Capítulo III

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Le lendemain matin, le froid mordant de la bise se chargea de refroidir quelque peu ses ardeurs.

— Abuela, referme cette fenêtre !

— Il est temps d'y aller, mi pequeño, si tu ne veux pas arriver en retard. Je t'ai préparé l'ancien vélo d'Alba. Il est peut-être un peu petit, mais ça devrait aller.

Après un dernier grognement, Domenico rejeta ses draps contre la vitre qui se referma d'un clic satisfaisant. Il se prépara, ignora le petit déjeuner laissé à son égard dans la cuisine et sortit de la demeure. Frissonnant, il remonta le col de sa veste en cuir. Une épaisse purée de pois empoisonnait l'atmosphère, comme si le brouillard qui encombrait encore son esprit s'était matérialisé à l'extérieur.

Il enfourcha l'espèce de tas de ferraille rouillé censé lui servir de bicyclette et dévala cahin-caha le chemin de terre qui menait à la vallée. Au fur et à mesure de sa descente, des lambeaux céruléens se détachait des brumes et les arbres se paraient d'or et de rouge, tels des bouquets enflammés au milieu des herbes couchées par le vent.

Les mains du garçon s'engourdirent tant et si bien qu'il ne les sentait plus du tout et un filet de morve s'enfuyait sans cesse de son nez malgré ses multiples reniflements. Pas génial, pour une première impression, remarqua-t-il lorsqu'il aperçut au détour d'un virage la joyeuse queue de cheval d'une jeune fille qui devait avoir son âge. Par automatisme, il chercha la sonnette, remarqua qu'elle brillait par son absence, appuya en vain sur ses freins rouillés.

— Attentionnnnnn !

Elle ne devait pas avoir l'habitude de croiser des bolides fous furieux dans le coin car ses réflexes se montrèrent à la hauteur du potentiel du vélo de Domenico : lamentables. Dans un dernier acquis de conscience, le garçon réussit à virer, perdit l'équilibre contre un rocher et finit sa course le nez dans la terre.

Dios mio, est-ce que ça va ?

Un visage avenant encadré de deux boucles d'oreilles dorées remplaça les étoiles qui filaient dans son champ de vision.

— Ça va, ça va, ce n'est pas tous les jours qu'on se fait renverser par une si jolie niña, plaisanta-t-il en réprimant les jurons plus malpolis qui lui venait à l'esprit.

L'inconnue retroussa les lèvres, mal à l'aise, et lui tendit une main pour l'aider à se relever. Elle dégageait un vrai charme, avec ses boucles claires, ses pommettes hautes et le discret trait noir qui soulignait ses yeux. Il l'ignora néanmoins, se redressa sur les coudes, glissa un peu plus le long de la pente, puis arriva enfin à se relever, crotté de partout.

— Je... je suis désolée, balbutia-t-elle en remettant une mèche derrière son oreille. Euhm, je m'appelle Al-, Alicia, et toi ?

— Domenico, ronchonna-t-il, un peu rassuré qu'elle ne se moque pas de lui. Que mierda... Qu'est-ce que je vais faire de ce machin, maintenant ? Je suis sûre qu'il fonctionne plus.

Le garçon hissa avec difficulté son vélo sur la route et fit semblant de l'examiner avec soin : il ne s'y connaissait absolument pas en la matière, mais refusait de s'humilier un peu plus devant la jeune fille.

— Je n'habite pas loin, avança-t-elle alors. On peut y aller, si tu veux, il y a sûrement des pièces de rechanges qui traînent dans le hangar de mon père...

Domenico analysa du coin de l'œil la trajectoire du soleil qui se dégageait enfin des lointaines montagnes et secoua la tête.

— Nan, je vais la laisser ici et faire le reste à pied. Pas envie d'être en retard pour mon tout premier jour d'école.

Dia de los MuertosWhere stories live. Discover now