- Tu es superbe.

- Yoon', je voudrais que tu restes naturel.

Je sais qu'il s'en veut de m'avoir ramené à l'hôpital, alors que je le lui avais interdit. Mais j'aurais fait la même chose si j'avais été à sa place.

Il fronce les sourcils, l'air de ne pas comprendre.

- Ne fais pas semblant de te soucier de moi. Je ne veux pas que tu aies pitié de moi, je lâche.

Après un instant de réflexion, il retire ses chaussures.

- Qu'est-ce que tu fais ? je demande.

- Je reste naturel.

Il tire la couverture, et s'étend près de moi, dans le lit. Il me soulève, me serre dans ses bras, et me chuchote sévèrement à l'oreille :

- Je t'aime. J'en souffre comme je n'ai jamais souffert de ma vie, mais je t'aime. Ne me dis plus jamais ça, d'accord ? Excuse-toi.

Je pose la paume de ma main sur sa joue :

- Excuse-moi, Yoon'...

Il évite mon regard. Je crois qu'il essaie de ne pas pleurer.

Nous passons l'après-midi ensemble. Il me dit que ma mère est partit tôt ce matin.

Je fais une petite sieste, pendant qu'il zappe sans aucun intérêt, les chaînes de télévision.

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En me réveillant, je m'aperçois que l'infirmier a apporté un goûter. Une glace.

Yoongi, à côté de moi, se redresse, prends la glace, et enlève le papier. Il la glisse dans ma bouche, doucement. J'éclate de rire, prends la glace de sa main, et fait pareil que lui.

Nous rions ensemble, et quand il pose ses lèvres sur les miennes, seul le goût de la vanille ressort.

Je lui murmure :

- Touche-moi.

- Mais je suis... tout contre toi...

- Comme ça, dis-je, en guidant sa main sur mon torse.

Il me caresse tout doucement les abdominaux, à travers ma chemise de nuit blanche.

- Comme ça ?

Il m'effleure comme si j'étais un objet précieux, comme s'il en était abasourdi. Nous frissonnons ensemble, peau contre peau.

- Je voudrais faire l'amour, je lâche, dans un souffle.

Sa main s'immobilise :

- Quand ?

- Juste une fois, avant de mourir.

Je le regarde, de mes yeux implorants :

- Promets-moi.

Son regard est incroyable. Profond et foncé, comme s'il percevait certains aspects du monde que d'autres s'imaginent à peine.

- Je te le promets.

- Tiens-moi la main. Ne lâche pas. Jamais.

Chaque fois que je ferme les yeux, je tombe.

Une chute sans fin.

Je ne veux pas être mort.

Je n'ai pas été aimé assez longtemps.

Ou peut-être était-ce moi qui n'aimait pas ?

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Ouvrir les yeux !
Ouvrir ces foutus yeux !

Je ne peux pas. Je tombe.

Je ne veux pas tomber. J'ai peur.

Penser à quelque chose. Aux yeux de Yoongi.

Mais je ne peux m'accrocher à rien.

Comme un arbre qui perd ses feuilles.

Qu'est-ce qui arrive aux corps morts ?

Poussière, brillance, pluie.

Peut-être que je reviendrais sous la forme de quelqu'un d'autre.

N'importe quoi pourrait arriver maintenant.

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Je serre brusquement ce que je tiens dans la main, et m'asseois sur le lit. Ce sont les doigts de Yoongi que je tiens. Il dort. Assez profondément, je pense.

En tout cas, pour que je réussise à le mettre dans un fauteuil roulant, il dort bien assez.

Je réussis à franchir les portes de l'hôpital, sans que personne ne s'aperçoive de quelque chose.

Devant la voiture rouge, je prends Yoongi par les épaules, et sous les genoux, puis le dépose doucement sur le siège passager.

Je m'asseois ensuite derrière le volant, et ferme les yeux.

Me rappelais-je des leçons de conduite que Yoongi m'a données ?

Je roule rapidement, pressé de rentrer chez moi. J'aperçois d'un coup d'oeil que Yoongi est en train de se réveiller.

Il semble... perdu ?

Je suis tellement crispé, que je suis persuadé qu'il peut percevoir ma tension.

Il ne dit rien, et je commence à m'inquiéter.

Il ne fait rien, ne sourit pas.

Je m'attends à ce qu'il m'engueule... mais non.

Il a changé à ce point ?

Le reste du trajet se fait dans le plus grand des silences.

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Quand j'entre dans la maison, je me rends compte que Yoongi ne m'a pas suivi.

J'hausse les épaules. Il est assez distant depuis qu'il s'est réveillé.

J'enlève ma veste, quand je suis violemment plaqué contre le mur. Je grimace de douleur.

Je sens son souffle glacé sur mes lèvres, alors qu'il serre le col de ma chemise, entre ses fins doigts froids :

- Plus ja-mais. Plus jamais tu ne me refais une frayeur pareille, c'est clair ?

Tout mon esprit me crit de lui répliquer que ce n'est pas de ma faute, mais j'abandonne complètement cette idée quand il me gifle.

- Plus jamais, répète-t-il.

La souffrance de le voir partir me plie en deux.

C'est bien pire que lorsque l'on m'arrache la vie.

La peur ne sortira donc jamais de ma vie ?

La douleur sera-t-elle toujours présente pour m'achever ?

La peur et la douleur.

Je ferme les yeux.

Et me perds dans un océan de cauchemars.

Souviens-toi /YOONMINWhere stories live. Discover now