ERASER

By edelina37

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"La mémoire s'efface peut-être, mais un cœur n'oublie jamais." Heaven, étudiante en arts, porte les cicatrice... More

AVANT-PROPOS
PROLOGUE
CHAPITRE 1
CHAPITRE 2
CHAPITRE 3
CHAPITRE 3
CHAPITRE 4
CHAPITRE 5
CHAPITRE 6
CHAPITRE 7
CHAPITRE 8
CHAPITRE 9
CHAPITRE 10
CHAPITRE 11
CHAPITRE 12
CHAPITRE 13
CHAPITRE 14
CHAPITRE 15
CHAPITRE 16
CHAPITRE 17
CHAPITRE 18
CHAPITRE 20
CHAPITRE 21
CHAPITRE 22
CHAPITRE 23
CHAPITRE 24
CHAPITRE 25
CHAPITRE 26
CHAPITRE 27
CHAPITRE 28
CHAPITRE 29
CHAPITRE 30
CHAPITRE 31
CHAPITRE 32
CHAPITRE 33
CHAPITRE 34
CHAPITRE 35
CHAPITRE 36
CHAPITRE 37
CHAPITRE 38
CHAPITRE 39
CHAPITRE 40
CHAPITRE 41
CHAPITRE 42
CHAPITRE 43
CHAPITRE 44
CHAPITRE 45
CHAPITRE 46
CHAPITRE 47
CHAPITRE 48
CHAPITRE 49
CHAPITRE 50
CHAPITRE 51
CHAPITRE 52
CHAPITRE 53
CHAPITRE 54
CHAPITRE 55
CHAPITRE 56
CHAPITRE 57
CHAPITRE 58
CHAPITRE 59
CHAPITRE 60
CHAPITRE 61
CHAPITRE 62
CHAPITRE 63
CHAPITRE 64
CHAPITRE 65
CHAPITRE 66
Mot de la fin
ÉPILOGUE

CHAPITRE 19

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By edelina37

CHAPITRE 19

HEAVEN

Il faut une oreille bien fine pour entendre le soupir d'une rose qui se fane.

Franchement déprimée par la révélation d'Emy à midi, je découvre au dernier moment sur le panneau d'affichage que le professeur d'histoire de l'art est absent, et j'apprends avec horreur qu'il est remplacé par deux heures de mathématiques et perspectives. Autrement dit, un cours que je déteste particulièrement. Ça commence bien.

Je gravis les marches le plus lentement possible en redoutant le cours qui m'attend là-haut. Ah, le nombre d'or ! C'est une longue, très longue histoire d'amour qui nous unit, lui et moi. Monsieur Root, mon professeur de maths, a toujours pris un plaisir fou à me démontrer que les arts et les mathématiques sont étroitement liés, malgré mes nombreuses désapprobations. 

Horreur ! Leonardo Da Vinci, Le Corbusier ou encore Sandro Botticelli et beaucoup d'autres artistes auraient apparemment recours à cette divine proportion. Les traitres. En plus, moi, je me fiche de ce nombre argenté. Tout ce qui m'intéresse, c'est de crayonner différents gribouillis dans le coin de mes cahiers.

Je soupire profondément face au cours qui m'attend et me sers de la rambarde de l'escalier comme pôle dance. Quand je serai devenue la reine du monde, je chasserai tous les mathématiciens de mon royaume.

Mais lorsque je relève le menton, une masse non identifiée me rentre dedans et je perds l'équilibre en tombant en arrière. Heureusement pour moi, l'individu pose sa grande main sur mon dos et me tire contre son buste avant que je ne me fende le crâne. Je reconnais cette odeur. Je connais cette présence. J'ouvre grand les yeux.

— Andreas ?

— Heaven ?

Nous avons parlé en même temps. Son visage est proche du mien, mes mains sont maladroitement appuyées contre son torse et les siennes me maintiennent toujours par la taille. Une boucle blonde retombe sur son front et je remarque que ses yeux sont injectés de sang et que ses joues sont particulièrement pourpres. Il a l'air mal en point.

Comme s'il revenait à lui, il a un mouvement de recul et fronce le nez.

— Merde, tu es la dernière personne que je voulais voir, là, tout de suite.

Je fronce les sourcils face à sa remarque trop honnêtepour mon égo et le repousse brusquement. Je titube en arrière dans cette cage d'escalier peu utilisée car elle se trouve loin de toutes lessalles de classe. La colère que je nourrissais pour cet énergumène depuis qu'il s'est payé ma tête après m'avoir emmenée à vélo à la Golden Academia me revient en pleine face d'un coup, comme le manche d'un râteau sur lequel j'aurais marché.

— Wow, merci, ça fait plaisir !

Je lève les bras en l'air de fureur. Non mais je rêve ! C'est lui qui me bousculeet en plus, il ose me dire qu'il se serait bien passé de ma compagnie. Ce gars ne manque définitivement pas de culot.

Il évite mon regard et passe devant moi sans s'arrêter.

— Pas maintenant, Heaven.

Son ton m'agace. Il a cru que j'étais son chien ou quoi ? Aux dernières nouvelles, je suis une adulte et je fais bien ce que je veux. Cet imbécile n'a aucunement le droit de me donner un ordre.

Je le suis à la trace tandis qu'il dévale les escaliers.

— Pourquoi ? Parce que tu n'as, je cite, « pas vraiment envie de passer du temps avec moi ici », c'est bien ça ?

Il descend les marches encore plus vite alors je m'arrête en haut des marches et hausse d'un ton.

— Tu sais faire quoi à part fuir, hein, Andreas Thomas ?

Il s'arrête brusquement.

— Heaven...

Son grognement est une mise en garde, mais je croise les bras sur ma poitrine et continue sur ma lancée :

— Oui ? Je t'écoute ? Qu'as-tu donc à me dire ? Et puis, c'est quoi ton problème ? Un jour, tu es adorable. L'autre, tu es insupportable. Sur quel pied je dois danser avec toi ?

Il se retourne et me foudroie du regard.

— Tu veux plutôt dire, quel masque tu dois mettre quand tu te trouves en ma compagnie, n'est-ce pas ?

— Va te faire foutre !

J'ai à peine le temps de cligner des yeux qu'Andreas monte les marches deux par deux et se retrouve à ma hauteur en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. Je recule et il me coince entre le mur dans mon dos et sa figure imposante. Il claque ses mains de part et d'autre de mon visage et me jauge de haut en bas.

— Putain de merde, Heaven, j'ai vraiment, vraiment besoin d'être seul, tu peux comprendre ça ? J'ai déjà du mal à ne pas exploser face à moi-même, alors je n'arriverai pas à te gérer, toi aussi !

Son hurlement vient du cœur. Un peu comme à chaque fois qu'il me parle, de toute façon. Il est si sincère et transparent. Alors que moi, je ne suis qu'un amas de mensonges. Mais cette fois-ci, je n'ai pas envie de mentir.

Je saisis le col de son sweat à capuche pour le tirer un peu plus vers moi. Son nez frôle le mien et ses lèvres s'ouvrent légèrement.

— C'est peut-être parce que, être isolé, ce n'est pas la bonne solution, mon grand ! Cesse de mener ce combat tout seul, espèce de géant stupide.

Ses iris émeraude se remplissent de sentiments contradictoires et je ne saurais deviner lequel prend le dessus. Une bourrasque fait trembler les carreaux de la fenêtre à nos côtés et des gouttesde soleil traversent le verre et perlent sur son visage de miel. Les couleurs de sa palette sont si intenses. Si harmonieuses. Si prenantes. Je retiens ma respiration. Ce pianiste torturé et imprévisible est de loin le plus bel homme que je n'ai jamais vu.

Mais il me sort de mespensées en attrapant mes poignets pour essayer de me faire lâcher prise, et ce bref contact m'électrifie malgré moi.

— J'ai juste besoin de faire le point. Je n'ai pas besoin de ton aide. Et je... je ne veux pas de toi dans mavie.

Ses bras retombent de part et d'autre de son corps et le vide qui me submerge tout à coup me prend à la gorge. C'est là que je vois pour la première fois au combien il a l'air à bout. Que ses épaules affaissées et son allure effacée ne sont pas synonyme de timidité, mais bien d'épuisement.

Comme un Petit Prince qui arrive à la fin de son voyage.

Une petite chose se brise en moi. Une petite chose fane. Une page se déchire et emmène avec elle un morceau de mon âme. Mais comme je sais si bien le faire, je cache mon désarroi en parlant plus fort que lui :

— Si tu savais comme je n'en ai rien à foutre de ce que tu veux !

Il sursaute et m'observe avec de grands yeux.

— Depuis quand es-tu aussi sûre de toi ?

Je me renfrogne. 

— Ce n'est pas difficile d'être plus courageux qu'une mauviette de ton genre.

Mon cœur bat fort de parler avec autant de franchise. Ma respiration est saccadée. J'ai des sueurs froides. Mes jambes tremblent. Et pourtant, j'ai enfin l'impression d'être en vie. Avec lui, je me sens vulnérable, mais je me sens vraie.

Trois étudiants descendent les marches et passent devant nous en nous jaugeant avec insistance. Cela me ramène sur Terre et je réalise que nous sommes toujours à la Golden Academia, au beau milieu d'une cage d'escalier.

Andreas semble réagir aussi et il recule d'un pas avant de passer sa main dans ses cheveux.

— Tu vois pourtant bien que nos échanges n'ont aucun sens ! Tu n'écoutes pas ce que je te dis lorsque je te demande de rester loin de moi. Tu m'ignores quand je t'implore de me laisser seul. Tu te fiches que je te dise que je te déteste. Il te faut quoi, que je te détruise entièrement pour que tu réalises enfin que je ne veux pas de toi ?

Une nouvelle fois, il se retrouve debout devant moi, et je disparais devant tant de prestance. Aujourd'hui, il sent la cigarette et la menthe. C'est étrange ; sur n'importe qui, je suis sûre que ces odeurs m'auraient répugnées. Mais sur lui... j'ai juste envie de le goûter tout entier.

Je hausse les épaules.

— Et pourquoi pas.

Je n'ai plus rien à perdre de toute façon.

Il rejette la tête en arrière et essuie un sourire de rage.

— Tu espeut-être aussi fêlée que moi, à ce que je vois... Bref, oublie-moi, tu veux bien ? Ça vaudrait mieux pour toi, et pour moi aussi...

J'ai vraiment du mal à le comprendre. Un coup, il plaisante avec moi comme si nous étions de vieux amis. Et un autre, il essaye de m'éviter et de me repousser comme si nous étions d'anciens amants. Il a l'air tellement perdu qu'il me perd avec lui aussi.

Je m'avance d'un pas.

— C'est bon ? Tu as fini de réciter tes lignes ?

Je pointe un index accusateur dans sa direction et hausse un sourcil inquisiteur.

— Et il dit quoi, ton cœur ? Je croyais que c'était moi la gamine qui faisait semblant. Et regarde-toi, putain ! Tu es tellement incohérent. Tout ton corps me crie qu'il a besoin d'aide, besoin de moi !

Et en effet, sa respiration est saccadée, ses yeux sont luisants, ses lèvres rougissent car il n'arrête pas de se les mordre en lorgnant sur les miennes et il se trouve de nouveau si proche de moi que nos respirations haletantes se mélangent.

Pourtant, il nie une nouvelle fois.

— Heaven, arrête et va-t-en. Je suis fatigué de tout ça.

— Mais je n'y arrive pas ! je hurle en m'approchant encore un peu. Quand est-ce que vas le comprendre ? Tu es là, dans toutes mes pensées, et tu peux pas savoir à quel point ça me ronge ! Pourquoi tu me fais ça ? 

Il ne répond pas.

— Pourquoi tu me fais ressentir ça ? 

Il se taire dans le silence.

— Qui es-tu pour moi ? 

— Hev...

— Je ne peux pas être loin de toi, c'est au-dessus de mes forces ! Et le pire, c'est que je ne comprends même pas pourquoi.

Me voilà si sincère, et lui, il secoue la tête, encore et encore. Alors, je plaque mes mains contre ses joues écarlates pour le forcer à me regarder. La rougeur sous ses yeux ne fait qu'accentuer le ciel d'orage que j'y vois. Une peinture complexe et torturée. Mais c'est la plus belle des toiles. À côté de ça, La Joconde fait pâle allure.

Cette cage d'escalier est immense, mais j'ai l'impression qu'elle est minuscule et qu'il n'y a que nous, au centre du monde. Nos poitrines montent et descendent en même temps. Son souffle ardent caresse mon visage. Je passe ma langue sur mes lèvres et ses yeux suivent son mouvement. Il déglutit avec embarras. L'air se fait lourd. Les secondes ralentissent. Les bruits alentours se tassent.

Du bout de mes doigts, j'écarte une mèche qui tombe sur son front.

— Et quand tu me regardes avec des yeux comme ça, j'interviens d'une voix faible, je ne peux pas te croire lorsque tu me dis que tu me détestes, et que tu veux que je m'en aille...

Et ses lèvres sont contre les miennes.

C'est un baiser furieux qu'il m'offre. Un baiser impatient. Un baiser désespéré. Et je m'en délecte complétement. Il est ma nouvelle addiction. Il est mon nouveau tout.

Un nouveau pion sur mon plateau d'échec.

Mes mains s'enfoncent dans ses boucles, les siennes m'agrippent par les hanches. Ses lèvres sont brûlantes. Son âme est incandescente. C'est lorsqu'un gémissement vibre dans sa gorge que je perds pied. Un désir intense nait dans mon bas-ventre et parcourt ma peau comme un frisson. Je désir cet homme tout entier. Je le veux rien que pour moi.

Andreas m'embrasse si fort que mes jambes ne me tiennent plus et que mon dos glisse le long du mur. Il me suit dans ma chute sans s'écarter une seule seconde. Il s'agenouille devant moi et je gémis à mon tour. Ses doigts s'enroulent derrière ma nuque et sa langue pénètre dans ma bouche et se met à danser avec la mienne. Il a un goût de menthe. Il a un goût d'espoir. De renaissance.

Et une larme glisse entre nous, lorsque doucement, il s'écarte.

— Je ne peux pas... je ne suis pas prêt, Heaven.

Accroupis entre mes jambes ouvertes, il papillonne des yeux pour en retenir les goûtes, mais cela ne sert à rien. Il pleut déjà trop fort.

Je secoue la tête.

— Non, je ne veux pas dire au revoir, pas déjà. Qui t'a fait ça, hein ? Qui t'a blessé à ce point ? Dis-le moi !

Les larmes qui glissent le long de son visage caramel sont de plus en plus nombreuses. En guise de réponse, il dépose un tendre baiser sur mon front et se redresse. Il me lance le regard le plus douloureux que je n'ai jamais vu. Et je sais que la réponse est là, dans le reflet. Mais je ne vois rien. Je suis incapable de déchiffrer ce message.

Il n'est pas encore temps.

— Un jour, tu le sauras. Et tu comprendras tout. Mais tu n'es pas prête à l'entendre. Et je ne suis pas prêt à te le dire.

Sur ces mots, il dévale les escaliers et disparaît. Mais j'ai le temps d'apercevoir le désespoir assombrir son visage et de voir son cœur voler en éclat.

Et je n'arrive pas à savoir si c'est le début ou la fin d'une histoire.

Lentement, mes bras s'enroulent autour de mes jambes et je ferme les yeux pour me calmer. Je ne sais pas quoi faire. Je ne sais plus qui être. L'homme que je viens de confronter semblait complétement épuisé. Comme une âme qui marche maladroitement sur le fil rouge et qui attend la bourrasque pour se laisser tomber dans le vide.

Comme une rose dénuée de pétales que rien ne pourra jamais sauver.

Andreas, tu es un peu comme une gouttelette de sang perdue dans une étendue de neige : si petite et insignifiante. Pourtant, moi, je t'ai vu.

Aujourd'hui, moi aussi je déteste la neige.

Le chapitre précédent était si court que j'ai décidé de vous publier le suivant dans la foulée.

Vos avis? 

Love uuu!!

Je publierai la suite ce week-end (mais seulement si vous êtes sages) ;)

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