Appartenance

Neuvième

« Kovan ! »

j'ai sursauté

« Avance toi s'il te plait. »

Dans l'ombre depuis le début, l'un des gardes s'avance. C'est celui qui est venu me chercher tout à l'heure. La tension s'abat encore plus dans la salle. Plus il avance plus les regards cherchent à le décrypter. Les gens arrêtent de respirer tout comme moi. Ma sœur me regarde avec encore et toujours ce sourire suffisant. Ses yeux pétillent.

Toujours en la regardant elle, je vois du coin de l'œil qu'elle tend sa main vers lui. Les murmures ronflent, mon cœur tambourine. Il est passé sous la lumière artificielle. J'entends des exclamations, des cris de stupeur. Puis de nouveau un silence. Ma sœur a levé son autre main, poing serré dans un geste brusque. La tension qui régnait s'intensifie, plus personne ne parle ou ne chuchote. A croire que plus personne ne respire. Le respect qu'elle influe est tellement intense que je ne peux que déglutir.

Si cet homme, à ses côtés, est bien mon appartenant, je devrais ressentir ce qu'on est censé ressentir. Les frissons, la chaleur, les picotis électriques, le feu embrasant le corps, la tête qui tourne. Les yeux blancs.

Némésis se tend, se penche vers moi, et me murmure à l'oreille :

« Vois-tu, Erra. Je sais qui est ton appartenant. Je te teste depuis cette fameuse nuit. »

Elle se releva d'un coup, ses cheveux qui d'habitude sont attachés en un chignon strict sont relâchés. Ils sont si long qu'on dirait le voile des mariages traditionnels entre appartenants. A ceci prêt que ses cheveux sont noirs. Son regard se porta sur cet homme, Kovan. Je n'arrive pas à savoir à quoi il ressemble. Je me demande si quand je vais croiser son regard je vais... on va ressentir quelque chose, comme tout à l'heure. Je sais que c'est lui. Je ressens cette tension. L'humidité de l'air alourdie l'ambiance tout comme les regards des uns et des autres... qui roulent sur cet homme, sur Nemesis et sur moi.

J'ai cette impression que le temps n'avance plus. J'ai arrêté ma respiration sans m'en rendre compte. Au-delà de notre cercle à trois, je vois ma mère et son regard. Elle a les lèvres pincées et les sourcils froncés. Ses yeux sont focalisés sur moi, je sens la déception que je lui procure. J'aperçois mes deux frères à ses côtés. Alexander me sourit chaleureusement, il croit en moi. Je pense qu'il chercher à m'apaiser, à me montrer qu'il sera toujours là. Tyler regarde ses ongles, totalement désintéressé par la situation. Père n'est pas là. Il n'est jamais vraiment là. Je sais pourtant que je suis sa fille, son bijou comme il dirait. Je suis la seule à avoir la force et le courage de prendre les décisions de grands chefs, malgré mon poste. Il a toujours cru en ma bonté, en mon assurance. Sûrement même plus que moi. Il aimait bien me rappeler cette phrase : « Une main de fer dans un gant de velours ». Mais je suis à même de penser que cette phrase correspond plus à ma sœur. Le peuple la craint mais le peuple l'aime. Ils ont craint ma mère mais ne l'ont jamais aimé. Ma mère était un tyran. Elle a tué sa propre sœur quand elle était petite. Elle a tué sa mère le jour de ses vingt ans. Elle a voulu tuer Némésis à sa naissance. Le pouvoir reste le pouvoir. On aime ça, on le chérit, on l'apprivoise. Finalement, c'est lui qui nous apprivoise. Et cet amour pour le trône s'est transmit à ma sœur.

Mes mains restent crispées sur la chaise, j'ose tourner mon regard vers lui. Il est n'est pas si beau. Je ne peux m'empêcher de le penser. Kovan n'est pas un canon de beauté, je pense même que certains le trouvent laid, pourtant, à mes yeux il a ce quelque chose qui ne peux que me plaire. Ses cheveux bruns sont rasés sur les côtés, mi-long sur le dessus, et bouclés. Il a de petits yeux marrons clairs avec de légères traces rougeâtres ainsi que de long cils. Sa pomme d'Adam ressort énormément et sa mâchoire est très carrée. Son nez, bien qu'un peu grand, revient en trompette, et je peux remarquer aussi de grandes oreilles très collés. Sur sa peau halée, de légères taches de rousseur le parsème, tout comme une longue cicatrice sur son front.

« Erra Vander. Voici Kovan Morgalas. Originaire de Thréolis, entré dans la communauté depuis deux années. Le reconnais-tu ? »