Partie 1 A.A.S.V.S. 3

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Un jour alors que j'avais neuf ans, mon père est revenu de l'hôpital profondément malheureux. En nous épargnant les détails, il nous a raconté qu'il venait de perdre une patiente qui avait fait un déni de grossesse et qui avait accouché d'une petite fille avant de décéder trois jours après.

C'était aux environs d'Halloween. Nous n'étions pas encore dans le manoir. Mon père nous a raconté que pendant qu'il tentait de sauver la femme et sa petite fille, quatre enfants attendaient dans la salle d'attente avec leur père et leurs grands-parents. Mes sœurs et moi étions suspendus aux lèvres de notre père, car il ne nous racontait pas souvent ses « histoires de médecin ».

Tout le monde était triste, avait peur, était renfermé dans son chagrin. Tout le monde, sauf la petite fille. Mon père a prononcé son prénom : Mathilde. Il n'a pas dit grand-chose d'elle, mais j'ai senti dans sa voix que cette fillette, qui avait mon âge, avait un courage immense. Et, pendant les années qui ont suivi j'ai gardé à l'idée cette petite fille courageuse, qui rassurait ses petits frères pendant que leur maman était très malade, sans fléchir de son côté.

Quand le bébé était né, après quelques examens de ses fonctions respiratoires, mon père était sorti dans le couloir avec le nourrisson dans mes bras et c'est sa grande sœur qui s'était levée et avait pris le nouveau-né dans ses bras.

Pendant trois jours, cette famille était restée dans le couloir, à attendre des nouvelles de la femme qui se remettait de l'accouchement et de tout le reste. Un déni de grossesse, révélé à plus de cinq mois, et qui avait accéléré des problèmes de santé chez la mère. Le bébé était né le plus tard possible, en bonne santé.

Et chaque soir pendant trois jours, quand papa rentrait, nous écoutions raconter la suite de l'histoire, et je demandais comment la petite fille si courageuse avait réagi.

La maman était morte trois jours plus tard, entourée de ses enfants et de son mari. Le nourrisson avait été baptisé, la fille, Mathilde, était la marraine. Le parrain était un de ses amis, du même âge qu'elle, qui semblait proche de la maman de son amie.

Cette histoire a profondément touché mon père. Il n'a jamais oublié le courage de cette fille, qui combattait les larmes pour accueillir sa petite sœur dans la famille. Ce n'est que quelques année plus tard, après qu'il fut sûr de son poste dans l'hôpital dans lequel il travaillait, qu'il a recontacté la famille de la femme qui était décédée.

Ceux-ci lui ont dit qu'il y avait une maison libre dans le hameau sur la propriété, et que nous y étions les bienvenus. Il y avait un grand jardin et de nombreuses chambres. C'est ainsi que nous avons déménagé au Manoir, cette grande maison parcourue de courants d'air que j'ai tant détestée. 

Les folies de l'amour [en pause] Where stories live. Discover now