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AVE QUOD.

Comme l'oiseau qui étend ses ailes, j'me souviens de ce gosse. En haut d'la falaise, qu'il jetait un dernier regard par-dessus son épaule, derrière lui - en direction du village en feu. 

Il y avait les cordes des violoncelles qui vibraient sous les archers, la terre qui tremblait sous les pieds, un rythme effréné, celui du suspense - d'une embuscade prochaine. Les tasses qui s'renversent, les verres posés à l'unisson - brusquement, de gestes vifs, - parce qu'il est parti, et parce qu'on l'cherche, et il est là, à faire le renard au milieu du piège des chasseurs, sans rien d'autre avec lui, que ses pieds pour courir, et son âme - de chenapan, qui s'enfuit, dans les hautes herbes, les blés des champs, qui atteignent le ciel. On dirait qu'il s'fait la malle, et qu'il prend ses jambes à son cou - dans le secret, alors que le chrono tourne.

Mais j'aimerais les voir, - l'attraper, parce que lui, on ne l'attrape pas. On le saisit à pleines mains, on le presse, avec ferveur. Comme une mouche, dans notre champ de vision, qu'on chope subitement. Ils sont là, à l'suivre à la trace - ignorant que lui, peut se fondre dans la masse - la plus ardente de toutes, dans une fumée opaque, dans le doute, 

qu'il ne nous reviendra jamais. 


Je peins dans mon imagination, sur le papier de mon coeur, un paysage vivant : celui d'un village, noyé, baigné, dans la peur. - Avec une symphonie essoufflée, qui résonne dans la plaine, et ce gamin, qui la détale avec peine. Une scène, qui ne semble que trop banale, - mais qui se déroule, à chaque fois, dans une ambiance différente, propre, aux soubresauts de leurs coeurs, - les chasseurs, qui se retrouvent sans fusil, les appels, qui sonnent comme des plaintes. Une mélancolie certaine, une sale tragédie - il s'en va souvent, - mais il ne disparaît pas. 

Je me vois être, le spectateur de leur malheur. Un vieux fou, qui entend au milieu du drama, la musique cinématographique, qui change de ton, devenant soudain plus sûre d'elle - et marquant, alors qu'on ne s'y attend pas, l'arrivée de la scène, et celui qui changera ça.

Ce panorama...

Comme l'oiseau qui prend son élan, j'me souviens de ce gosse. En bas de la falaise, qu'il ne les regardait même pas, le pied posé sur la première pierre - son âme au fond du trépas, - qu'il fixait la trace du dernier rebord.

Les brailleurs sont de nouveau là, et ils scandent son nom. Mais j'aimerais les voir, monter à sa suite - parce que lui, on ne le suit pas. On s'y accroche,- si ce n'est avec les mains, qui sont au fond du pantalon, alors avec les dents - avec dans le froc, ni courage ni un rond. 

On le chope, subitement.

Qu'est ce qu'ils feraient pas, sous un dernier coup de vent, pour voir la braise qui crépite - et qu'il soit plus avenant. Parce qu'avec lui, on ne parle pas, ou peu, mais on pense. Le vieux fou ressasse, presque avec obsession, la scène de sa course. - Avec, l'oiseau, qui s'envole, à force d'aller trop vite, - et les chasseurs, qui soufflent, et le ton de leur voix, qui réplique:

"Il est là, il est là !"

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