Épilogue : partie une

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Base américaine de Pearl Harbor, île d'Oahu, 7 décembre 1941...

En cette agréable matinée de décembre, la jeune infirmière profite des premiers rayons du soleil pour effectuer quelques pas sur la plage. La petite maison toute blanche où elle vit est sans prétention, inconfortable presque, mais se réveiller ou s'endormir avec l'océan n'a pas de prix. Ses pieds nus s'attardent et caressent le sable langoureusement, elle aurait apprécié une plongée dans les eaux.

Elle songe aux malheureux qui se gèlent les fesses sur plusieurs coins de la planète. Dans cet endroit du Pacifique, il fait toujours beau. L'île évoque une merveilleuse esquisse de ce que pourrait être le paradis.

Sauf que le devoir l'appelle. D'un geste gracieux, elle noue ses longs cheveux bruns avec un ruban noir. Le grondement du ressac résonne comme un adieu à la frêle silhouette.

En arrivant à l'hôpital, elle se rend compte qu'elle est en avance. Elle laisse échapper un soupir de contrariété. Au fond, elle aurait largement pu s'offrir quelques brasses. Elle n'ignore pas que sa journée va s'écouler au rythme des coups de soleil, des piqûres de méduses, ou des plaies sur les récifs hawaïens. Peut-être une attaque de requin ? Sans doute non, elles s'avèrent plutôt rares.

Heureusement, il y a Kevin ! Avec ce patient, elle retrouve la vraie signification de son métier. Tout ce pour quoi elle a choisi de devenir infirmière, et pas vendeuse ou institutrice.

Le besoin d'aider ceux qui sont en souffrance ! Ce n'est pas rien, et c'est essentiel pour cette ravissante jeune fille. Ann, sa collègue de garde, l'observe avec une suspicion adroitement feinte.

— Dis donc toi ! Tu ne serais pas venue en avance pour taper la causette avec un beau soldat.

— Qu'est-ce que tu vas imaginer ? proteste-t-elle en rougissant un peu. Kevin a parfois le moral au plus bas, je ne fais que mon travail en passant du temps avec lui.

— Et tu as bien raison ! acquiesce volontiers Ann. Ce gars a perdu ses deux jambes dans un crash. Contempler une superbe nénette ne peut que lui rendre la pêche et l'envie de repartir à zéro.

Ann est une collègue très agréable. Même si elle se montre parfois indiscrète, voire maladroite. La jeune infirmière s'éloigne en se gardant bien de lui donner du grain à moudre. Elle rend visite à un patient, ni plus ni moins. Pourquoi faut-il qu'Ann imagine des sentiments amoureux ?

Ce qu'elle ressent pour Kevin est bien plus proche du respect et de l'amitié. De son côté, le soldat n'a jamais eu la moindre parole déplacée. Elle admire le grand courage dont il fait preuve face à une réalité des plus cruelles. Hélas, il semble triste et préoccupé depuis quelques jours. Elle frappe légèrement à la porte de sa chambre, avant de se glisser à l'intérieur.

— Comment va mon patient préféré ? questionne-t-elle avec entrain.

Les yeux gris acier du soldat enveloppent la jeune fille d'un regard chaleureux.

— Difficile à dire, murmure-t-il. J'ai l'impression que quelque chose de grave va se produire, et je ne peux rien pour empêcher ça. C'était pareil quand mon appareil a plongé vers le sol, j'ai perdu le contrôle...

— Un passage à vide tout au plus, suggère-t-elle.

Un grondement sourd, bien différent de celui du ressac, ébranle soudain les murs de l'hôpital. Affolée, Ann surgit dans la chambre.

— C'est une attaque ! Des bombardiers ennemis ! Il faut se mettre à l'abri !

Elle a disparu tandis que le bruit s'est intensifié, jusqu'à devenir terrifiant. La jeune infirmière a entrepris de rapprocher un fauteuil roulant du lit.

— Allez, Kevin ! On se tire d'ici, ordonne-t-elle brièvement.

— Dépêchez-vous de trouver un endroit sûr, je vais me débrouiller ! réplique le soldat d'un ton ferme.

— Nous partons ensemble, Kevin ! Vous êtes mon patient et je suis responsable de vous !

Il esquisse un léger sourire, puis il attrape la main qu'elle lui tend.

— Je le savais ! Je savais que vous diriez ces mots...

Sur la base américaine de Pearl Harbor, les Japonais viennent de lancer une première vague de bombardement. Elle sera très vite suivie d'une deuxième vague, tout aussi destructrice et meurtrière que la précédente. Quelques heures après le drame, les rares survivants commencent à entrevoir le désastre. Le visage en larmes, Ann erre parmi les décombres de l'hôpital. Elle remarque enfin un ruban noir, taché de sang par endroit.

Sous les gravats, les sauveteurs dégagent les corps irrémédiablement brisés de la jeune infirmière et de Kevin. Elle est allongée sur lui, dans une ultime tentative pour le protéger.

— Ils sont morts tous les deux, constate l'un des hommes. Pauvre gamine !

— Elle s'appelait Wallis, souffle Ann entre deux sanglots, Wallis de Vitto...

***

Wallis était infirmière finalement

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Wallis était infirmière finalement... et pas aspirante toubib ^^

En média, une des magnifiques plages de l'île d'Oahu (signifie l'endroit).




AngélusWhere stories live. Discover now