Chapitre huit.

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      Je suis cloitré dans ma chambre depuis que je suis rentré, soit depuis dix-sept heures. Mon téléphone est en mode silencieux et l'écran est face à mon lit. Je suis seul, de nouveau. C'est dure, ça ne l'était pas autant quand j'étais en médecine. C'est vrai que j'avais des coups de mou, mais j'avais le nez dans les cours et les bouquins la plupart de mon temps, me faisant oublier ma profonde solitude. 

Je n'ai plus mes amis du lycée, deux d'entre eux aimeraient me reparler, mais les deux autres ne le veulent pas. L'un est réticent, l'autre m'a bloqué. 

Et maintenant, je me dis que je peux perdre Ezel tout aussi facilement. Je suis pas une personne intéressante, ni drôle, ni intelligente. Je n'ai rien de particulier et il va vite s'en rendre compte. Puis, il avait l'air de bien s'amuser avec son nouvel ami. J'ai mal au cœur chaque fois que je me rappelle de son expression. 

Je n'ai rien avalé pour le dîner. Mon cerveau est trop embrouillé. J'attends des messages et en même temps, je n'en veux aucun, je souhaite qu'on me laisse tranquille. 

    Finalement, je me réveille tout habillé de la veille. Contrarié, je me lève en grognant et pars prendre ma douche. Je me brosse les dents, sans avoir mangé avant, et file pour prendre le métro. Je ne sais même pas si nous avions des cours en commun pour cette journée, Ezel et moi, mais j'essaie de ne pas m'attarder sur la question. Je suis assis et essaie de me plonger dans les lignes de mon livre. 

Un soupir m'échappe quand je ne parviens pas à me concentrer, alors que le métro est relativement silencieux, aujourd'hui. Je pose mon livre sur mes genoux et ferme les yeux, tout en penchant la tête en arrière. J'aimerai tellement dormir. Avoir passé ses deux mois de vacances totalement libre et sans aucune obligation m'y a donné goût. J'ai envie que ma vie soit une infinité de vacances d'été. 

Alors que je suis sur le point de m'endormir, je sens un bras passer sur mes épaules et un petit rire, juste à côté de moi. 

— Hello la belle au bois dormant. 

Je me mords l'intérieur des joues et n'ouvre pas les yeux. Je sais qui se trouve sur le siège d'à côté, je sens même sa cuisse collée à la mienne.  

— Hey oh, on se réveille ! dit-il en me pinçant une joue. 

Un couinement passe la barrière de ma bouche et j'ouvre enfin les yeux. Je tombe à quelques centimètres de son visage, les sourcils légèrement froncés, mais ceux-ci se dérident bien vite en me voyant éveillé. 

— Ah, te revoilà parmi nous, il pouffe. 

Je sens mes joues chauffées, notre proximité me met mal à l'aise. Sans que je ne puisse m'en empêcher, je me décale, m'éloignant un peu de lui pour prendre une distance convenable. S'il s'en est aperçu, il n'en montre rien et garde son sourire habituel. 

— On dirait bien qu'une certaine personne a passé sa nuit devant une série.

Je me force à sourire. Eh non, j'ai passé ma nuit à réfléchir à toi et à mon ancien pote. Je me suis souvenu que je n'étais pas aussi possessif, auparavant. Je n'avais jamais exigé l'exclusivité d'une personne, bien au contraire, j'aimais la vie en groupe. Alors qu'est-ce qui cloche avec Ezel ? Deux choix se sont imposés à moi : soit ma solitude des deux ans m'a changé, soit Ezel me donne envie d'être le seul pour lui. J'aimerai pencher pour le premier, mais le deuxième me paraît cohérent, à mon plus grand dam. 

— T'as regardé quoi ? me demande-t-il. 

— Oh, un truc sans importance. On a cours ensemble, aujourd'hui ? 

Il faut détourner la conversation, sinon, je vais m'enfoncer dans un mensonge. 

— Yes ! On est de nouveau ensemble, dit-il en posant sa tête contre mon épaule. 

Devant nous, je vois des gens nous regarder. Il y a un type d'une trentaine d'année qui semble attendri par ce qu'il voit, une grand-mère qui, elle, nous assassine des yeux et enfin, un adolescent qui nous a juste jeté un coup d'œil avant de revenir sur son téléphone. 

Je fixe la femme âgée, ne comprenant pas pourquoi un tel regard méchant. Où était le problème ? Si nous avions été deux femmes, jamais elle n'aurait fait attention à nous. Ca me peine beaucoup, que deux hommes ne peuvent pas être tendres l'un pour l'autre. J'ai envie de lui expliquer que nous ne faisons rien de mal, que nous sommes juste tactiles et que, ce que nous faisons ne concerne que nous. J'aimerai qu'elle comprenne qu'au final, c'est elle qui blesse, en agissant ainsi. 

Je finis par baisser les yeux, ne parvenant pas à soutenir tant de colère et de dégoût dans un regard. Ca me rend triste. 

Comme s'il a remarqué quelque chose, Ezel relève son visage vers moi et fronce les sourcils. 

— Ca ne va pas ? 

Je pose un regard doux sur lui. Je ne peux pas lui en vouloir, je n'en ai pas le droit. Il a une vie sociale et des amis. C'est une personne si gentille, généreuse, gaie, comment lui en vouloir ? Surtout pour une chose que je n'accepte pas. Je ne dois pas lui imposer mes craintes. 

Avec beaucoup de courage, je réduis la distance, que j'avais moi-même crée, entre nous. Je lui offre cette fois un sourire sincère. 

— Tout va bien, je suis content que nous sommes ensemble pour la journée. Ca été, hier ? 

— Moi aussi je suis content, il me répond en souriant. 

Il est vraiment trop adorable. Mon ventre se serre. 

— Et ouais, elle était trop mignonne en ouvrant ses cadeaux, j'ai une tonne de photos dans mon téléphone, il rigole. 

Ezel le sort alors de sa poche et me montre une partie de sa vie. Je le regarde défiler les clichés et commenter chacun d'eux. 

Mon cœur se met à palpiter dans ma poitrine quand je pense à une chose : il est beau, mais pas le beau comme un simple beau mec, non, il est beau, attirant. Je crois qu'il m'attire. 


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