Voyage d'un Khajiit en Bordelciel

Prologue

Le soleil n'était pas encore haut et pourtant Mo'grul n'en pouvait déjà plus. Il était entouré de geignards et de faibles. Eux des bandits ? Il en riait intérieurement. Peut-être étaient-ils des bandits lorsqu'il s'agissait d'affronter des caravanes de fermiers pour piller l'or et les objets de valeurs. Peut-être étaient-ils des bandits quand il les avaient rejoint il y a déjà 3 ans, mais maintenant ?

Il les entendait se plaindre et trembler en dehors. Ne parvenant plus à se rendormir, il resta sous sa tente et se surprit à rêver.

Depuis qu'il était parti de la forteresse, il avait pérégriné un peu partout, passant de Markarth la ville de pierre à Faillaise et sa cité bigarrée. Il avait passé ses années de jeunesse orc dans les plaines à chasser le gibier pour survivre, dans les étendues glacées du Nord à apprendre les rudiments de la survie, dans les toundras chaudes à maîtriser les bases des plantes médicinales. Il avait même pu s'intéresser à la géothermie tout en se détendant dans les sources chaudes.

Une fois-même, il avait découvert un cimetière de mammouths et il en était ressorti plus sage, s'étant posé de nombreuses questions sur la finalité de la vie.

Puis, il avait rejoint cette troupe de bandits afin de poursuivre ces réflexions. Il avait cherché à comprendre le sens de la mort tandis qu'il la donnait à de nombreuses reprises.

Pourtant, jusqu'ici, il n'avait pas découvert grand-chose. Les gens mourraient tous dans la peur. Cela n'avait rien à voir avec la majesté des mammouths : une mort paisible, majestueuse, acceptée. Une certaine beauté d'âme se dégageait de ces défunts. Beauté qui n'avait de cesse de le narguer.

À l'extérieur de la tente, les discussions étaient devenues encore plus fortes, certains commençaient visiblement à paniquer. Sorti de sa rêverie, Mo'Grul écouta distraitement en croisant ses bras derrière sa tête, allongé sur sa couche.

" Geltik et Grelka sont morts ! Par Mephala, tu trouves qu'c'est une farce toi ?

- Mais je te jure que c'est vrai pourtant !

- T'es en train d'm'dire qu'une sorte d'chat d'Khajiit habillé en robe, avec une épée en bois d'gamin vous a t'nu tête à toi et tes quat'gars ?

- Il avait aussi tout une ribambelle de poupées d'enfants à la ceinture chef !" Ajouta l'un des comparses qui tremblait visiblement de terreur. On pouvait lire l'horreur dans son œil valide, l'autre était tuméfié et fermé.

"À d'autres ! Ah ! Vous m'dîtes que vous avez attaqué un pov' voyageur khajiit ? Un chaton solitaire en bordeciel à 5 contr'1 ? Et vous revenez bredouille avec 2 morts et un gars presque borgne ?"

Pour la première fois il eut un moment de silence, lourd et pesant.

"Vou'fouté'd'ma'ggle ?!" Hurla soudain la première voix, mangeant la moitié de ses mots sous l'effet de la rage.

Mo'Grul s'attendait à une réponse de la part des malheureux bandits mais il fut surpris par une horde de cris de terreur. Il sortit de sa tente en catastrophe, se préparant à intervenir et à séparer le groupe qui avait dû en venir aux mains.

Une boule de feu le cueillit et le renvoya dans une gerbe de flamme sur la paillasse de sa tente. Il n'avait eu que le temps d'apercevoir des poupées d'enfants accrochées à une ceinture.

Dehors retentissait les cris des pauvres bandits devenus les fermiers qu'ils avaient eux-mêmes tués. Les explosions des boules de feu n'étaient interrompues que par des "Urrrryaaaa !".

Mo'Grul identifia cela comme un cri de bataille. C'était grotesque et beau à la fois.

Comment un orc tel que lui avait-il pu être vaincu en un éclair par une boule de poils qui se jetait dans la bataille comme sur son griffoir ? Soudain Mo'Grul sourit, il venait de comprendre.  Bizarrement, l'orc se détendit. Il remercia le pouppet dissident qui venait de mettre un terme à sa vie tout en lui offrant la réponse qu'il cherchait tant.

Mentalement, il s'écria : "Urrryaaaa !". Puis il s'éteignit.

Quelque temps plus tard, une patrouille de gardes trouva le camp de bandits. Sur le corps d'un orc reposait une poupée d'enfant.