V. Confundus

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Il l'avait emmenée dans les jardins du manoir, une partie de la bâtisse qu'Hermione n'avait pas encore visitée. Elle passait son temps à l'intérieur, à fuir le garçon d'abord, puis absorbée par ce fichu carnet qui désormais commençait à l'effrayer. Pour Drago, c'était plus que ça : le journal de Jedusor le terrorisait. Hermione se sentait quelque part coupable d'aller contre les recommandations de celui qui était devenu depuis ces quelques jours un colocataire, une présence qu'elle qualifiait désormais d'agréable dans ce manoir si inconnu. Un ami. Ce mot lui venait depuis quelques temps de façon naturelle. Les choses avaient changé si vite. Lui qu'elle détestait. Lui qui l'avait toujours traitée comme une simple moldue sans importance. Qui n'avait cessé de l'insulter, de l'humilier, de lui faire vivre un enfer à Poudlard. Et maintenant... Maintenant, elle n'avait presque plus rien à lui reprocher. Parfois, en y repensant, elle se trouvait stupide de faire confiance aussi facilement. D'autres fois, elle se trouvait stupide de ne pas avoir vu clair dans son jeu durant toutes ces années à Poudlard. Il fallait dire qu'il avait été un acteur des plus convaincants, au point de berner McGonagall.

Drago, au premier contact avec l'air frais, avait laisser tomber sa rancoeur et sa colère. Il fallait avouer que la nuit était douce. Elle l'avait souvent remarqué mais observer les étoiles apaisait la plupart du temps les coeurs les plus meurtris. Ils avaient fini par s'asseoir quelque part. Hermione ne parvenait pas vraiment à se repérer et aurait bien été incapable de dire où ils étaient exactement, ni même de revenir jusqu'à la maison si Drago l'avait plantée là. Ici, sur l'herbe, ils avaient d'abord parlé de tout et de rien, puis ils s'étaient racontés des souvenirs, parlant du passé comme d'un mauvais rêve, comme d'un temps où Drago aurait préféré ne pas devenir qui il avait été. Un temps qu'il regrettait. Un temps durant lequel il avait dû rentrer dans le jeu de ses parents, un jeu si dangereux qu'il aurait pu y laisser la vie. Un jeu qui incluait duper Voldemort. Quelque part, si tout ceci était bien vrai, et Hermione commençait terriblement à le croire, elle ne pouvait pas s'empêcher de laisser un sentiment d'admiration grandir en elle en pensant à ce serpentard en apparence si odieux, si arrogant, qui avait permis de renverser le plus grand mage noir de tous les temps, qui avait permis de fournir à l'Ordre du Phoenix des informations capitales. Informations sans lesquelles ils seraient peut-être morts, tous les deux, à l'heure qu'il est.

Et comme le temps passait, comme les discussions et les rires ne s'arrêtaient pas, Hermione avait senti les doigts de Malfoy venir effleurer les siens. Sans bouger. Comme une caresse d'abord, puis comme une étreinte silencieuse de leurs deux peaux. Elle n'avait osé plonger ses prunelles dans les siennes car elle savait qu'il était sûrement en train de la dévorer des yeux. Elle avait l'impression de le savoir depuis un moment déjà que cette retraite obligée chez les Malfoy avait fait naître des sentiments chez Drago. Elle pensait même que ces sentiments étaient nés bien avant, en secret, pendant toutes ces années. Mais lui qui était censé la détester, lui qui était censé mépriser tout ce qui se rapprochait d'Harry Potter, peut-être avait-il dû taire tous ces signes, toutes ces envies. Hermione ne savait pas bien si c'était une bonne idée de rester ici pour les quelques jours qu'il lui restait. Elle devenait complètement folle. Avec ce livre surtout. Et puis il y avait Drago. Même si ses sentiments paraissaient sincères, elle le voyait clairement maintenant, Hermione était bien incapable d'y répondre. Tout ceci lui avait au moins permis de commencer à effacer quelques doutes concernant cette famille mais elle n'était plus sûre de tirer quelque bénéfice en restant plus de temps.

- Il commence à faire frais tu ne trouves pas ?

Hermione n'avait rien trouvé de mieux pour se tirer de ce mauvais pas. Drago retira ses doigts des siens, semblant revenir à la réalité.

- Je vais te raccompagner.

Et ainsi, sans rien dire de plus, il l'avait ramenée jusqu'à la porte d'entrée, laissant Hermione comprendre par elle-même qu'il avait encore besoin d'un peu de temps hors du manoir. Elle était montée jusqu'au palier, s'était précipitée contre la vitre qui donnait sur l'allée principale du parc. Elle avait observé Drago faire demi-tour, marcher au clair de lune, les mains fourrées dans ses poches, la tête basse. Machinalement, elle avait posé sa main contre la glace, la gorge serrée. Elle détestait lui mentir. Elle détestait ne pas pouvoir rester encore un peu. Car après tout, ils avaient fini par faire tomber le mur qui les avait si longtemps séparés. Il s'avérait être drôle, et plus érudit que tout ce qu'il avait pu montrer jusqu'alors. Elle avait l'impression, au contraire, que lui la connaissait depuis si longtemps, qu'il lisait en elle comme dans un livre ouvert et c'est peut-être ça qui lui faisait le plus peur. Qu'elle finisse par le connaître par coeur lui aussi. Ce mur, Hermione refusait de le faire tomber complètement. Elle ignorait ce qui se cachait derrière, si tout ceci n'allait pas l'emporter sur des chemins qu'elle n'avait jamais imaginé emprunter. Elle avait peur de faire confiance trop tôt, trop vite. Ça ne lui ressemblait pas, à elle, la jeune gryffondor qui aimait tout planifier, tout imaginer à l'avance, tout prévoir.

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⏰ Dernière mise à jour : Apr 19, 2020 ⏰

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Elvis (Tomione)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant