Magenmagot

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Presque 10 ans après la guerre, dans le centre de Londres.

Je vérifie une dernière fois ma tenue, mon chemisier blanc est impeccable rentré dans ma jupe crayon noire. Le noeud noir est parfait autour du col, ma robe de sorcier noire par dessus, mes cheveux sont toujours aussi raides, pas une mèche ne dépasse de ma coupe carrée. Maquillage léger, teint sans défaut, silhouette longiligne, je souris devant mon reflet, mon image est parfaite. J'ai travaillé tellement dur pour en arriver là, les régimes stricts, les études, jamais d'écart, jamais d'excès, se faire discrète et aujourd'hui j'ai réussi.

J'attrape ma sacoche et sors de mon appartement, Je transplane devant l'entrée du ministère et entre d'un pas conquérant. Mon visage est neutre mais je sais que mon expression reste froide et dure, tous s'écartent pour ne pas se trouver sur mon chemin. Cela me rappelle Poudlard ... Les jeunes terrorisés par le blason de Serpentard, la plupart n'osaient pas nous regarder, même si je sais que c'était plus dû à Malefoy qu'aux autres.

Il était si glacial et méprisant, mon meilleur ami n'a d'ailleurs pas beaucoup changé aujourd'hui ... L'aristocratie anglaise, nous avons appris cela depuis tout jeune, être neutre, hautain, indifférent, sauf avec les proches dignes de confiance. Intérieurement je ris en me souvenant que tous me pensaient amoureuse de Blondie. Par Merlin ! Je plains Astoria chaque jour qui passe, il est usant et insupportable quand il s'y met. Mais elle a une patience d'ange et la verve d'une harpie, une main - parfaitement manucurée- qui pourrait réduire le granit en poussière.

Dans l'ascenseur, j'attrape une poignée et indique le département de la justice magique. Un homme que je ne connais pas me lance un sourire qui se veut charmeur et des oeillades pleines de désir, je lui octroie un petit sourire en coin en frissonnant de dégoût. La gente masculine ne fait déjà pas envie, mais ce genre de personnage me dégoûte. Ce ne sont que des bêtes en rut qui se pensent irrésistibles et meilleures que les autres. Des porcs idiots qui traitent les autres comme de la merde et considèrent les femmes comme des objets. Le genre de sorciers que j'ai côtoyés toute ma vie.

La plupart des aristocrates au sang pur pensent que les sorcières sont des faire-valoir seulement bonnes à pondre des héritiers et jouer les potiches dans les réceptions. C'est ce que l'on nous apprend d'ailleurs : pendant que les garçons apprennent l'économie, la politique, la négociation, les petites filles étudient la poésie, le chant, l'art de la table, la décoration, comment organiser une réception, gérer ses elfes de maison et surtout rester à sa place, être discrète, servir son mari, s'occuper des enfants. Quelle horreur, ça me donne envie de vomir !

Toute mon enfance et ma scolarité, j'ai fait ce que l'on attendait de moi, j'ai joué la greluche mesquine, avec des résultats moyens, sauf pour les BUSE et les ASPIC, où j'ai donné le maximum, hors de question que cela fasse tache dans mon dossier scolaire. Je ne comptais pas me marier, avoir des enfants et gérer une maison. J'avais déjà la ferme intention d'être une femme libre de faire ses choix, une femme forte, indépendante, inaccessible. Le seul avantage c'est que mon père ne voyait pas d'intérêt à me faire entrer chez les Mangemorts et c'est tant mieux, quelle idée ridicule. Comment ce genre de méthode très "Gryffondor" aurait pu fonctionner ? L'extrémisme n'est jamais une bonne solution. Avoir une bonne main c'est bien ; être le maître du jeu, c'est mieux.

L'histoire a de toute façon prouvé maintes et maintes fois que la folie des grandeurs menait seulement à sa perte. Mais nous semblons prédisposés à oublier les erreurs du passé et recommencer les mêmes idioties à travers les siècles. L'envie et la cupidité sont de vils défauts. Le pouvoir ne s'acquiert pas d'un coup, il faut construire sa position pendant des années, en plaçant nos pions intelligemment comme une très longue partie d'échec. Qui aurait pu dire que je deviendrais une des meilleures avocates d'un des plus grand cabinet de Londres ? Personne, parce que j'ai joué dans l'ombre.

Calendrier de l'Avent 2021Où les histoires vivent. Découvrez maintenant