Chapitre 9 : Maîtres et Humains

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Depuis le bureau où elle se trouvait, Hélène entendait les cris reprendre de plus belle.

- Mais qu'est-ce qui se passe à côté ? s'étonna la femme "Maître des Ténèbres".

Hélène ne répondit pas, n'osant pas imaginer ce que la pauvre personne pouvait bien subir.

- Reste ici s'il te plait, demanda la femme, je vais aller voir !

***

La main du garde s'approchait désormais du visage d'Hugo, tétanisé, qui n'en pouvait plus de crier.

Soudain, la porte du bureau s'ouvrit en grand et une femme entra en trombe.

- Mais tu es fou ! s'exclama cette dernière. Pourquoi le traiter ainsi ?

- Il m'a aperçu dans son monde, se justifia le garde. J'étais obligé de l'amener ici ! C'est la loi.

- Bien sûr, là n'est pas la question ! Mais pourquoi diable blesser ce pauvre garçon ?

- Il est insolent et ne nous respecte pas, nous les Maîtres !

La femme ouvrit de grand yeux, l'air effarée par ce qu'elle entendait.

- Pardon ? Mais tu te crois où ? Nous ne sommes plus au temps des dragons ! Évidemment qu'il est insolent, tu imagines le bouleversement qu'il a pu subir après avoir changé de monde ? Un peu de tolérance, enfin ! Et tu sais très bien que la sanction par blessure physique est strictement interdite depuis des lustres. Dégage de là, je préviens la sécurité.

- Et lui, l'humain, j'en fais quoi ? répliqua l'homme, vexé.

- J'appelle quelqu'un pour te remplacer. Les Droits des Humains existent je te rappelle. Sors de ce bureau, avant que je n'aille rapporter ton comportement à nos chefs.

Estomaqué devant la scène qui se déroulait devant lui, Hugo n'osait pas émettre un son. Ainsi, une femme en tout point similaire physiquement à cet homme monstrueux venait-elle de le sortir d'affaire ? C'était le monde à l'envers.

- Un autre humain m'a aperçu, là-haut. Il était avec lui, déclara le garde en pointant du doigt Hugo.

- Quel âge avait-il ? demanda la femme en fronçant ses sourcils noirs.

- Le même âge que lui.

- C'est le seul à t'avoir aperçu ? A-t-il pris des photos ?

- Oui, il n'y avait que lui. Non, pas de photos à ce qu'il me semble.

- Et bien ce n'est pas grave du tout ! déclara la femme en haussant les épaules. Personne ne le croira, et lui-même finira par douter de ce qu'il avait aperçu. Nous n'avons absolument pas besoin d'aller chercher cet autre garçon, laissons-le tranquillement chez lui.

Hugo ressentit alors un immense soulagement. Bonni ne risquait donc rien. Le garde Maître quitta la salle, énervé.

- Merci beaucoup, murmura Hugo, encore sous le choc.

- Comment tu te sens ? s'enquit la femme.

- Je... J'ai un peu mal, avoua-t-il.

- Fais-moi voir tes bras. Où t'a-t-il brûlé ?

- Sur les avant-bras et le dos.

- Quel abruti ce garde ! s'énerva-t-elle. C'est à cause de gens comme lui que nous sommes détestés par les humains ! Tu sais quoi ? Je vais écrire un mot à la haute autorité. Ce qu'à fait ce Maître est inadmissible et contraire aux lois de protections des humains. Une déclaration des Droits Humains a été établit depuis longtemps déjà, et aucun Maître n'a l'autorisation de blesser un humain. C'est encore pire s'il s'en prend à un mineur. Je suis sincèrement désolée pour tout ce qu'il t'a fait subir. Ne crains rien, tu ne risques plus rien maintenant.

- Merci encore, répéta Hugo, n'en croyant toujours pas des oreilles.

La femme sortit alors une pierre rouge de sa cape, ce qui dit frémir Hugo. Elle fit tourner la petite pierre sur elle même, et celle-ci s'alluma, comme s'il s'agissait une lampe DEL. À la grande surprise du garçon, la femme se mit à parler à la pierre.

- Oui Maître Supérieur ? Envoyez-moi un Maître supplémentaire... oui... ainsi qu'une brigade de secours.

La pierre servait-elle donc de microphone ? Hugo resta perplexe face à cette technologie.

- Mon garçon, d'où viens-tu ? lui demanda la femme.

- Heu... de Boston.

- Très bien, merci. Allo Maître Supérieur ? Le Maître Garde chargé de sauver les élèves de Boston vient de maltraiter sauvagement un rescapé humain mineur, enfreignant les articles 135.3, 223.7 et 542.9 de la Déclaration des Droits Humains... Oui, blessé par contact physique... Les bras et le dos... Merci beaucoup.

La femme "raccrocha" et la lumière de la pierre s'éteignit.

- C'est bon, quelqu'un vient s'occuper de tes blessures et te soigner. Encore sincèrement désolée pour cet accueil...

***

Hélène restait assise, seule dans le bureau. La femme, partie au secours de la personne qui avait poussé des cris atroces, n'était toujours pas revenue.

Hélène réfléchie. Si elle avait été plus téméraire, sans doute serait-elle allée voir ce que la femme avait écrit sur ses plaques de pierres. Elle aurait même pu s'échapper, car la porte était restée ouverte. S'échapper, mais pour aller où ensuite ? La jeune rescapée se souvenait des longs couloirs tous identiques. Impossible de se sortir d'ici. De plus, elle ne souhaitait pas décevoir la confiance de la femme "Maître des Ténèbres".

Elle patienta donc, immobile, se contenta s'explorer la pièce du regard, mais n'aperçut rien d'autre que des murs gris, unis.

***

- Heu... Madame, je peux vous poser une question ? risqua Hugo.

- Ne m'appelle pas ainsi, sourit la femme à la peau rouge.

- Comment je dois vous appelez alors ?

- C'est délicat, hésita-t-elle. La tradition exige que l'on nous appelle Maîtres, mais je trouve que cela crée une hiérarchie trop importante entre nos deux espèces. Alors je ne sais pas comment tu peux m'appeler. Mais pose-moi donc ta question.

- Pourquoi je suis là ?

Alors la femme entreprit de lui conter la même histoire qu'à Hélène.

- Donc l'autre Maître était censé nous protéger d'un incendie ? Mais il n'y a pas eu d'incendie !

La femme s'immobilisa.

- Il était pourtant censé empêcher cet incendie. Deux solutions : soit il avait réussi à stopper l'incendie avant de vous voir, soit...

- Soit il y a eu un incendie dans mon lycée après que je sois parti ! paniqua le jeune garçon. Mais mon meilleur ami est là-bas !

- Calme-toi, nous n'en savons rien. Et puis, ton ami a déjà réussi à échapper au Maître qui voulait le capturer, donc je pense qu'il saura affronter un incendie. Tiens, voilà quelqu'un qui arrive pour s'occuper de toi.

Hugo se retourna. Un homme, à la peau tout aussi rouge que ses collègues, entra à son tour dans le bureau, échangea quelques mots avec la femme puis celle-ci les quitta.

***

Cela faisait maintenant bien longtemps qu'Hélène patientait, seule dans le bureau.

Soudain, la porte s'entrouvrit. Elle se leva, s'attendant à accueillir la femme qui l'avait laissée là. Curieusement, personne ne pénétra dans la salle. Intriguée, la jeune fille s'approcha de la porte, ouverte de quelques centimètres seulement. Son cœur battait de plus en plus vite. Mais elle s'efforça de rester le plus calme possible.

- Il y a quelqu'un ? lança-t-elle en tendant la main vers la poignée.

Un sifflement lui répondit, et Hélène baissa la tête. Immédiatement, elle poussa un grand cri de stupeur et recula à toute vitesse vers l'autre bout du bureau.

Par terre, un long serpent rampait vers elle.

Hélène Et Le Monde D'en Bas [EN PAUSE]Where stories live. Discover now