Pourtant, malgré tout, il est là, dans mes bras. Il m'a parlé. Il a suivi une thérapie. Il s'est battu pour s'en sortir. Il a poussé les portes d'AngelHope. Il a décidé de me faire confiance.
C'est la personne la plus forte que je connaisse.

— Gabriel? soufflé-je sans le lâcher.

— Oui ? demande-t-il sur le même ton.

— Tu voudrais te souvenir ? chuchoté-je.

— Je ne sais pas...

— Ne pas savoir peut être pire, tu ne crois pas ?

— Et savoir, détruire encore plus, non ?

— Je peux me montrer honnête ?

— Oui... c'est ce que j'attends de toi.

— D'accord. En fait, je pense que tout au fond de toi tu sais déjà ce qu'il s'est passé... sans doute pas dans les détails, mais tes cauchemars, c'est ton inconscient qui fait remonter les souvenirs. La drogue a sans doute anesthésié ton cerveau, mais c'est là et ça ne demande qu'à sortir.

— Tu penses que ça pourrait m'aider ?

— Oui. Je pense que ça pourrait te libérer et te guérir.

— J'ai peur...

— Je sais, mais je suis là. Je le serai toujours.

Il ne répond rien et me serre un peu plus fort contre lui. Je le laisse digérer mes paroles.

— D'accord, finit-il par lâcher. Je suis d'accord.

— Je t'enverrai des numéros de médecins sérieux qui pratiquent l'hypnose, si tu veux.

— Oui, merci.

Nous restons encore de longues minutes l'un contre l'autre. Puis, nous nous détachons doucement, parce qu'il en ressent le besoin. Il a les joues un peu rougies, tout comme ses yeux. Je suis persuadé que je dois être son exact reflet. Tandis que je me recule un peu pour lui rendre son espace, nos regards restent accrochés. Ses yeux ne me fuient pas malgré la situation qui pourrait être gênante.

Je me relève tout en douceur, maîtrisant chacun de mes gestes pour ne pas l'effrayer et m'assieds à ses côtés en laissant une distance que j'estime raisonnable. À ma plus grande surprise, il se rapproche. Nos genoux se frôlent, nous ne nous touchons plus, mais nous sommes proches. Je n'ai jamais autant ressenti la présence de quelqu'un à mes côtés.

Nous ne parlons pas. C'est inutile. Tout a été dit. Il faut juste que nous nous remettions un peu de nos émotions avant de reprendre la route et retourner chacun à nos vies respectives.

C'est ce que nous faisons une petite heure plus tard, après nous être salués. Pour la première fois depuis que je connais Gabriel, cette fois je n'ai pas peur de le perdre, de le voir reculer ou me fuir. Il a avancé aujourd'hui, tout comme moi et j'ai totalement conscience que nos destins sont désormais liés.

*

Je fais face à l'immeuble gris qui me surplombe. J'hésite. Ça fait tellement longtemps que je ne suis pas venu ici. Je n'en avais plus ressenti le besoin depuis un moment. Je soupire en passant une main dans mes cheveux. Je ne sais pas si c'est une bonne idée, mais d'un autre côté, le récit de Gabriel me travaille beaucoup et j'ai besoin d'évacuer. Courir autour du parc n'est pas suffisant et je ne peux en parler à personne.

Pour n'être qu'avec toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant