CHAPITRE 13
ANDREAS
J'ai l'impression qu'à chaque fois que je ferme les yeux, c'est toi que je vois danser sous mes paupières.
— Pourquoi « Dredre » ? C'est moche comme surnom ! Moi, je veux un truc cool !
Je croise mes petits bras potelés sur ma poitrine et fais la moue. Elle me regarde avec ses grands yeux marron-tout-court, hausse les épaules et retourne à son collier de marguerites.
— Parce que c'est trop mignon ! On dirait le nom d'un chien.
— C'est pas mignon du tout alors ! je retorque en la secouant par les épaules.
Ses couettes virevoltes dans tous les sens et ses grosses lunettes rouges tombent dans l'herbe verte. Elle éclate de rire.
— Arrêteuh ! Tu m'embêtes, Dredre !
Elle me pousse, récupère ses lunettes et se remet au travail.
— En plus, ajoute-t-elle en cueillant une nouvelle marguerite, je serai la seule à t'appeler comme ça. C'est super méga cool, non ?
Elle brandit fièrement son ouvrage, tout sourire d'avoir trouvé une explication cohérente. Je grimace.
— C'est parce que ton surnom est nul que tu seras la seule..., je bougonne en fronçant les sourcils.
Elle se lève, dépose le collier de marguerites sur le haut de mon crane et lève les bras en l'air.
— C'est vrai, mais ce sera notre truc secret à tous les deux !
Mes joues me picotent et elle pouffe.
— Dredre il est tout rouge ! Dredre il est tout rouge ! elle chantonne et se met à courir dans le jardin en balançant ses bras dans tous les sens.
— C'est même pas vrai d'abord ! je m'exclame en la poursuivant alors qu'elle rit aux éclats.
Le collier de marguerites glisse de mes boucles couleur de sable et tombe au ralenti. Sans m'en rendre compte, je l'aplatis sous ma semelle en me lançant à la poursuite de ma pire ennemie, et les fleurs écrasées hurlent silencieusement avant de périr dans une mort atroce.
✽ ✽ ✽
Mes yeux fixent le plafond un moment avant que je ne me rende compte que je viens de me réveiller. Je me redresse lentement et mon lit grince sous mon poids. Je prends une profonde inspiration et essuie machinalement les larmes sur mes joues avec le dos de ma main. Cela fait longtemps que je n'avais pas fait un rêve qui remonte aussi loin. Parfois, j'oublie à quel point cela fait longtemps que nous nous connaissons, elle et moi. Et mes épaules me font mal de porter tous ces souvenirs à moi tout seul.
La froide lueur de la lune danse sur les meubles de ma chambre et vient se poser sur le vieux piano droit assoupit en face de moi. Mes pieds nus se posent sur le sol et je m'avance vers l'instrument. Je tire le tabouret et m'installe dessus. Je soulève le pupitre, prépare mes doigts et ferme les yeux afin de jouer la mélodie de mon cœur, mais rien ne vient. Pas une seule complainte. Pas une seule note. Le vide. Rien.
Quel piètre pianiste je fais.
Je me plie en deux et suis secoué par une nouvelle vague de sanglots. Elle me manque tellement. J'ai besoin d'elle pour me relever. Je n'arrive pas à faire semblant que tout cela ne m'atteint pas et que je ne brûle pas de l'intérieur depuis maintenant quatre ans.
Je regrette de lui avoir écrit ce mot à l'infirmerie, parce que je n'en pense pas un mot. Je sais que c'est égoïste, mais je la veux. Je veux pouvoir la prendre dans mes bras et me sentir de nouveau complet. Je veux entendre son rire et renaître de mes cendres. Je veux recommencer à zéro avec elle, quitte à effacer le passé et à me brûler les ailes pour de bon.
Je suis bien trop pathétique sans elle. Je ne suis rien.
Mais je serre les dents, sèche mes larmes d'un revers de manche et me lève d'un bon. Si elle est venue m'embrasser à la bibliothèque, moi et pas quelqu'un d'autre, ce n'était pas un hasard. Je veux y croire. Ça doit être le destin ou je ne sais quoi.
J'enfile un sweat à capuche et sors de ma chambre.
Pour une fois, je vais faire de mon mieux.
A suivre...
Andreas décide enfin d'arrêter de se morfondre et d'avancer!
Que va-t-il faire?
Mais le problème est qu'il ne sait pas encore que ce n'est pas si simple...
Vos avis?
A très bientôt pour le chapitre suivant!!