Chapitre 16 : contorsions

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L'homme de main s'en va, laissant Félix seul avec le garde du corps et l'informaticienne. Qui est sans doute neuroinformaticienne, vu ce qu'elle fait. Est-ce qu'elle fait parti des ingénieurs de Hailcourt ? Félix commence par lui demander comment elle s'appelle, pour être sèchement interrompu par un avertissement :

"Non. Vous ne me parlez pas. Si j'entends encore un mot sortir de votre bouche, je vous remets une dose de somnifère, pour moi ça ne change rien à part que mon collègue va devoir vous porter quand j'aurai fini mon travail. Alors je m'en fous que vous ayez envie de pisser ou plein d'argent à m'offrir ou que le cul vous gratte, vous la fermez. Vu ?

Félix opine prudemment. Cette nervosité est un signe de vulnérabilité, mais il ne va pas courir le risque de se faire endormir maintenant. Mieux vaut faire profil bas encore un peu, puis lancer quelque chose qui les force à réagir. Une fausse crise de quelque chose... Il se sent capable de vomir volontairement s'il le faut. Juste le temps qu'ils ne se méfient plus...

Il attend, sage comme une image. Il ne les regarde même pas directement. Devant lui, le garde s'ennuie de plus en plus. A coté, l'informaticienne n'a pas grand chose à faire pendant les réglages s'affinent, elle vérifie de temps en temps son écran et reste bien plus concentrée par son téléphone. Elle aussi se met à bailler. Ils ne s'attendent pas à...

Félix ne s'attend pas non plus au coup de fil qui les fait sursauter tous les trois. La femme décroche et jure, avant de s'exclamer, affolée :

— On se barre ! Les clones sont là !

— Et lui, demande le gardien, on l'embarque ?

— Lui le premier ! Moi je planque le matériel, toi tu le fait disparaître !

— Comment ?

— Tu le fous dans la voiture et tu te barres ! Ils ont pas bouclé la zone, ils sont en train d'interroger la patronne, elle gagne du temps mais il faut qu'on se magne !

Jurant à son tour, l'homme tranche à la hâte les liens de Félix tandis que l'autre lui enlève le casque sans précautions. Félix est un peu groggy après ce traitement, mais ce n'est rien à coté de la sensation du sang qui revient irriguer ses mains et ses pieds, lui arrachant au passage un gémissement de douleur. L'homme gronde :

— Bordel, commence pas ! T'as intérêt à me suivre !

— Je... je peux pas... Vous m'avez tailladé ! J'arrive pas à me tenir debout !

Ce qui est partiellement vrai, hélas. Il pourrait se tenir debout, au prix de mille douleurs, mais qu'on ne compte pas sur lui pour courir ou être précis. Félix est bien obligé d'admettre qu'il va devoir jouer le tout pour le tout sans être en pleine possession de ses moyens. Pour autant, l'idée d'attendre une occasion plus favorable ne l'effleure même pas.

L'homme jure encore et attrape Félix qu'il se jette sur l'épaule comme un sac, tout en le menaçant des pires châtiments s'il s'avise de faire le moindre bruit. Ils quittent la cave. Félix ne sait pas où ils sont, si ce n'est que c'est un sous-sol plutôt bien aménagé, et qu'au bruit ils sont sans doute les seuls à s'affoler. Un immeuble de bureaux ? En tous cas pas un repaire rempli de criminels. Parfait.

Il profite d'un effort de son porteur pour se jeter de l'autre coté et le déséquilibrer. Lorsque l'homme tente de lui attraper les bras pour le maitriser, Félix se débat brusquement comme un chat, griffant, mordant, et surtout arquant son corps trop brusquement pour être tenu.

L'autre est un professionnel, de simples contorsions même violentes et chaotiques ne suffisent pas pour s'arracher de sa poigne, mais ça a fait une bonne diversion : Félix a réussi à lui voler son arme.

Quitte ou double (version roman NaNoWriMo2019)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant