche-moi ! bramai-je d'une voix étranglée en lui martelant la poitrine de mes poings et les tibias de coups de pied, sans réussir à me dégager de sa prise surhumaine. Cyrill ! CYRILL, IL ME TIENT !

— DANAÉ !

Mon protecteur accourut en blasphémant. La créature néfaste éclata d'un rire mauvais en me repoussant en arrière avec violence. Je m'écrasai contre la paroi de la grotte avec un râle désarticulé. Mon dos encaissa rudement le choc. Je clignai des paupières, pantelante, en titubant vers les bruits de lutte et les grognements qui retentissaient. Je captai une déchirure de tissu, suivie d'un coup mat. Mon garde désarmé se battait à mains nues contre notre agresseur ?

— Tu l'auras cherché, stupide Paladin, siffla l'élémentaire avec la voix de ma sœur aînée.

— Non ! Laisse-le tranquille, Polytre ! m'égosillai-je, la main autour de ma gorge meurtrie.

C'était moi qui l'intéressais. Je le sentais viscéralement. Il ne m'avait pas flairée pour rien.

L'écho d'un cri de douleur me tordit le ventre. Par les Monts Sacrés, le ténèbris avait blessé mon amant ! Constatant que je piétinais une zone moelleuse, je me courbai pour palper urgemment le sol. Mes doigts entrèrent en contact avec la lame en acier de mon couteau. Si la créature avait adopté une forme humaine, peut-être était-elle vulnérable aux attaques classiques avec des armes !

— Danaé, cours ! Rase le mur et fuis pendant que je le retiens ! Sème-le dans les galeries ! tonitrua Cyrill avec une nuance de détresse qui ne m'échappa pas.

Quoi ? Non ! Hors de question que je l'abandonne à son...

Un fracas atroce explosa tout à coup dans mes tympans, m'obligeant à m'accroupir en me protégeant la tête avec les bras. Dans la demi-seconde qui suivit, un geyser poisseux m'aspergea, constitué de liquide à l'odeur métallique et de... de... choses visqueuses que mon esprit perturbé ne voulait pas identifier. Je gouttais littéralement. Une pestilence subite me rendait nauséeuse.

— Cy... Cyrill ? lançai-je, hagarde, en m'emparant d'un petit morceau mou qui pendait le long de ma crinière souillée.

C'était spongieux, assez fin et souple... et rattaché à une courte touffe capillaire.

Je me pétrifiai d'horreur en intégrant qu'il s'agissait d'un bout du cuir chevelu de mon garde du corps.

Car le ténèbris l'avait pulvérisé avec ses pouvoirs abjects.

J'avais Cyrill partout sur moi.

Ma gorge expulsa un hurlement tandis que des larmes me montaient aux yeux. C'était un cauchemar. Je ne pouvais pas y croire. Je m'affalai lourdement à quatre pattes dans une flaque de sang, la tête entre les épaules, la respiration hachée. Un spasme secoua mon estomac. Je vomis sans pouvoir m'en empêcher, probablement sur le cadavre de mon amant, réduit en charpie. L'assassin du pauvre Paladin Royal s'esclaffa à proximité alors que je gémissais comme une âme en peine en frappant le sol détrempé avec mon poing libre.

— J'étais convaincu que tu avais les nerfs solides, princesse... Quel désenchantement ! commenta le Polytre d'un timbre moqueur.

Mon sang se mit à fouetter mes veines. Une rage vengeresse sans précédent déflagra dans mes tréfonds. Dans un élan combattif, je sautai sur le ténèbris, mon couteau à la main, et plongeai ma lame vers l'endroit où devait se situer son visage. L'arme s'enfonça dans la chair et l'os de son enveloppe humaine. Il ne brailla pas et ne tressaillit pas.

Toutefois, un léger geignement vibra dans sa poitrine, signe qu'il souffrait.

Tant mieux, il l'avait mérité !

Son sang surnaturel alluma légèrement l'acier ignis. La faible lumière argentée m'offrit un aperçu de mon adversaire. La silhouette frêle de Lara apparut, mais... ma sœur était en train de se déformer. Elle arborait un œil plus grand que l'autre, la bouche tordue, une épaule tombante, comme déboîtée. Sa peau fonçait. Mon ennemi se ramollissait autour de mon couteau, qui saillait de sa joue, et reprenait sa forme primaire pour se régénérer de sa plaie.

Récupérant mon bien, j'en profitai pour essayer de détaler, mais un appendice glacé s'enroula autour de mes chevilles. Je m'effondrai à plat ventre en gesticulant, rampai, griffai la terre, pestai comme une furie, à peine consciente des restes immondes qui m'entouraient. Le ténèbris me traîna jusqu'à lui avec un long tentacule de brume noire surgi de son corps intangible.

Il me veut vivante. Sinon, je serais déjà morte, pensai-je en me tortillant pour abattre mon couteau sur l'entrave qui m'emprisonnait les jambes.

Je m'échinais inutilement à cause de son inconsistance. Pire, dans ma panique, je m'entaillais les mollets avec la lame. J'allais finir par me planter moi-même !

— Tu ne m'échapperas pas, fit remarquer mon attaquant d'une voix éthérée et lugubre, en m'arrachant aisément mon arme. Je te retrouverai quoi qu'il advienne. Tu livres un combat perdu d'avance. Soumets-toi.

Mes yeux embués se levèrent vers son visage sans traits et sans regard. Une vague de chagrin me submergea. Cyrill avait péri à cause de mon inconséquence. J'allais être capturée par une créature malveillante de la surface qui m'avait traquée pour une mystérieuse raison. Je ne reverrais pas ma famille.

Mais me soumettre ? Jamais !

J'étais la fille du roi des Éphémères. J'étais également le Renard insaisissable du peuple, que personne n'avait pu coincer !

Aucun combat n'était perdu d'avance tant que l'on respirait encore.

Je ne sus comment, mais je parvins à empoigner le tentacule du ténèbris à pleine main et à le faire lâcher prise en le serrant de toutes mes forces. L'appendice s'amincit jusqu'à ce que je puisse me libérer les jambes. Mon agresseur émit un chuintement de colère, sans réussir à m'en empêcher. Équipée de mon instinct de conservation, je roulai aussitôt sur le côté... et chutai dans le lac souterrain où je m'étais baignée avant l'arrivée de Cyrill.

C'était peut-être ma porte de sortie.

Ou mon chemin sans retour vers un sarcophage dans la crypte de mes ancêtres, au choix.

Un étroit passage immergé conduisait à une grotte attenante plus petite. J'espérais que l'élémentaire ne pourrait pas me suivre... et que je tiendrais suffisamment longtemps en apnée, puisque je n'avais jamais réussi à me délester du bocal en verre dans lequel je respirais lors de la traversée. Cette séance aquatique improvisée nécessitait de retenir son souffle deux minutes, or mon record était de 95 secondes. Et si j'échouais, je ne pourrais pas rebrousser chemin.

Je nageai parmi les bouquets d'algues en remuant les bras et les jambes à un rythme rapide et coordonné. Heureusement, j'avais déjà mes repères sous l'eau. Je m'introduisis dans le boyau en me propulsant grâce à mes mains qui se cramponnaient aux parois rocheuses. Mes jambes battaient à vive allure alors que des bulles s'évadaient de mes lèvres pincées. L'oxygène se raréfiait peu à peu dans mes poumons, circulait au ralenti dans mes veines en fusion.

Il me fallait tenir le coup. Outrepasser mes limites. Survivre coûte que coûte !

La pression dans mon crâne s'intensifia, augmentant mon rythme cardiaque qui pulsait dans mes tympans saturés de sifflements insoutenables. En parallèle, mes membres étaient cotonneux. J'avais de moins de moins d'énergie. Allais-je trépasser ainsi ? Noyée dans un tunnel sous-marin, mon cadavre introuvable pour ma famille ? Ma sœur pleurerait probablement ma perte. Mon frère camouflerait son chagrin derrière un masque de fierté et retiendrait ses larmes. Toutefois, mon père... il n'en verserait pas une seule pour moi, j'en étais sûre. Il éprouverait peut-être même un soulagement inavouable à l'idée d'être débarrassé de sa fille puînée bien trop indocile et dissipée à son goût.

Je secouai la tête sous l'eau en accélérant tant bien que mal. Cette pensée m'insuffla un regain de témérité et de détermination.

Non, je ne voulais pas donner cette satisfaction au roi des Éphémères.

Oui, une fois de plus, je comptais le contredire... en défiant la mort elle-même.

Il me sous-estimait comme la plupart des gens, mais je connaissais ma valeur !

Un instant plus tard, j'émergeai dans la cavité voisine du tombeau sanglant de Cyrill, la bouche grande ouverte pour inspirer une longue bouffée d'air salvateur. En offrant à mes poumons la nourriture invisible qu'ils quémandaient, je glissai vers le bord. Je me déplaçais à tâtons dans une obscurité si glaciale que je claquais des dents. J'étais épuisée comme jamais, en proie à des vertiges, des frissons et des nausées. Une chute de tension... Je me hissai péniblement sur la terre ferme et roulai sur le dos en reprenant ma respiration, une main en éventail sur mon ventre qui se soulevait et s'abaissait à toute allure.

Je ne sentais aucune présence surnaturelle dans cette grotte. J'étais seule parmi les ombres, nue comme le jour de ma naissance, purifiée des résidus organiques qui m'avaient éclaboussée. Je réalisais ce que je venais de vivre malgré le brouillard qui prenait mes sens en otage.

Cyrill était mort pour me protéger.

J'avais semé un ténèbris qui m'avait assuré que je ne pouvais pas lui échapper.

Un sourire fou, dérangé, triomphant mais sans joie, étira mes commissures...

... et je sombrai dans l'inconscience, emportée par un flux contre lequel je ne pouvais pas lutter.

Je rêvais d'une nuée d'étoiles et de lunes jumelles que je n'avais pourtant jamais vues.

*************

RIP Cyrill, tu nous manqueras (ou pas)

Oui je sais, je suis rude, je dégomme un personnage plutôt cool d'entrée de jeu, mais bon, j'ai une réputation d'auteure sadique à tenir, que voulez-vous... Et puis, faut bien laisser le champ libre pour le véritable love interest de Danaé, non ?

Alors, dites-moi tout, qu'avez-vous pensé de ce chapitre sous haute tension ? 

Merci pour vos votes, commentaires et partages, que les Faedras vous bénissent ! RDV dimanche pour la suite. Bisous !

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